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craignait pas, chez les Scythes, de tuer les favorites des personnages puissants, afin d'honorer leurs funérailles. Ici, on aurait été plus loin encore, comme si les plaisirs de la vie devaient se continuer dans le tombeau.

On a trouvé aussi des exemples de ces drames terribles et sans témoin qu'amène la léthargie. Des corps contractés, des membres dans des attitudes forcées et convulsives annoncent un réveil plus cruel encore que la mort. Dans un tumulus, près de Kop-Takil, le malheureux qui retrouvait une seconde agonie avait même renversé une jolie amphore dont une anse était cassée, tandis que le couvercle avait roulé contre une des parois du tombeau. Le squelette avait au bras des bracelets en bronze.

Enfin, des catacombes existent sur le versant nord du mont Mithridate. Le long de la pente on remarque un soulèvement ondulé du terrain, qui correspond, sous le sol, à une couche pierreuse sous laquelle s'étend un lit considérable d'argile. Suivant MM. Kareischa et Beguitcheff, on aurait profité de cette arête naturelle pour creuser des catacombes. Sous la couche pierreuse, qui sert de plafond, on aurait préparé une succession de chambres sépulcrales, communiquant la plupart par des passages. Dans les parois, des niches sont creusées. Dans ces niches et le long des parois des chambres, on trouve des cercueils en bois; mais ils tombent en poussière au contact de l'air, aussitôt que la catacombe est ouverte. Divisées en un grand nombre de groupes, ces sépultures de famille forment une assez vaste nécropole, qui n'est pas sans ressemblance avec les catacombes de l'ancienne Syracuse.

Sur tout l'espace qui s'étend entre le mont Mithridate et le Mont d'Or existent des puits rectangulaires, remplis de terre, mais dont l'entrée est indiquée par la dépression du sol. En déblayant ces puits, on arrive, à peu de profondeur, à reconnaître une porte cintrée. La baie de cette porte se trouve ordinairement fermée par un mur de pierres sèches, que l'on enlevait jadis, chaque fois qu'on voulait introduire un nouveau mort dans la catacombe. Le mort introduit, on remettait les pierres, on comblait de nouveau le puits, ou bien, ce qui est plus vraisemblable, on préposait un gardien, payé en commun par les familles, à la garde de ces ouvertures. Mais, dans ces catacombes, qui n'ont pas été explorées d'une manière assez méthodique et assez sérieuse, on ne trouve que peu d'objets : des lacrymatoires en verre, de petits vases d'argile, des ornements en pâte coloriée, des boucles, des fibules, des bracelets en bronze, rarement en argent. En un mot, il semble que ce fussent les sépultures des familles pauvres. En outre il serait

important de bien constater à quelle époque appartiennent ces catacombes, qui ne remontent peut-être pas plus haut que le christianisme.

Ce rapide aperçu suffit pour reconnaître tout ce que la science doit aux habiles et patients explorateurs de la Crimée. S'ils sont récompensés de leurs fatigues par l'abondance et la richesse des objets qu'ils découvrent, ils n'en ont pas moins le mérite de nous transmettre les résultats exacts de leurs observations. Pour plusieurs civilisations qui n'ont pas eu d'historiens, l'archéologie seule peut reconstruire l'histoire, et les tombeaux lui révèlent, sous plus d'un aspect, les mœurs et les arts d'un peuple. On ne saurait donc apporter dans les recherches de ce genre un esprit de méthode trop rigoureux. Les rapports des explorateurs doivent avoir l'exactitude scrupuleuse d'un procès-verbal.

Avant d'étudier dans leur ensemble les œuvres d'art qui sont sorties de ces fouilles, il n'est pas inutile d'expliquer pourquoi l'or existe en telle quantité dans les tombeaux de la Crimée. L'or se trouve à l'état natif dans le sable des immenses plaines de la Sibérie; il suffit de laver ce sable pour en extraire l'or en pépites. Les anciens habitants ne pouvaient ignorer la richesse aurifère du sol de l'Oural et des pays situés vers l'Altaï. Si barbares qu'ils fussent, ils n'avaient pas besoin de savants procédés métallurgiques pour découvrir l'or et l'employer. Strabon dit, dans son XI' livre, que les Aorsi portaient de l'or dans leur parure, que les Massagètes avaient, dans les combats, des ceintures d'or, des bandeaux d'or autour de leur tête, des freins et des plastrons en or pour leurs chevaux. L'origine de la fable des Arimaspes et des griffons, gardiens des trésors, n'a été méconnue par personne; personne n'ignore non plus d'où Cyzique tirait l'or qu'elle monnayait en si grande quantité. Pour nous, ce n'est point la qualité précieuse de la matière qui nous touche, nous rechercherons plutôt quel est le caractère d'art des objets contenus dans les tombeaux, quel style ils accusent, à quelles civilisations ils se rapportent, ce qu'ils nous apprennent surtout de nouveau et d'intéressant sur l'histoire générale de BEULÉ.

l'art.

(La suite à un prochain cahier.)

NOUVELLES LITTÉRAIRES.

INSTITUT IMPÉRIAL DE FRANCE.

ACADÉMIE DES BEAUX-ARTS.

M. Abel de Pujol, membre de l'Académie des beaux-arts, est mort à Paris, le 28 septembre.

Cette Académie a tenu, le samedi 12 octobre, sa séance publique annuelle, sous la présidence de M. Reber.

Après l'exécution de fragments d'une symphonie de M. Bizet, grand prix de composition musicale de l'année 1857, M. Halévy, secrétaire perpétuel, a lu son rapport sur les travaux des pensionnaires de l'Académie impériale de France, à Rome.

Ce rapport a été suivi de la distribution des prix décernés par l'Académie.
Grand prix de peinture.

. Priam. »

Le sujet donné par l'Académie était : « La mort de

Le premier grand prix a été remporté par M. Lefèvre (Jules-Joseph), né à Tournan (Seine-et-Marne), le 14 mars 1834, élève de M. Léon Cogniet, membre de l'Institut.

Le premier second grand prix a été accordé à M. Leloir (Alexandre-Louis), né à Paris, le 14 mars 1843, élève de M. Leloir.

Le deuxième second grand prix a été accordé à M. Girard (Marie-François Firmin), né à Poncin (Ain), le 29 mai 1838, élève de M. Gleyre.

Une mention honorable a été accordée à M. Robert-Fleury (Tony), né à Paris, le 1 septembre 1837, élève de MM. Paul Delaroche et Léon Cogniet.

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Grands prix de scalpture. Le sujet donné par l'Académie était «Chryséis ren« due à son père. »

Le premier grand prix a été remporté par M. Sanson (Justin-Chysostome), né à Nemours (Seine-et-Marne), le 9 août 1833, élève de M. Jouffroy, membre de l'Institut, et de M. Lequien.

Le premier second grand prix a été remporté par M. Gauthier (Charles), né à Chauvirey-le-Châtel (Haute-Saône), le 7 décembre 1831, élève de M. Jouffroy.

Le deuxième second grand prix a été remporté par M. Barrias (Louis-Ernest), né à Paris, le 13 avril 1841, élève de M. Cavelier et de MM. Léon Cogniet et Jouf

froy.

Une mention honorable a été accordée à M. Deloye (Jean-Baptiste-Gustave), né à Sedan (Ardennes), le 30 avril 1838, élève de MM. Lemaire et Jouffroy.

Grands prix d'architecture.

Le sujet donné par l'Académie était : «Un établis

«sement de bains dans une ville d'eaux thermales. »

D

Le premier grand prix a été remporté par M. Moyaux (Constant), né à Anzin (Nord), le 15 juin 1835, élève de M. Le Bas, membre de l'Institut.

Le premier second grand prix a été remporté par M. Flon (Jules-Nicolas), né à Hainsviller (Oise), le 22 mai 1838, élève de M. Guénepin.

Le deuxième second grand prix a été remporté par M. Chabrol (François-Wilbrod), né à Paris, le 7 novembre 1835, élève de M. Le Bas, membre de l'Institut.

Grands prix de paysage historique. Le sujet donné

D

l'Académie était par

.. « La « marche de Silene. Le premier grand prix a été remporté par M. Girard (Paul-Albert), né à Paris, le 13 décembre 1839, élève de MM. Hippolyte Flandrin et Picot, membres de

l'Institut.

Le second grand prix a été remporté par M. Guillaumet (Gustave-Achille), né à Paris, le 26 mars 1840, élève de MM. Picot et Abel de Pujol, membres de l'Institut.

Une mention honorable a été accordée à M. Bonnefoy (Arthur-Henri), né à Boulogne (Pas-de-Calais), le 4 avril 1839, élève de M. Léon Cogniet. Grands prix de composition musicale.

Le sujet du concours était une cantate à trois personnages, intitulée « Atala; » les paroles sont de M. Victor Roussy.

Le premier grand prix a été remporté par M. Dubois (Clément-François-Théodore), né à Rosnay (Marne), le 24 août 1837, élève de M. Ambroise Thomas, membre de l'Institut, et de M. Bazin.

Le premier second grand prix a été remporté par M. Salomé (Théodore-César), né à Paris, le 20 janvier 1834, élève de MM. Ambroise Thomas et Bazin.

Le deuxième second grand prix a été remporté par M. Anthiome (Eugène-JeanBaptiste), né à Lorient (Morbihan), le 19 août 1836, élève de M. Carafa, membre de l'Institut, et de M. Elwart.

Une mention honorable a été accordée à M. Constantin (Titus-Charles), né à Marseille, le 7 janvier 1835, élève de M. Ambroise Thomas.

Prix fondé par madume veuve Leprince. Madame veuve Leprince a légué à l'Académie une rente annuelle, pour être distribuée, à titre de récompense, entre les concurrents qui ont remporté les grands prix de peinture, de sculpture, d'architecture et de gravure, de la manière suivante, savoir goo francs pour le peintre, 900 francs pour le sculpteur, 540 francs pour l'architecte, et 360 francs pour les graveurs en taille-douce et en médailles. L'Académie déclare que ces récompenses sont décernées cette année pour la peinture, à M. Lefèvre; pour la sculpture, à M. Sanson; pour l'architecture, à M. Moyaux.

Prix Achille Le Clère. Ce prix, de la valeur de 1,000 francs, fondé en faveur du jeune artiste, élève de l'École impériale et spéciale des beaux-arts de Paris, qui aura obtenu le second grand prix d'architecture, est décerné cette année à M. Flon.

Prix Deschaumes. M. Deschaumes a fondé un prix annuel de la valeur de

1,080 francs à décerner, au jugement de l'Académie des beaux-arts, à un jeune architecte.

L'Académie décerne ce prix à M. Fayot.

La fondation de M. Deschaumes a, en outre, permis à l'Académie d'ouvrir un concours annuel pour la scène lyrique à mettre en musique, et d'offrir une mé daille de 500 francs à l'auteur de la cantate préférée. Cette cantate, intitulée « Atala, est de M. Victor Roussy.

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Prix de Maillé-Latour-Landry. M. le comte de Maillé-Latour-Landry a légué à l'Académie française et à l'Académie des beaux-arts une somme de 30,000 francs, pour la fondation d'un prix à accorder, chaque année, au choix de chacune de ces deux Académies alternativement, à un jeune écrivain ou artiste, dont le talent, déjà remarquable, paraîtra mériter d'être encouragé à poursuivre sa carrière dans les lettres ou dans les beaux-arts. L'Académie a décerné le prix à M. Delaplanche, sculpteur.

Prix Lambert. Ce prix est destiné par le testateur, ancien compositeur et professeur de musique, à être décerné chaque année, par l'Académie française et par l'Académie des beaux-arts, à un homme de lettres et à un artiste, ou à la veuve d'un artiste honorable, comme marque publique d'estime. L'Académie partage ce prix, dans les conditions du testament, entre MM. Chartrousse, sculpteur, et Pollet, architecte.

Prix Trémont.-M. le baron de Trémont a légué à l'Académie des beaux-arts deux sommes annuelles de 1,100 francs, pour la fondation de deux prix d'encouragement, l'un destiné à un jeune peintre ou à un jeune sculpteur, l'autre à un jeune

musicien.

L'Académie décerne l'un de ces prix à M. Valette, sculpteur. Elle a partagé l'autre entre MM. Léonce Cohen et Elwart, compositeurs de musique.

Fondation Jarry. - L'Académie a décidé qu'elle rappellerait désormais dans sa séance publique annuelle la fondation établie, en 1841, par M. Jarry, architecte, en faveur du pensionnaire architecte qui, ayant terminé ses études à l'École de France à Rome, a rempli toutes les obligations imposées par le règlement.

Ce prix, de la valeur de 1,105 francs, a été attribué cette année, dans les conditions du testament, à M. Daumet, lauréat de 1855.

Prix Bordin.-L'Académie des beaux-arts propose chaque année, comme sujet de prix, conformément aux intentions du testateur, une question qui se rattache a l'étude ou à l'histoire de l'art. Elle avait proposé, pour sujet du prix à décerner cette année, le sujet suivant : « Histoire de la musique en France depuis le xiv siècle, «jusqu'à la fin du XVIII. Diviser ce travail en trois études : «Travaux des théori«ciens; musique d'Église; la chanson, le drame lyrique, la symphonie. »

α

L'Académie, n'ayant reçu pour ce concours que des ouvrages déjà publiés, qui ne remplissaient pas les conditions du programme, remet ce sujet au concours pour 1863.

Elle a décidé que, cette année, la fondation Bordin serait partagée en cinq médailles de 600 francs chacune, décernées, ex æquo, à autant d'ouvrages publiés récemment, ou en cours de publication, qui intéressent les beaux-arts et que des mérites différents ont signalés à l'attention du public.

Les ouvrages auxquels l'Académie décerne ce témoignage d'estime sont : Le Traité d'Architecture, de M. Reynaud, professeur à l'École polytechnique; le Dictionnaire raisonné de l'Architecture française du x1′ au XIV' siècle, de M. Viollet-Leduc; la Stalistique monumentale de Paris, par M. Albert Lenoir; l'Histoire des Peintres de toutes

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