Page images
PDF
EPUB

DES EDITEURS.

CE volume renferme les principaux ouvrages de M. de Voltaire fur la phyfique. On y trou

vera :

1o. Ses Elémens de la philofophie de Newton.

2o. Une réponse aux critiques de cet ouvrage.

3o. Une differtation fur le feu, qui a concouru en 1740 pour le prix proposé par l'académie des fciences de Paris.

4o. Un mémoire fur les forces vives, préfenté à la même académie.

5o. Des réflexions fur deux ouvrages de Mine la marquife du Châtelet. Ses inftitutions de phyfique, et une differtation fur le feu qui avait concouru avec celle de M. de Voltaire.

Ces ouvrages font fuivis de plufieurs morceaux d'hiftoire naturelle : une Description d'un négre blanc, une Differtation fur les changemens arrivés au globe, un recueil de différentes obfervations, intitulé Singularités de la nature, et des Lettres d'un capucin et d'un carme

à l'occafion des expériences de M. Spalanzani fur les limaçons.

Lorfque M. de Voltaire compofa fes Elémens de la philofophie newtonienne, presque tous les favans français étaient cartéfiens: Maupertuis et Clairaut, tous deux géomètres, de l'académie des fciences, mais alors très-jeunes, étaient prefque les feuls newtoniens connus public.

du

La prévention pour le cartéfianisme était au point que le chancelier d'Aguesseau refufa un privilége à M. de Voltaire. Quarante ans auparavant, la philofophie de Descartes était profcrite dans les écoles de Paris; et l'exemple de ce qui était arrivé n'avait point fuffi pour apprendre que c'était en vain qu'on s'oppofait aux progrès de la raifon, et que pour juger Newton comme Defcartes, il aurait fallu du moins fe mettre en état de les entendre.

L'ouvrage de M. de Voltaire fut utile ; il contribuà à rendre la philosophie de Newton auffi intelligible qu'elle peut l'être pour ceux qui ne font pas géomètres.

Il n'eut garde de chercher à relever ces élémens par des ornemens étrangers; feulement il y répandit des réflexions d'une philofophie jufte et modérée, présentées d'une manière piquante, caractère commun à tous fes ouvrages.

Il s'éleva toujours contre l'abus de la plaifanterie dans les difcuffions de physique. L'ingénieux Fontenelle en avait donné l'exemple; Pluche et Caftel en fefaient fentir l'abus. Quelque temps après, M. de Voltaire fut obligé de s'élever également contre un autre défaut plus grand peut-être, la manie d'écrire fur les sciences en profe poëtique. Cet abus est plus dangereux. Les mauvaises plaifanteries de Caftel ou de Pluche ne peuvent qu'amufer les colléges et y perpétuer quelques préjugés l'abus de l'éloquence au contraire peut fufpendre les progrès de la philofophie.

Trois philofophes partageaient alors en Europe l'honneur d'y avoir rappelé les lumières, Defcartes, Newton et Leibnitz; et ceux qui n'avaient point approfondi les fciences plaçaient Mallcbranche prefque fur la même ligne.

Defcartes fut un très-grand géomètre. L'idée fi heureuse et si vafte d'appliquer aux queftions géométriques l'analyfe générale des quantités changea la face des mathématiques ; et cette gloire il ne la partagea avec aucun des géomètres de fon temps, qui cependant fut très-fécond en hommes doués d'un grand génie pour les mathématiques, tels que Cavalleri, Pafcal, Fermat et Wallis.

Quand même Defcartes devrait à Snellius la connaiffance de la loi fondamentale de la dioptrique, ce qui n'est rien moins que prouvé, cette découverte était reftée abfolument ftérile entre les mains de Snellius; et Descartes en tira la théorie des lunettes : on lui doit celle des miroirs et des verres dont les furfaces feraient formées par des arcs de fections coniques. Il découvrit indépendamment de Galilée les lois générales du mouvement, et les développa mieux que lui il fe trompa fur celles du choc des corps, mais il a imaginé le premier de les chercher ; et il a montré quels principes on devait employer dans cette recherche. On lui doit fur-tout d'avoir banni de la phyfique tout ce qui ne pouvait se ramener à des caufes mécaniques ou calculables, et de la philofophie l'usage de l'autorité.

Newton a l'honneur unique jufqu'ici d'avoir découvert une des lois générales de la nature; et quoique les recherches de Galilée fur le mouvement uniformément accéléré, celles de Huyghens fur les forces centrales dans le cercle, et fur-tout la théorie des développées, qui permettait de confidérer les élémens des courbes comme des arcs de cercle, lui euffent ouvert le chemin, cette découverte doit

mettre fa gloire au-deffus de celle des philofophes ou des géomètres, qui même auraient eu un génie égal au fien. Képler n'avait trouvé que les lois du mouvement et des corps céleftes; et Newton trouva la loi générale de la nature dont ces règles dépendent. La découverte du calcul différentiel le place au premier rang des géomètres de fon fiècle; et fes découvertes fur la lumière, à la tête de ceux qui ont cherché dans l'expérience le moyen de connaître les lois des phénomènes.

Leibnitz a difputé à Newton la gloire d'avoir trouvé le calcul différentiel ; et en examinant les pièces de ce grand procès, on ne peut fans injustice refuser à Leibnitz au moins une égalité toute entière. Obfervons que ces deux grands hommes fe contentèrent de l'égalité, fe rendirent justice, et que la difpute qui s'éleva entre eux fut l'ouvrage du zèle de leurs difciples. Le calcul des quantités exponentielles, la méthode de différencier fous le figne, plufieurs autres découvertes trouvées dans les lettres de Leibnitz, et auxquelles il femblait attacher peu d'importance, prouvent que, comme géomètre, il ne cédait pas en génie à Newton luimême. Les idées fur la géométrie des fituations, ses effais fur le jeu de folitaire font les premiers traits d'une fcience nouvelle qui peut être

« PreviousContinue »