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esprit net et ferme, maître de lui-même et sachant parfaitement ce qu'il voulait. Il y avait auprès de Marie de Médicis un abbé florentin, nommé Ruccellai, abbé mondain et intrigant, flatteur et présomptueux, ne se piquant pas des mœurs de son état, qui était ou faisait l'amoureux de la reine1; et il est certain qu'il avait été pour elle un chevalier dévoué et hardi: c'est lui qui avait osé porter successivement au duc de Bouillon et au duc d'Épernon des lettres de l'ancienne régente, et qui avait conçu et conduit toute cette affaire de l'évasion de Blois, si mal terminée. Il se croyait des droits à la première place: il les réclama, mais elle était prise. L'abbé en eut tant de dépit, qu'il quitta Angers et vint à Paris offrir ses services à Luynes, qui s'empressa de les accepter. Richelieu devint successivement surintendant de la maison de la reine, chancelier, chef de son conseil. Si Luynes faisait une garde sévère autour du cœur de Louis XIII, l'évêque de Luçon ne souffrit aussi, auprès de Marie de Médicis, aucune influence rivale de la sienne. Il ne laissa pénétrer dans son intérieur que des personnes dont il était bien sûr : le laborieux et soumis Bouthillier, depuis surintendant des finances, alors secrétaire de la reine, les deux Marillac, Louis et Michel 2, l'un militaire, l'autre magistrat, qui servaient alors la même cause que Richelieu, et que plus tard il éleva aux plus grandes charges de l'État, jusqu'à ce qu'ils lui fissent ombrage et qu'il envoyât le garde des sceaux mourir en exil à Châteaudun, et fit couper le cou au maréchal; le père Joseph, François Leclerc, marquis du Tremblay, qui, après avoir brillamment servi, s'était fait capucin sous ce nom depuis si célèbre, esprit aussi délié que résolu, capable des plus petites comme des plus grandes choses 3; le père

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Bentivoglio, dépêche du 16 juin 1619: Nei maneggi della regina madre «Ruccellai ha gran parte, e si stima che egli habbia il più intimo della confidenza di lei, sebbene le cose più gravi pare che passino per le mani del vescovo di «Lusson, frà il quale e Ruccellai s'intende che passi gelosia grande... Si parla < publicamente ch' egli sia o faccia l'innamorato della regina, sebbene si può cre«dere l'uno e l'altro della sua vanità.» 2 Michel de Marillac est l'auteur de la Relation exacte de tout ce qui s'est passé à la mort du maréchal d'Ancre, qui parut d'abord dans l'Histoire des plus illustres favoris, de du Puy, et qui a passé dans toutes les collections de mémoires. 3 Le père Joseph débutait alors dans la carrière des affaires, et s'employa fort à perdre Ruccellai pour servir Richelieu, dont il était déjà le plus intime confident. Bentivoglio le nomme fréquemment dans toutes ces intrigues. Dépêche du 6 mai: «Il remedio (contre l'influence de Ruc« cellai) che abbiamo ora è di far prevalere presso la regina madre il vescovo « di Lusson, il quale anche egli ha la sua parte di caldo interesse, sebben ha mille volte più sostanza di Ruccellai; e per esser Francese finalmente ed avere un gran genio sopra lo spirito della regina, credo che ogni di più prevalerà e che sbatterà al fine Ruccellai. Con Lusson io ho buoni mezzi, e particolarmente

de Bérulle, le fondateur et le premier supérieur de l'Oratoire, homme sans intrigue, qui possédait et meitait la confiance des deux partis, et ne travaillait qu'au rapprochement de la mère et du fils, à la paix royaume et à la gloire de la religion 1. Richelieu avait fait donner le commandement du château fort d'Angers à son frère aîné, le marquis de Richelieu, déjà maréchal de camp, et qui, s'il n'eût pas péri si vite

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«quelli di Berul, che ora tratta con la regina, e il padre Giuseppe cappucino, il qual padre è confidentissimo di Lusson. Di Ruccellai ha il padre Giuseppe il medesimo senso che habbiamo tutti noi altri. Camminerò dunque innanzi per queste vie a procurare d'andarlo sbattendo, mà il peggio è che tutte le donne sono donne e le regine qualche volte più donne delle donne. » Le même, dépêche du 2 juillet 1619 Fra Giuseppe cappucino è gran confidente di Lusson e ha particolar accesso presso la regina..... Non ha mancato il detto padre di fare quanto ha potuto affinche Ruccellai riceve degli incontri, ed ha trovata facile a disposizione in Lusson per suo proprio interesse, e di già si va scoprendo chiaramente che Lusson prevale appresso la regina e che Ruccellai resta indietro..... «M'ha detto confidentemente il padre Giuseppe che Ruccellai, vedendosi mancare il « favore e la confidenza, aveva cominciato a far delle doglianze colla regina e quasi a domandar la licenza, mà che la regina gli aveva date buone parole e l'andava trattenendo in questa maniera. La verità è che Lusson ha il negozio in mano... «e che Ruccellai stà sulle vanità e sugli amori, laddove la regina finalmente ha « bisogno di uomini di sostanza... Qui dunque si tiene per certo che la regina sia «per mettersi del tutto in mano di Lusson e che le cose di Ruccellai ben presto abbiano a cadere per terra. Dépêche suivante: «Ruccellai è poi caduto a terra prima dell' aspettatione commune. Egli in somma, avendo veduto che la regina « metteva tutti li affari e la confidenza in mano di Lusson, si risolse licenziarsi dal suo servitio... Egli se ne venne poi subito alla corte, dove è stato assai ben rice«vuto, etc. Ambassadeur vénitien, dépêche du 16 juillet 1619: «L'abbate Ruc« cellai, quello che nelli passati accidenti della regina madre è stato sempre assiduo e fedelissimo servo di lei, havendo ben spesso azzardato in gravissimi pericoli • la vita sua, s'è anche egli partito mal contento, vedendosi avanzato dal vescovo di «Lusson ed esser defraudato di carichi e di favori, e questo abbate venuto qui in a corte tratta con Louines famigliarmente.»-1Il est fort question de Bérulle dans les dépêches du nonce apostolique. On y voit que Bérulle est le personnage ecclésiastique que le nonce désigne à Luynes pour qu'il le consulte et l'emploie dans toutes les choses de la religion, et c'est au nom de la religion qu'il fut si souvent envoyé à Blois et à Angers. En servant le roi, il servait aussi sa mère, et s'entendait avec elle. Bentivoglio, dépêche du 24 mai 1619: Sempre si è presupposto che le "cose trattate dal padre Berul fossero trattate con partecipazione e consenso della regina, e di ciò non si può dubitare. » Dans ces diverses négociations, Bérulle se lia avec l'évêque de Luçon, qui, dès lors prétendant au chapeau de cardinal, faisait sa cour à Rome et au nonce, et se parait de l'amitié et des vertus du saint homme. Plus tard, il le fit cardinal en 1627, et Bérulle mourut fort à propos en 1629, car il aurait bien pu partager la disgrâce de son ami Michel de Marillac, si, comme lui, il était resté trop attaché à la reine mère, lorsque Richelieu se brouilla avec elle et la traita plus mal que jamais ne l'avait fait Luynes.

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dans un duel avec le marquis de Thémines, fils du maréchal, aurait été, de l'avis de juges compétents, un des appuis les plus utiles de la grandeur de son frère. Celui-ci le remplaça dans le commandement d'Angers par son oncle, le commandant de la Porte. Il mit aussi, à la tête des gardes de la reine, son beau-frère, le marquis de Brézé, personnage fort médiocre, qui n'en devint pas moins duc et pair et maréchal de France. Ainsi tout était dans la main de Richelieu, et, sur la fin de l'année 1619, il avait entièrement succédé à Concini auprès de Marie de Médicis. Comment donc se fait-il que, sous une telle influence, qui, ce semble, était toute-puissante et qui devait être conciliatrice, les fêtes et les réjouissances qui avaient tant célébré le traité d'Angoulême aient abouti, en moins d'une année, à une rupture nouvelle, beaucoup plus grave que la première? Il ne se passait pas une semaine sans que Louis XIII et Luynes n'écrivissent à la reine pour la supplier de venir à Paris, comme elle l'avait promis, et de consolider la paix du royaume par l'union visible à tous les yeux de la maison royale. Les témoignages les moins suspects ne permettent aucun doute sur la sincérité de Luynes; mais celle de Richelieu est-elle aussi certaine, et, quoi qu'il dise dans ses Mémoires, n'est-ce pas lui, comme l'en ont accusé dans le temps Luynes et bien d'autres, qui s'est appliqué à nourrir les ombrages et les soupçons de la reine mère, afin de la tenir éloignée de la cour, de la gouverner plus absolument, et, avec ce gage précieux entre les mains, de se rendre important auprès du roi 2?

Voy. les Mémoires de Fontenay-Mareuil, collect. Petitot, t. LVI, p. 447. Fontenay n'avait pas à se louer de Luynes, et il est grand partisan de Richelieu, auquel il doit sa fortune et son ambassade de Rome; mais, sur les faits, il est exact et véridique.

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Bentivoglio, dépêche du 2 juillet 1619: «Quanto al total accomodamento se ne spera sempre meglio, ed ultimamente il cardinale di Retz ed il padre Arnoldo mi dissero che Luines era di già venuto intieramente in questa risoluzione che il rè vedesse la madre e che vivessero insieme, e feci anch' io tre dì sono un buon « officio col medesimo Luynes sopra l'istessa materia che fù molto ben ricevuto da « łui. ....... . . It rè manda ora il duca di Monbasone a trovar la regina alla quale scrive « una lettera affettuosissima di sua mano invitandola di nuovo e pregandola a venir in corte affinchè ambidue possano vivere insieme. Credesi che Pernon (Épernon) « fomenti per suo interesse i sospetti della regina, e qualcuno dubita parimente che « Lusson per fini di ambizione desideri più tosto di vederla star separata per poter più assolutamente maneggiare appresso di lei e per rendersi a questo modo anche più necessario appresso del rè.» Dépêche du 30 juillet: La regina persiste in non venir ora alla corte fermandosi su certe difficoltà di poca sostanza e poco riguardevoli. Questa differenza della regina pare sopra modo strana, e più strano ancora quel che dice qualche altro de' suoi ch' ella non vuol venir ad essere menata in trionfo a Parigi, videndosi chiaramente che Dio ha mosso il cuore del ■ figliuolo e dei favoriti... Non sappiamo qui dunque ormai quel che dire di quei

En nous renfermant dans les faits avérés, nous voyons qu'à toutes les instances de Louis XIII et de Luynes Marie de Médicis opposa de bonne heure des atermoiements évidemment calculés, tantôt sur un prétexte et tantôt sur un autre, élevant sans cesse des difficultés et aussi des prétentions nouvelles. La résolution de ne pas venir à Paris devint manifeste, et cette résolution annonçait des desseins bien différents des promesses qu'elle avait tant prodiguées sur les bords de la Loire. Luynes apprit, à n'en pouvoir douter, que le prince de Piémont, possédé du démon héréditaire de sa famille, et qui, en épousant la sœur du roi, s'était imaginé qu'il allait, avec son frère, le prince Thomas, aussi faux, aussi brave, aussi ambitieux que lui, prendre une grande autorité en France, entrer dans le gouvernement et commander les armées, irrité d'avoir vu bien vite s'évanouir toutes ses espérances, s'était brusquement tourné vers la reine mère et travaillait avec elle à former un parti puissant composé des plus grands seigneurs du royaume 1. Il ap

sensi così strani della regina, e io per me ne resto maravigliato, e tanto più quanto presi occasione ieri di trattare a lungo di queste materie con Luines medesimo, il quale veramente mi aperse il cuore e mi fece restar pienamente persuaso che dalla parte del rè e sua non si può far davvantaggio, e mi disse che si io non volevo « credere a lui, credessi almeno al padre Arnoldo suo confessore, al quale dava licenza di dirmi quel che li aveva detto nell' atto medesimo di confessione, e mi participo insieme la lettera da lui scritta alla regina per Monbasone suo socero ed un' altra a Lusson. Nel ragionamento egli mostrò che il male venisse da Lusson, il quale per possedere la regina non la vede venir voluntieri in corte. Con gran confidenza in somma tratto meco Luines, come hanno fatto ancora nell' istessa maniera il cardinale di Retz ed il patre Arnoldo, i quali stimano anche essi che tutto il male venga, da «Lusson..... Bentivoglio parle encore des sincères intentions de Luynes et des efforts contraires de Richelieu dans sa dépêche du 24 août 1619 et dans plusieurs autres. Mais le témoignage le plus décisif contre Richelieu est celui de FontenayMareuil. (Mém. de Fontenay-Mareuil, coll. Petitot, t. LVI, p. 449.) Fontenay nous apprend que, dans l'été de 1619, le grand écuyer Bellegarde, ami commun de Richelieu et de Luynes, s'entremit inutilement pour les raccommoder, et pour faire comprendre à l'évêque qu'il était de son intérêt de ne pas tant tenir la reine éloignée, et que l'amener à Paris était un meilleur chemin pour tout ce qu'il pourroit prétendre: car déjà on soupçonnoit qu'il vouloit gouverner, et qu'on n'auroit point de repos que cela ne fût. Mais, soit qu'il connût l'aversion de la reine encore trop grande pour lui en faire la proposition, ou plutôt qu'aveuglé de son bonheur, et pensant avoir reconnu le faible de M. de Luynes, il voulût le pousser jusqu'au bout, "croyant que contre un ennemi tel que celui-là rien ne lui serait impossible.....' Bentivoglio, dépêche du 24 avril 1619: 11 prencipe si era dato speranza d'intromettersi nell' accomodamento di questi disgusti con la regina madre... e si tien per certo che egli avesse preso anche speranza di commandare all' armi del «re. Dépêche du 24 août 1619, Bentivoglio suppute ce que coûtait déjà le séjour à Paris des trois princes de Savoie: le prince héréditaire, le cardinal et le prince

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prit même que, comme pour justifier les craintes et les prophéties de Du Vair, le prince et la reine cherchaient à s'entendre avec les Espa

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Thomas. « Fra tanto la spesa di allogiare questi prencipi è veramente eccessiva, per« che fa un anno ormai che venne il cardinale, e si fà conto che d' allora in qua coi "quatrocento mila scudi della dote la spesa arrivi ad ottocento mila scudi, oltre ad ottanta mila scudi di pensione pagata ed assignata al cardinale ed al prencipe Tom<< maso, in modo che la spesa del alloggio che resta e coi presenti che si faranno al prencipe di Piemonte, al fratello ed alla sposa, monterà la somma a più di nuovecento mila scudi, che farà più d'un millione di scudi d'Italia. Il prencipe di Pie« monte non ha mostrato d'inclinare a pigliar pensione per se, ma ben avrebbe avuto « caro che si desse il compimento sino a cento mila scudi alla moglie, cioè trenta « mila per ciascuno ai fratelli e quatro a lei. Ma qui non v'inclinano, per la consequenza dell' altra sorella, e quanto a quei cinquanto mila scudi di beni ecclesias«tici il cardinale, non se n'è qui fatto altro. Le cardinal de Savoie eut beaucoup de biens ecclésiastiques en France et le titre lucratif de protecteur de France à Rome, Cela ne l'empêcha, ni lui, ni son frère Thomas, de se donner plus tard à l'Espagne et de tirer l'épée contre la France et la veuve de leur frère. Mais les dépêches vénitiennes sont encore bien plus instructives que celles du nonce, l'ambassadeur de la République étant fort lié avec le Piémont, et racontant à sa cour ses propres conversations avec Victor-Amédée, où se montrent les mécontentements du Savoyard, ses prétentions, et peu à peu ses desseins contre Luynes. La dépêche du 30 avril 1619 le fait voir ayant déjà oublié qu'il doit son mariage à Luynes, et se plaignant de lui parce qu'il voit qu'il n'en peut espérer rien d'extraordinaire. Puis, ayant été fort caressé par la reine mère, il entre dans ses intérêts. Dépêche du 1 juillet : « Ritornato il prencipe di Piemonte da Angouleme, io il viddi... e poi mi honoro l'Altezza Sua col communicarmi i favori, li honori, li amorevolissimi « accoglimenti havuti dalla regina madre, che nel ingresso gli fece fare un nobilis« simo incontro, lo fece spesare lautissimamente, mescolando intermedii di caccie, di « musiche, di festini, in compagnia delle più belle dame che habbia la Francia; «onde tutti i gentiluomini del prencipe sono restati in maniera consolati, che parangonando il ricevimento che hanno havuto dalla regina al trattamento havuto dal « rè dicono che quella sia stata la stanza della cortesia, questa del dispetto, quella il « paradiso, questa l'inferno... Dimostrationi tutte della regina fatte con artificio e « con dissegno, poiche con le carezze ha dissimulato il disgusto che ha havuto del <«< matrimonio; con li honori e regali ha voluto dimonstrare la grandezza sua e far « apparere tanto più la bassezza con che sono trattati qui dal rè e da Louines, et «in fine con doni, con presenti si è voluto captivar l'animo del prencipe suo ge«nero e guadagnarlo per i suoi fini e per i suoi interessi, come certo a mi pare gli « sia riuscito, perche il prencipe dipinse la regina prudentissima, saviissima, e con«clude che le ragioni di lei sono validissime e la causa sua justissima..... Da « tutti i particolari che questo prencipe intorno a cio mi ha detto, osservo un affetto « straordinario, una credenza indicibile ch' egli porta alla regina. Che un poco »d'apparenza d'honori, di doni, di cortesi parole in un tempo così breve habbia «fatto nascere in un subito queste passioni e tali passioni nel petto del principe, «non me lo posso ben persuadere; sarei pero necessitato di credere che il tentare di far venir in corte la regina madre fosse un concerto fatto fra la regina mede« sima ed il prencipe per abbatter Louines, e che il prencipe voglia, col obbligarsi

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