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pu blesser et à qui nous remettons de grand cœur des torts semblables, -nous n'y trouvons rien à regretter. Nous l'avons commencée, poursuivie, terminée avec une entière bonne foi; nous n'avons esquivé aucun argument, supprimé aucun document, ni cherché à surprendre d'aucune manière l'adhésion d'aucun personnage ou la raison d'aucun lecteur. Dans une matière si grave, nous aurions rougi de nous appuyer sur une autorité douteuse, d'employer un subterfuge, de n'être pas en tout et toujours clair, exact et précis. Nous avons toujours eu présente à l'esprit cette pensée, que ce serait pour nous une grande honte et un grand remords si, par de misérables habiletés de parole ou de plume, nous obtenions de l'erreur ce qu'il ne faut demander qu'à la conscience et à la raison, aussi parfaitement éclairées qu'elles peuvent l'être dans les ténèbres de ce monde. C'était le triomphe de la vérité que nous voulions, et non pas celui de nos conceptions et de nos vanités. Notre scrupule a été tel, qu'avec la seule collection de l'Univers, un esprit sérieux pourra toujours écrire une histoire complète et impartiale de la discussion.

Maintenant, donc, nous attendons. Il faut présentement exécuter la loi. Ce soin ne nous regarde pas. Nous n'avons ici ni à provoquer la résistance, ni à conseiller ou à imposer l'obéissance. Nous avons dit tout ce que nous pouvions dire, donné tous les avertissements que nous pouvions donner : c'est à d'autres de tracer la voie, de dire ce qui est possible et ce qui ne l'est pas, d'indiquer ce qu'il faut faire et de quoi il faut s'abstenir. Notre rôle, à nous, devient plus aisé; il consiste purement et simplement à obéir. Nous obéirons.

Nos évêques sont les gardiens des consciences chré

tiennes. La loi sera pour nous ce qu'elle sera pour eux. A Dieu ne plaise que nous manquions jamais de docilité et de courage pour accomplir les résolutions qu'ils prendront dans leur sagesse inspirée par la foi.

soit

Les liens si forts et si chers qui nous attachaient à quelques-uns des auteurs de la loi ne sont point brisés. Nous sommes prêts à marcher d'accord avec eux, pour réformer cette loi, si, à l'expérience, elle se trouve décidément mauvaise, ce qu'ils reconnaîtront aussitôt que nous; soit pour en tirer le meilleur parti possible, si elle est exécutable, ce que nous verrons aussi bien qu'eux; soit pour la défendre, si enfin nous nous sommes déci– dément trompés. Et puisse cette dernière éventualité se réaliser préférablement à toutes les autres! Notre amourpropre ne peut pas recevoir de blessures, quand l'intérêt de l'Eglise est sauvé.

L'ÉLECTION DE M. SUE.

30 avril 1850.

Voilà M. Sue représentant de Paris; voilà le parti de l'ordre battu pour la seconde fois par le parti du désordre, et battu d'une façon signalée. Nous engageons les journaux conservateurs à ne pas essayer, comme ils l'ont fait trop souvent, de pallier leur défaite par des explications plus ou moins ingénieuses. La défaite est claire, entière, incontestable, de quelque façon qu'on y regarde; il n'y a point de calculs, point de ressources d'esprit qui puissent la déguiser ou seulement l'atténuer.

Le candidat modéré était le meilleur que l'on pùt choisir, un homme de bien, un bon citoyen dans toute la force du mot; un enfant du peuple entré dans la bourgeoisie par la porte d'honneur, un grand caractère avec une grande simplicité; inoffensif d'ailleurs et n'ayant

pas même attaqué la République; tel, enfin, que toutes les fractions d'opinion, parmi ceux qui tiennent encore à un ordre social quelconque, ont dù se rattacher à lui, et l'ont fait, et que personne, dans la bigarrure infinie du parti modéré, n'a pu le rejeter que par stupidité pure. Cette candidature si bien inventée, a été soutenue avec toute l'ardeur et toute la science possibles. L'effort pour la faire réussir a été constant, vigilant, unanime. Soumis avec rage à ce baptême d'injures et de calomnies par lequel tout citoyen doit passer chez nous avant d'être admis à l'honneur de nous gouverner ou de nous donner des lois, M. Leclerc, grâce au zèle de ses amis, prompts à tout démentir et à tout expliquer, est resté aussi pur que s'il n'avait pas été exposé aux ignominieuses enquêtes du suffrage universel. Au moment de voter, personne, ni ceux qui l'acceptaient, ni ceux qui le repoussaient, n'a pu douter de son origine, de son intégrité, de ses mérites. Il ne s'est pas trouvé une tare dans cette vie examinée à la loupe, pas un mensonge dans cet état de services passé au crible. C'était bien l'enfant du peuple, le soldat volontaire blessé à Badajoz, le sergent blessé à Waterloo, le garde national, défenseur pendant dix-huit ans de l'ordre et des lois, le négociant probe et laborieux, le citoyen héroïque qui, aux journées de Juin, sans faste et sans demander de récompenses, après avoir donné un de ses fils à la société menacée lui avait offert le second, continuant de s'offrir luimême. Telle était donc cette candidature, qu'il ne semblait pas qu'elle dût échouer; en sorte qu'elle avait encore pour elle la force et l'enthousiasme qu'inspire la certitude du succès.

Et comme si ce n'était pas assez, les meneurs du parti

contraire, un moment divisés, s'étaient mis d'accord, non sans peine, sur un nom qui ressemblait plus à une bravade insolente qu'à un choix politique. A l'enfant du peuple monté d'un échelon dans la société par la persévérance et par l'honnêteté du travail, ils opposaient M. Sue, un bourgeois épicurien, auteur d'immondes et sots romans, qui a mis au service des doctrines les plus contraires sa plume, de laquelle aucune doctrine n'a pu faire tomber un livre qui ne fùt pas corrupteur ou qui fût écrit en bon français. Injuriant ou flagornant le peuple, mais le calomniant et l'avilissant toujours soit qu'il ie flagorne ou l'injurie; sectaire, lors même qu'il osait se proposer de défendre la vérité, si cet écrivain, à travers les misérables voyages que son esprit a faits dans les idées humaines, conserve un caractère qui lui soit propre, c'est la puanteur ignoble du style, d'abord, et ensuite l'ignorance ou la haine brutale de toutes les vertus que le Christ a recommandées au monde dans sa miséricorde pour les pauvres et pour les petits du monde. A la fin, connaissant sa vocation, il a compris qu'il y avait en lui quelque chose qui l'empêcherait de conquérir un nom et de se créer une importance dans les classes supérieures de la société; et, laissant là son petit bagage d'idées honnêtes, qui ne pouvait lui ouvrir la porte des salons, il a cherché la popularité des carrefours, des bouges et des clubs. Il a fait un livre, il en a fait deux, il en a fait trois, il en a fait dix pour outrager la religion, le dévouement, la charité, pour nier la famille, pour avilir toutes les vertus, pour réhabiliter tous les vices. Il y a un livre de lui en l'honneur de la luxure, il y en a un en l'honneur de la paresse; tous ses livres sont en l'honneur du luxe, de l'adultère, de la volupté. Que dirons-nous? Il est dou

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