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* Tout l'esprit d'un auteur consiste à bien définir et à bien peindre : Moïse, HOMÈRE, PLATON, VIRGILE, HORACE, ne sont au-dessus des autres écrivains que par leurs expressions et par aut leurs images: il faut exprimer le vrai pour écrire naturellement, omfortement, délicatement.[vami suffit done, of. Boilian I

ees * On a dû faire du style ce qu'on a fait de l'architecture 3: on a

Willentièrement abandonné l'ordre gothique, que la barbarie avait

Tour introduit pour les palais et pour les temples; on a rappelé le doorique, l'ionique et le corinthien: ce qu'on ne voyait plus que dans

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les ruines de l'ancienne Rome et de la vieille Grèce, devenu mocf derne, éclate dans nos portiques et dans nos péristyles. De même, on ne saurait en écrivant rencontrer le parfait, et, s'il se peut, Ca surpasser les anciens que par leur imitation.manis que Combien de siècles se sont écoulés avant que les hommes, J'ai dans les sciences et dans les arts, aient pu revenir au goût des e Five des anciens, et reprendre enfin le simple et le naturel!

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On se nourrit des anciens et des habiles modernes; on les

d'un homme qui a fait de grandes choses impose plus de respect que toutes les épi-
thètes.» VOLTAIRE, Siècle de Louis XIV, c. 43.

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4. Bien définir. » Il ne s'agit pas d'une définition sèche et technique; bien définir, c'est avoir une conception nette et precise de son objet. «Bien peindre, rentre cette pensée si clairement conçue, d'une manière sensible et frappante. La Bruyère dit en parlant des avares : « De telles gens ne sont ni amis, ni citoyens, ni chrétiens, ni peut-être des hommes; ils ont de l'argent. » C'est là définir. « Vous voyez le fleuriste planté, et qui a pris racine au milieu de ses tulipes. » C'est ce qui s'appelle pendre. — « Image et précision, dit Voltaire; ces deux mots sont tout un traité de rhétorique.

2. Quand même on ne le considère que comme un homme qui a écrit. Note de La Bruyère.

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3. « Ce qu'on a fait de l'architecture. Fénelon s'est servi de la même comparaison et presque du même langage. Il a traité assez longuement, et avec autant de grace que de raison, la question si débattue des anciens et des modernes. Nous renvoyons à la Lettre sur les occupations de l'Académie française, § x, et aux notes de M. Despois.

4. « Que la barbarie avait introduit. Tout le monde alors partageait ce mépris fort finjuste pour les chefs-d'oeuvre du moyen age. Perrault lui-même, lorsqu'il s'agissait d'architecture, était Grec comme La Bruyère et Fénelon.

5. « Ce qu'on ne voyait plus, devenu moderne. » Voici une tournure tout à fait antique. Ce que est un véritable pronom neutre, et il est ici à la fois sujet et régime, comme cela se pratique souvent en latin.

6. Leur imitation. » « Comme les jeunes artistes cepient longtemps d'après l'antique, ne pensez-vous pas que l'imitation des jeunes littérateurs devrait être la même, et qu'avant de tenter quelque chose de nous, nous devrions aussi nous occuper de traduire d'après les poëtes et les orateurs anciens? Notre goût, fixé d'abord par des beautés sévères que nous nous serions pour ainsi dire appropriées, ne pourrait plus rien souffrir de médiocre et de mesquin` DIDEROT, Correspondance."

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7. Avant que.... les hommes aient pu. On a élevé la question de savoir si « avant
que» devait être suivi de «ne. » Les bons écrivains sont presque unanimies pour
suppression de la négative.
a. On se nourrit.

Les partisans des modernes avaient le malheur d'avoir contre

• contact avec le perfection

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presse, on en tire le plus que l'on peut, on en renfle ses ouvrages'; et quand enfin l'on est auteur, et que l'on croit marcher tout seul, on s'élève contre eux, on les maltraite, semblable à ces enfants drus et forts d'un bon lait qu'ils ont sucé, qui battent eur nourrice".

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Un auteur moderne1 prouve ordinairement que les anciens nous sont inférieurs en deux manières, par raison et par exemple: il tire la raison de son goût particulier, et l'exemple de ses ouvrages.

Il avoue que les anciens, quelque inégaux et peu corrects qu'ils soient, ont de beaux traits; il les cite, et ils sont si beaux qu'ils font lire sa critique.

Quelques habiles prononcent en faveur des anciens contre les modernes; mais ils sont suspects, et semblent juger en leur propre cause, tant leurs ouvrages sont faits sur le goût de quité: on les récuse.

* L'on devrait aimer à lire ses ouvrages à ceux qui er. assez pour les corriger et les estimer(

juste valeum) Ne vouloir être ni conseillé ni corrigé sur šon ouvrage pédantisme.

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eux tous ceux qu'ils auraient pu opposer avec le plus d'avantage aux anciens et Racine surtout les accablaient de l'autorité de leur nom, de leur science et sarcasmes. La dispute dura néanmoins longtemps, et on peut lui attribuer par tie l'affaiblissement des études classiques dans le xvIIe siècle. Perrault pas le grec; Saint-Evremond ne voulait rien souffrir de ce qui n'avait pas ' cour; Lamotte pour défigurer Homère, n'eut qu'à le traduire; Fontenelle trop méchants vers, pour estimer la poésie. Tous avaient de l'esprit, mais de ce Sprit qui excelle dans les petites choses et ne peut atteindre ni comprendre les grandes, 4. On en renfle ses ouvrages. Métaphore heureuse et précise. « Son latin et son grec, dit Montaigne, l'ont rendu plus sot et plus presomptueux qu'il n'estoit party de la maison. Il en debvoit rapporter l'ame pleine, il ne l'en rapporte que bouffie; et at l'a seulement enflée, au lieu de la grossir. Et Voltaire:

Seule elle demeura

Avec l'orgueil, compagnon dur et triste:
Bouffi, mais sec, ennemi des ébats,

Il renfle l'âme, et ne la nourrit pas.

2. Drus. Terme de fauconnerie qui se dit des oiseaux qui sont prêts à s'envoler du nid. On le dit figurément de ce qui est déjà crù, qui se porte bien. Cet enfant est bien dru, bien grand pour son age. En vieux français, il signifiait gaillard. » FURETIÈRE.

3. Nourrice.» Comparaison à la fois jolie et malicieuse.

4. On peut conjecturer que La Bruyère désigne ici Charles Perrault, de l'Académie française, qui venait de faire paraitre son Parallèle des anciens et des modernes.

5. De ses ouvrages. Voyez dans une lettre de Boileau à Antoine Arnauld la liste piaisante des ouvrages de Perrault, Peau d'Ane mise en vers, l'Amour Godenot, Elégia à Iris, etc.

6. Ils sont suspects. Louange détournée et délicate à l'adresse de Racine et de Boileau.

7. Les estimer. Les juger, trouver bon ce qui est bon, et meilleur ce qui est meilleur. C'est le sens latin, æstimare.

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Il faut qu'un auteur reçoive avec une égale modestie' les éloges et la critique que l'on fait de ses ouvrages.

* Entre toutes les différentes expressions qui peuvent rendre une seule de nos pensées, il n'y en a qu'une qui soit la boune; on ne la rencontre pas toujours en parlant ou en écrivant : il est vrai néanmoins qu'elle existe, que tout ce qui ne l'est point2 est faible, et ne satisfait point un homme d'esprit qui veut se faire entendre.

Un bon auteur, et qui écrit avec soin, éprouve souvent que l'expression qu'il cherchait depuis longtemps sans la connaître, et qu'il a enfin trouvée, est celle qui était la plus simple, la plus naturelle, qui semblait devoir se présenter d'abord et sans efforts".

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Ceux qui écrivent par humeur sont sujets à retoucher à leurs ouvrages; comme elle n'est pas toujours fixe, et qu'elle varie en eux selon les occasions, ils se refroidissent bientôt pour les expressions et les termes qu'ils ont le plus aimés. [ant de noter. unv] * La même justesse d'esprit qui nous fait écrire de bonnes choses, nous fait appréhender qu'elles ne le soient pas assez pour mériter d'être lues.

Un esprit médiocre croit écrire divinement; un bon esprit croit écrire raisonnablement.

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* L'on m'a engagé, dit Ariste3, à lire mes ouvrages à Zoïle,
qitils l'ont saisi d'abord, et, avant qu'il ait eu le loisir
je l'aj
l'expert. I = Celtiques et autruins

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4. Modestie. » Calme, modération, sans s'irriter ni s'enorgueillir; en latin modestia. On voit que La Bruyère tient beaucoup à conserver aux mots le sens le plus rapproché de leur étymologie.

2. Tout ce qui ne l'est point. Tout ce qui n'est pas cette expression.

3. Sans efforts. Tout ce que dit La Bruyère de la justesse et de la vérité de l'expression est excellent. Il revient à plusieurs reprises sur ce sujet, et il en parle en maitre, d'après son expérience. Pascal, dans ses Réflexions sur l'art d'écrire, a surtout insisté sur la logique, et la suite des pensées; Fénelon sur la simplicité et la vérité de la passion; Buffon sur l'ordre et la noblesse Chacun d'eux nous a mis dans la confidence de sa pensée et de son travail. C'est à La Bruyère qu'il appartenait de l.. parler de l'élocution. Il n'est point de plus habile ouvrier de langage, et tous les me-ai rites divers de l'expression éclatent dans ses compositions si petites et si achevées.

4. Qu'elles ne le soient pas assez.» «Au demourant, rien ne me despite tant en la sottise, que de quoy elle se plaist plus que aulcune raison ne se peult raisonnable; fo ment plaire. C'est malheur que la prudence vous deffend de vous satisfaire et fier de l vous, et vous renvoye tousiours mal content et craintif, là où l'opiniastreté et la temerité remplissent leurs hostes d'ésiouissance et dasseurance. C'est aux plus malhabiles de regarder les aultres hommes par dessus lespaule, s'en retournants tousiours du combat pleins de gloire et d'alaigresse. MONTAIGNE, Essais, III, 8.

5. Dit Ariste. La forme narrative donne ici de la vivacité et de l'agrement a la pensée.

6. Saisi, Expression simple et énergique.

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de les trouver mauvais, il les a loués modestement en ma présence, et il ne les a pas loués depuis devant personne : je l'excuse, et je n'en demande pas davantage à un auteur, je le plains même c'avoir écouté de belles choses qu'il n'a point faites.

Ceux qui, par leur condition, se trouvent exempts de la jalousie d'auteur, ont ou des passions, ou des besoins qui les distraient et les rendent froids sur les conceptions d'autrui : personne presque, par la disposition de son esprit, de son cœur et de sa fortune, n'est en état de se livrer au plaisir que donne la perfection d'un ouvrage1.

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* Le plaisir de la critique nous ôte celui d'être vivement touché de très-belles choses.

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* Bien des gens vont jusques à sentir le mérite d'un manuscrit qu'on leur lit, qui 3 ne peuvent se déclarer en sa faveur, jusques à ce qu'ils aient vu le cours qu'il aura dans le monde par l'impression, ou quel sera son sort parmi les habiles: ils ne hasardent point leurs suffrages, et ils veulent être portés par la foule et entraînés par la multitude; ils disent alors qu'ils ont les premiers approuvé cet ouvrage, et que le public est de leur avis.

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Ces gens laissent échapper les plus belles occasions de nous convaincre qu'ils ont de la capacité et des lumières, qu'ils savent Juger, trouver bon ce qui est bon, et meilleur ce qui est meilleur. Un bel ouvrage tombe entre leurs mains, c'est un premier ouvrage, l'auteur ne s'est pas encore fait un grand nom, il n'a rien qui prévienne en sa faveur; il ne s'agit point de faire sa cour ou de flatter les grands en applaudissant à ses écrits: on ne vous

4. La perfection d'un ouvrage. Il semble que La Bruyère, qui a eu un si grand succès et de si violents ennemis, n'ait guère été plus satisfait de l'un que des autres. S'il fait des efforts pour prévenir la censure, ou tout au moins pour s'y résigner,, il a l'air de craindre tout autant l'approbation des ignorants et des indifferents, qui s'amusaient des allusions malignes de son livre et n'en sentaient pas le mérite. 2. Le plaisir de la critique. » Moquons-nous de cette chicane où ils veulent assuiettir le goût du public, et ne consultons dans une comédie que l'effet qu'elle fait sur nous. Laissons-nous aller de bonne foi aux choses qui nous prennent par les entrailles, et ne cherchions point de raisonnement pour nous empêcher d'avoir du plar-| SIT. MOLIERE, Critique de l'Ecole des femmes.

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3. Qui. La règle qui veut que le relatif soit immédiatement précédé de son antécédent, est très-souvent violée par nos meilleurs écrivains :

Un loup survient à jeun, qui cherchait aventure.

LA FONTAINE

4. Portés. Voyez la notice de Suard, en tête du volume.

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5. C'est un premier ouvrage. Ces petites phrases courtes et rapides sont ici du moilleur effet.

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demande pas, Zélotes', de vous récrier: « C'est un chef-d'œuvre de l'esprit l'humanité ne va pas plus loin: c'est jusqu'où la << parole humaine peut s'élever : on ne jugera à l'avenir du goût « de quelqu'un qu'à proportion qu'il en aura pour cette pièce, » phrases outrées, dégoûtantes, qui sentent la pension ou l'abbaye; nuisibles à cela même qui est louable et qu'on veut louer. Que ne disiez-vous seulement: Voilà un bon livre; vous le dites, il est vrai, avec toute la France, avec les étrangers comme avec vos compatriotes, quand il est imprimé par toute l'Europe, et qu'il est traduit en plusieurs langues; il n'est plus temps.

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* Quelques-uns de ceux qui ont lu un ouvrage en rapportent certains traits dont ils n'ont pas compris le sens, et qu'ils altèrent encore par tout ce qu'ils y mettent du leur; et ces traits ainsi corrompus et défigurés, qui ne sont autre chose que leurs propres pensées et leurs expressions, ils les exposent à la censure, sou

Zélotes. » L'apostrophe est vive, inattendue, et cependant naturelle.

4. 2. On ne jugera à l'avenir, etc. » Voyez comment madame de Sévigné parle de la représentation d'Esther. Elle n'était pas, comme on sait, grande admiratrice de Racine, qu'elle ne put jamais regarder autrement que comme un jeune homme d'esprit. Mais cette fois, le roi était là et lui a parlé: «Le maréchal de Bellefonds vint se mettre, par choix, à mon côté droit, et devant, c'étaient mesdames d'Auvergne, de Coislin, de Sully. Nous écoutames, le maréchal et moi, cette tragédie, avec une attention qui fut remarquée, et de certaines louanges sourdes et bien placées. Je ne puis vous dire l'excès de l'agrément de cette pièce : c'est une chose qui n'est pas aisée à représenter, et qui ne sera jamais imitée; c'est un rapport de la musique, des vers, des chants, des personnes, si parfait et si complet, qu'on n'y souhaite rien; les filles qui font des rois et des personnages sont faites exprès; on est attentif, et on n'a point d'autre peine que celle de voir finir une si aimable pièce. Toat y est simple, tout y est innocent, tout y est sublime et touchant; cette fidélité de l'histoire Sainte donne du respect; tous les chants convenables aux paroles, qui sont tirées des Psaumes ou de la Sagesse, et mises dans le sujet, sont d'une beauté qu'on ne soutient pas sans larmes: la mesure de l'approbation qu'on donne à cette pièce, c'est celle du goût et de l'attention. Lettres à madame de Grignan, 24 février. 1689.

3. a Qui sentent la pension.» Phrases qui semblent avoir pour but d'obtenir une pension, ou les revenus d'une abbaye. Expression énergique et originale,

4. A cela mème. » A ce livre mème. L'emploi de ces pronoms indéterminés étai; beaucoup plus fréquent dans la langue du XVIIe siècle que dans celle du nôtre. On s'en servait souvent là où nous mettons un substantif; ce qu'une judicieuse prévoyance n'a pu mettre dans l'esprit des hommes, une maîtresse plus impérieuse, l'expérience, les a forcés de le croire. » BOSSUET. Bien qu'elle ait de l'esprit, elle a suivi le mauvais exemple de celles qui, étant sur le retour de l'age, veulent remplacer de quelque chose ce qu'elles voient qu'elles perdent, et prétendent que les grimaces d'une pruderie scrupuleuse, leur tiendront lieu de jeunesse et de beauté. » MOLIÈRE. Ces tournures se rapprochent tout à fait du neutre latin.

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5. Plusieurs langues. Il est ici évidemment question du présent livre des Caractères. 6 • Du leur. Façon de parler plus souvent alors usitee qu'aujourd'hui :

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Si j'ajoute du mien à son invention

C'est pour peindre nos mœurs et non point par envie.

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LA FONTAINE.

7. His les exposent. Les critiques du temps reprochaient avec bien peu de raison

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