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JEAN DE LA FONTAINE.

FILS de Jean de La Fontaine, maître des eaux et forêts, et de Françoise Pidoux, son épouse, il naquit à ChâteauThierry le 8 juillet 1621. On croit qu'il fit ses premières études à Reims : on sait qu'elles furent loin d'être brillantes : à dix-neuf ans, il entra à l'Oratoire, en sortit peu après, et arriva à sa vingt-deuxième année, sans que rien fît pressentir ses glorieuses destinées. Ce fut à cet âge, et par conséquent en 1643, qu'une ode de Malherbe déclamée devant lui, éveilla son génie. Il fit des vers, et de mauvais vers : un parent, M. Pintrel, lui conseilla de se procurer avant tout une instruction solide, par la lecture souvent renouvelée des classiques grecs et latins. Un ami, M. de Maucroix, appuya les conseils du parent, et La Fontaine s'empressa de remplir les lacunes de sa première éducation par de nouvelles études et par des lectures répétées d'Horace, de Virgile, de Térence et de Quintilien. Il passa ensuite aux auteurs français, et fit ses délices de Rabelais, de Marot et de d'Urfé. Bocace et l'Arioste ne lui furent pas moins familiers; mais ce qui contrariera un peu les idées reçues, je ne sais pourquoi, assez généralement aujourd'hui, Platon et Plutarque ne formoient pas le moindre ornement de sa bibliothèque : on reconnoît presqu'à chaque instant dans ses ouvrages les beaux préceptes qu'il puisoit dans ces sources fécondes.

1654,

Ce fut à trente-trois ans seulement, c'est-à-dire vers 10 qu'il publia son premier ouvrage : cette traduction, ou plutôt cette imitation en vers de l'Eunuque de Térence, eut peu de succès. Cependant cette espèce d'échec ne le découragea pas.

La duchesse de Bouillon, exilée à Château-Thierry, voulut le connoître, et elle l'engagea à composer des pièces dans le genre qui la flattoit le plus on prétend que telle fut l'origine des Contes. Rappelée à Paris, elle y conduisit La Fontaine : un parent de sa femme, nommé Jannart, substitut et favori de M. Foucquet, le présenta au surintendant, qui lui fit une pension, et, à chaque quartier, le poëte donnoit pour reçu

Facsimile de l'Ecriture de La fontaine, avant l'année sbby

Tome 1 Page XLII.

Epigramme.
A Montignew be her intendant qui ne l'estoit
pal contententé de trois madrigaur & la derniere It
Jean,
Trois madrigaus ce n'est pad voltre conte,
It cift le mion, que fort de vour flater!
Bix fois leiour du Parnask ie monte,
Pt n'en Scaurrit plus de trois ma piulter?
Bien vous diray qu'au nombre Parrettor
N'eft put le mieux, Seigneur, et voicy comme:

quand ill Sout boud, ca ce cal tout proudhomme
prend au poids au lieu de les conter,

Sont ils meschaul tant moindre en eft la somme, merchant'tant

Ettant plustest on Pen doit contenter.

une pièce de vers on a conservé ces quittances poétiques. Personne n'ignore le courage avec lequel La Fontaine prouva sa reconnoissance pour le malheureux ministre après sa disgrâce: son dévouement dura toute sa vie. M. Jannart fut exilé à Limoges, et La Fontaine l'y suivit. De retour à Paris, il entra en qualité de gentilhomme chez Henriette d'Angleterre, première femme du frère unique de Louis XIV. Après sa mort, il trouva de généreux protecteurs dans les princes de la maison de Condé. Il étoit et resta toujours lié de la plus tendre amitié avec Racine, qui étoit son parent et presque son compatriote. Boileau, Molière, Chapelle, de Maucroix, etc., furent ses amis, et, jusqu'à sa mort, il conserva l'attachement qu'il avoit pour eux. Il ne se brouilla qu'avec Furetière, et l'on sait de quel côté fut le tort de la rupture.

Il éprouva donc bien vivement ce sentiment délicieux de l'amitié qu'il a chantée avec tant de charmes et de vérité. Les dames lui donnèrent avec cette délicatesse qui n'appartient qu'à leur sexe, les soins affectueux que la simplicité de ses mœurs lui rendoit si nécessaires.

La Fontaine mourut à Paris, en 1695, dans la soixante et quatorzième année de sa vie.

:

On trouvera à la fin de cet ouvrage une Notice bibliographique sur les Fables, et nous devons en témoigner toute notre reconnoissance à M. Barbier, à la bienveillance duquel nous la devons je crois devoir en extraire ici ce qui me paroît nécessaire pour faire connoître l'ordre dans lequel les fables de La Fontaine furent publiées sous les yeux de l'auteur. Fables choisies, mises en vers par M. de La Fontaine. Paris, 1668; in-4°.

Ce sont les fables des six premiers livres.

Fables nouvelles et autres poésies de M. de La Fontaine. Paris, 1671; in-12.

Ce recueil contient huit fables qui ont été depuis replacées dans les livres suivants. Les voici, avec l'indication de la place qu'clles occupent dans notre édition : Le Lion, le Loup et le Renard (145); le Coche et la Mouche (133); le Trésor et les deux Hommes (185) ; le Rat et l'Huître (151); le Singe et le Chat (186); le Gland et la Citrouille (173); le Milan et le Rossignol (187); l'Huître et les Plaideurs (178).

Fables choisies, mises en vers par M. de La Fontaine. Paris, 1678 et 1679; 2 vol. in-4°.

Cette édition offre la réimpression des six premiers livres et la publication des cinq livres suivants. La seconde partie est dédiée à madame de Montespan. La dernière fable du livre 111, ou 1x aujourd'hui, est celle que l'on place maintenant à la tête du 1er livre. Fables choisies, mises en vers par M. de La Fontaine ; cinquième partie, dédiée à Mgr le duc de Bourgogne. Paris, 1693; in-4°.

Cette dernière partie contient les vingt-trois premières fahles du livre XII de notre édition, puis les quatre contes: Philémon et Baucis, les Filles de Minée, la Matrone d'Ephèse et Belphegor. On trouve ensuite la fable du Juge arbitre, de l'Hospitalier et du Solitaire.

Dans les notices sur les auteurs Grecs, Latins, Français, etc., je me promets de suivre l'ordre chronologique ; je m'en écarterai pourtant quelquefois, lorsque des rapports nombreux et intimes me sembleront demander la réunion d'ouvrages dépendant, pour ainsi dire, les uns des autres; c'est ainsi que je réunirai Babrias et Gabrias, et que je placerai, immédiatement après Phèdre, l'examen des nouvelles fables publiées d'après le manuscrit de N. Perotto. De même, après avoir parlé du Roman du Renard, je m'occuperai immédiatement de plusieurs poëmes postérieurs qui, sous des noms à peu près semblables, peuvent être regardés comme des imitations ou des parodies de ce premier monument de notre ancienne poésie.

Les apologues que nous lisons dans les livres saints prouvent que ce genre de littérature étoit cultivé en Asie, avant d'être connu des Occidentaux; je devrois donc parler d'abord des fabulistes de l'Orient; mais, quoique réellement plus anciens, ils sont pourtant beaucoup plus nouveaux pour nous, et c'est ce qui me détermine à rejeter leur histoire à la suite de celle des mythologues européens.

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