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pas encore Marguerite-Marie-Marthe ?

Ces noms rappellent tout ce que la naissance a de plus illustre, le souvenir de plus cher, et la religion de plus sacré. J'y trouve le nom de la Vierge très sainte, traditionnel comme la foi dans la famille des MacMahon. J'y reconnais le souvenir de l'infortunée reine d'Ecosse, toujours si cher aux descendants de ceux qui se firent gloire d'être de la Brigade irlandaise (2). J'aime aussi à y voir la messagère de la dévotion au Sacré-Cœur, auquel le nom du Maréchal reste historiquement attaché, puisque c'est lui qui a signé le décret d'érection de la Basilique du Vou national (3).

Tout cela d'ailleurs se résumant dans une jeune princesse, dont les qualités surpassent encore la naissance, et dans un vaillant officier, qui, continuant les traditions paternelles, naguère encore soutenait

(1) M. Louis Richard, maire de Montcresson, dont le grand-père maternel, aux plus mauvais jours de la Terreur, a sauvé de la mort M. André Claudels, curé de Cortrat, mort depuis curé de Mont

cresson.

(2). Quand Jacques II, trahi, se réfugia en France, Louis XIV accueillit généreusement ce prince fugitif ainsi que ses fidèles partisans. De tous ces proscrits le grand roi fit la fameuse Brigade irlandaise, qui depuis lors fut associée à toutes nos luttes sur tous les champs de bataille. Les Mac-Mahon y avaient bon rang. Par son origine, la famille du Maréchal appartenait à l'Irlande, où ses ancêtres étaient toparques, c'est-à-dire rois locaux (Voir Mac-Mahon, par A. Deslauriers, p. 8, 9 et 10).

(3) Votée le 25 juillet 1873, la loi consacrant l'érection de l'église du Voeu national, reçut la signature du maréchal de Mac-Mahon, Président de la République française, à la date du 26 juillet 1873.

Puis enfin c'est la douce enfant, dont la grâce et l'innocence ont charmé sur son lit d'agonie les derniers jours de l'illustre Maréchal (2).

En vain je cherche airain qui puisse avoir de meilleures sonorités et des souvenirs plus expressifs, et je ne trouve pas.

Tout à l'heure, cloches que je viens de nommer, l'Eglise va vous bénir, et vous allez parler. Puis, volant à votre demeure aérienne, vous irez rejoindre votre vieille sœur Martine (3), pour redire tour à tour avec elle tout ce que le ciel et la terre auront à vous faire traduire de leurs joies et de leurs deuils.

Vous venez à la vie au moment où la France chré

(1) M. Patrice de Mac-Mahon, duc de Magenta, aujourd'hui commandant d'infanterie, a fait partie de l'expédition de Madagascar, à son début, et, par conséquent, a pris part à la conquête de la grande île.

(2) Dans les derniers jours du Maréchal, alors que la faiblesse de la mort l'envahissait de plus en plus, quelque chose avait le don d'amener un bon sourire sur ses lèvres, c'était la vue de sa petite-fille, Marthe de Mac-Mahon, fille de M. le comte et de Mme la comtesse Emmanuel de Mac-Mahon, blonde et charmante enfant de sept mois, qu'on lui présentait chaque jour; l'œil du mourant s'illuminait, et sa main, déjà tremblante, esquissait de vagues caresses. C'est en mémoire de ce souvenir touchant que le nom de Marthe a été ajouté aux noms de Marguerite-Marie que porte la cloche nommée par M. le Duc et Mme la Duchesse de Magenta.

(3) Martine est l'ancienne cloche de la vieille église de Cortrat, paroisse aujourd'hui réunie à Montcresson; cette cloche compte deux cents ans d'existence. Elle a été apportée à Montcresson en 1862, alors que la toiture de l'église de Cortrat menaçait ruine. Martine doit être la troisième cloche de la nouvelle sonnerie, et par sa sonorité argentine elle s'harmonisera bien avec ses deux nouvelles sœurs.

baptême de la France, car c'est évoquer ses plus nobles souvenirs et faire vibrer ses meilleures espérances.

Le 8 mai 1429, elles sonnaient à toutes volées les cloches d'Orléans, la ville fidèle; elles sonnaient le triomphe de Dieu et la délivrance de la France. Jeanne, la bonne Lorraine, était entrée dans la ville délivrée.

Vous l'avez redit, Monseigneur, avec des accents qui ont fait tressaillir tous les cœurs français (1). Puisse cet airain, qui, avec de si grands noms, gardera votre souvenir, cet airain qui traditionnellement ici depuis deux cents ans porte les deux noms si chers à la piété de l'héroïque Pucelle, Jesus Maria (2)! puisse cet airain sonner bientôt l'entrée de Jeanne la vénérable aux sacrés dyptiques de la Sainteté ! Des premiers, Monseigneur, vous serez à l'honneur, et tous nous serons à la joie. Cloches de Montcresson, vous sonnerez alors un nouveau triomphe de la France chrétienne.

Sonnez donc tout ce que vous dira le ciel de nous annoncer; sonnez tout ce que la terre vous demandera de nous redire. Chantez, priez, gémissez, selon

(1) La mission de la vénérable Jeanne d'Arc; panégyrique prononcé dans la Cathédrale d'Orléans le vendredi 8 mai 1896, par Sa Grandeur Monseigneur Touchet, évêque d'Orléans.

(2) Les nouvelles cloches, comme les deux anciennes qu'elles remplacent, portent cette inscirption qui est celle que Jeanne d'Arc avait fait inscrire sur sa bannière : † IHS MARIA.

les souffles qui vous inspireront. Chantez surtout, chantez les louanges de Dieu, chantez les triomphes de l'Eglise et de la patrie, chantez les douces et saintes joies des âmes. Ainsi vous nous serez un écho des harmonies éternelles, et l'annonce de la part que nous y devons prendre un jour.

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PRONONCÉ PAR M. L'ABBÉ L.-V.

DUMAINE,

CHANOINE-ARCHIPRÊTRE DE LA CATHÉDRALE

DE SÉES,

DANS

L'ÉGLISE DE LA LANDE PATRY,

LE DIMANCHE II OCTOBRE 1896,

A LA MÉMOIRE DE QUINZE CONFESSEURS DE LA FOI,

NATIFS DE CE LIEU,

A L'OCCASION DU CENTENAIRE DE DEUX D'ENTRE EUX.

SÉES

TYPOGRAPHIE VEUVE LEGUERNEY-MONTAUZÉ.

1896

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