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Si étant forcé enfin d'abandonner ces tourbillons imaginaires, on se réduit à dire que cette gravitation, cette attraction dépend de quelqu'autre cause inconnue, de quelqu'autre propriété fecrète de la matière, cela peut être, fans doute ; mais cette autre propriété sera elle-même l'effet d'une autre propriété, ou bien fera une cause primordiale, un principe établi par l'auteur de la nature; or, pourquoi l'attraction de la matière ne fera-t-elle pas elle-même ce premier principe? Newton, à la fin de fon optique, dit que peut-être cette attraction est l'effet d'un esprit extrêmement élastique et rare, répandu dans la nature; mais alors d'où viendrait cette élafticité ? ne fera-t-elle pas auffi difficile à comprendre que la gravitation, l'attraction, la force centripète ? Cette force m'est démontrée; cet esprit élaftique est à peine soupçonné; je m'en tiens là, et je ne puis admettre un principe dont je n'ai pas la moindre preuve, pour expliquer une chofe vraie et incompréhenfible, dont toute la nature me démontre l'existence. (21)

(21) On appelle perturbations d'une planète les changemens que l'attraction des corps céleftes caufe dans l'orbite que cette planète aurait décrite, fi elle n'avait été attirée que par le foleil ou la planète principale. Newton ne put donner une méthode fuffifamment exacte de calculer ces perturbations. Cette méthode n'a été trouvée qu'environ foixante ans après la publication du livre des principes par trois grands géomètres du continent, MM. d'Alembert, Euler, et Clairault.

CHAPITRE VII.

NOUVELLES PREUVES ET NOUVEAUX EFFETS DE LA GRAVITATION QUE CE POUVOIR EST DANS CHAQUE PARTIE DE LA MATIERE: DECOUVERTES DEPENDANTES DE CE PRINCIPE.

Remarque générale et importante fur le principe de l'altraction. La gravitation, l'attraction eft dans toutes les parties de la matière également. Calcul hardi et admirable de Newton.

RECUEILLONS

ECUEILLONS de toutes ces notions, que la force centripète, l'attraction, la gravitation eft le principe indubitable et du cours des planètes, et de la chute de tous les corps, et de cette pefanteur que nous éprouvons dans les corps. Cette force centripète fait graviter le foleil vers le centre des planètes comme les planètes gravitent vers le foleil, et attire la terre vers la lune comme la lune vers la terre. Une des lois primitives du mouvement eft encore une nouvelle démonftration de cette vérité : cette loi eft que la réaction eft égale à l'action; ainfi le foleil gravite fur les planètes, les planètes gravitent fur lui ; et nous verrons, au commencement du chapitre fuivant, de quelle manière cette grande loi s'exécute dans notre univers. Or, cette gravitation agissant nécessairement en raifon directe de la maffe, et le foleil étant environ quatre cents foixante-quatre fois plus gros que toutes les planètes mifes ensemble, ( fans compter les fatellites de Jupiter, l'anneau et les lunes de Saturne) il faut que

le foleil foit leur centre de gravitation; ainfi il faut qu'elles tournent toutes autour du foleil.

Remarquons toujours foigneufement que quand nous difons que le pouvoir de la gravitation agit en raison directe des maffes, nous entendons toujours que ce pouvoir de la gravitation agit d'autant plus fur un corps que ce corps a plus de parties; et nous l'avons démontré en fefant voir qu'un brin de paille descend auffi vîte dans la machine purgée d'air qu'une livre d'or. Nous avons dit, (en : fefant abflraction de la petite réfiftance de l'air) qu'une balle de plomb, par exemple, tombe de quinze pieds fur la terre en une feconde; nous avons démontré que cette même balle tomberait de quinze pieds en une minute, fi elle était à foixante rayons de la terre comme eft la lune; donc le pouvoir de la terre fur la lune eft au pouvoir qu'elle aurait fur une balle de plomb transportée à l'élé-› vation de la lune, comme le corps folide de la lune serait avec le corps folide de cette petite balle. C'eft en cette proportion que le foleil agit fur toutes les planètes ; il attire Jupiter et Saturne, et les fatellites de Jupiter et de Saturne, en raison directe de la matière folide qui eft dans les fatellites de Jupiter et de Saturne, et de celle qui eft dans Saturne et dans Jupiter.

De-là il découle une vérité inconteftable, que cette gravitation n'eft pas feulement dans la maffe totale de chaque planète, mais dans chaque partie de cette masse, et qu'ainfi il n'y a pas un atome de matière dans l'univers qui ne foit revêtu de cette propriété.

Nous choifirons ici la manière la plus fimple dont Newton a démontré que cette gravitation eft également dans chaque atome. Si toutes les parties d'un globe n'avaient pas également cette propriété, s'il y en avait de plus faibles et de

plus fortes, la planète en tournant fur elle-même présenterait néceffairement des côtés plus faibles, et enfuite des côtés plus forts à pareille distance : ainsi les mêmes corps dans toutes les occafions poffibles éprouvant tantôt un degré de gravitation, tantôt un autre à pareille distance, la loi de la raison inverfe des quarrés des diftances, et la loi de Kepler, feraient toujours interverties: or elles ne le font pas ; donc il n'y a dans toutes les planètes aucune partie moins gravitante qu'une autre. En voici encore une démonftration. S'il y avait des corps en qui cette propriété fût différente, il y aurait des corps qui tomberaient plus lentement et d'autres plus vîte dans la machine du vide : or tous les corps tombent dans le même temps, tous les pendules même font dans l'air de pareilles vibrations à égale longueur; les pendules d'or, d'argent, de fer, de bois d'érable, de verre, font leurs vibrations en temps égaux; donc tous les corps ont cette propriété de la gravitation précisément dans le même degré, c'eft-à-dire, précifément comme leurs maffes; de forte que la gravitation agit comme cent fur cent atomes, et comme dix fur dix

atomes.

De vérité en vérité on s'élève infenfiblement à des connaiffances qui femblaient être hors de la fphère de l'efprit humain. Newton a ofé calculer, à l'aide des feules lois de la gravitation, quelle doit être la pefanteur des corps dans d'autres globes que le nôtre : ce que doit pefer dans Saturne, dans le foleil, le même corps que nous apelons ici une livre ; et comme ces différentes pesanteurs dépendent directement de la maffe des globes, il a fallu calculer quelle doit être la maffe de ces aftres. Qu'on dise après cela que la gravitation, l'attraction eft une qualité occulte; qu'on ofe appeler de ce nom une loi universelle, qui conduit à de fi étonnantes découvertes.

CHAPITRE VIII.

THEORIE DE NOTRE MONDE PLANETAIRE.

Démonftration du mouvement de la terre autour du foleil, tirée de la gravitation. Groffeur du foleil. Il tourne fur lui-même autour du centre commun du monde planétaire. Il change toujours de place. Sa denfité. En quelle proportion les corps tombent fur le foleil. Idée de Newton fur la denfité du corps de Mercure. Prédiction de Copernic fur les phafes de Vénus.

LE SOLEI L.

LE foleil eft au centre de notre monde planétaire, et doit y être néceffairement. Ce n'eft pas que le point du milieu du foleil foit précisément le centre de l'univers; mais ce point central, vers lequel notre univers gravite, eft nécessairement dans le corps de cet aftre : et toutes les planètes, ayant reçu une fois le mouvement de projectile, doivent toutes tourner autour de ce point, qui est dans le foleil. En voici la preuve.

Soient ces deux globes A et B, le plus grand repréfentant le foleil, (figure 37) le plus petit représentant une planète quelconque. S'ils font abandonnés l'un et l'autre à la loi de la gravitation, et libres de tout autre mouvement, ils feront attirés en raifon directe de leurs maffes ils feront déterminés en ligne droite l'un vers l'autre ; et A, plus gros un million de fois que B, fe jettera vers lui un million de fois plus vite que le globe B n'ira vers A. Mais qu'ils aient l'un et l'autre un

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