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l'œuvre de Boieldieu et passer en revue les pièces dont les originaux sont aujourd'hui conservés dans notre collection municipale. Cette étude était accompagnée d'une audition musicale qui a clôturé la séance.

Au programme, figuraient des fragments de Ma Tante Aurore, des Choeurs d'Athalie, de Jean de Paris, du Petit Chaperon rouge, et de la Dame blanche.

Soli et choeurs furent interprétés à merveille par la Gamme et la Maîtrise Saint-Evode, sous l'habile direction de M. J. Haelling.

Si l'indisposition de l'une des dames chanteuses priva l'auditoire du plaisir d'entendre les fragments de Ma Tante Aurore et de Jean de Paris, il convient de mentionner le légitime succès que remportèrent comme solistes MMmes Robert et Turpin.

La séance s'est terminée à onze heures et demie au milieu d'unanimes applaudissements.

DISCOURS

PRONONCÉ A L'ACADÉMIE DES SCIENCES BELLES-LETTRES ET ARTS DE ROUEN

Le 12 décembre 1907.

Par M. LECAPLAIN, Président.

MESSIEURS,

A une époque d'évolution où la femme demande à se faire au soleil une plus large place, où bon nombre ne craignent pas de manier le scalpel, d'endosser la toge, de discourir dans les Universités, de réclamer même le droit de siéger dans les assemblées délibérantes, il m'a paru intéressant de rechercher avec impartialité dans quelle mesure la femme a participé au grand mouvement scientifique qui a jeté sur les deux derniers siècles un si éblouissant éclat.

Celle qui a la grâce et la beauté en partage est-elle inférieure, égale ou supérieure, à celui dont elle partage la destinée?

Les qualités du cœur et la délicatesse des sentiments la placent au premier rang. Qui oserait le nier! Que de larmes elle a essuyées! Que de vives douleurs elle a calmées avec ce tact et cette douceur dont son com

pagnon de route ne connaît pas le secret! S'agit-il de secourir ou de sauver ceux qui lui sont chers, aucun danger ne l'effraie, aucun obstacle ne l'arrête, son courage va jusqu'à l'héroïsme. Combien, pendant la Terreur, n'ont dû leur salut qu'à son sublime dévoûment! Quels nobles exemples donnés au monde l'année néfaste où un ennemi implacable envahissait notre territoire! A elle la palme de la charité!

En tout temps, que le ciel soit sombre ou serein, elle répand autour d'elle la joie et le bonheur, et, toujours prête à se sacrifier pour les siens, elle demeure, jusqu'à son dernier jour, l'ange tutélaire du foyer. A elle la palme des plus pures jouissances. A ceux qui voudraient amoindrir ses mérites et ternir l'éclat de l'auréole dont sa tête est couronnée, rappelons ces beaux vers de Legouvė:

Reviens de ton erreur, toi qui veux les flétrir,

Sache les respecter autant que les chérir,

Et, si la voix du sang n'est pas une chimère,

Tombe aux pieds de ce sexe, auquel tu dois ta mère.

Si au point de vue des qualités du cœur semble régner une touchante unanimité, il n'en est pas de même, il faut bien l'avouer, de celles de l'esprit et de la vigueur de l'intelligence. Sur cette grave question, on a beaucoup raisonné, et peut-être a-t-on déraisonné plus encore.

Que d'auteurs éminents n'ont pas craint d'affirmer que la femme n'est pas susceptible de la haute culture scientifique. Ainsi pensaient, pour ne citer que quel

ques noms Molière, Boileau, Joseph de Maistre, Proudhon.

Un philosophe indien disait, dans son style imagė, que la femme a les cheveux longs et les idées courtes.

Pour Alphonse de Candole, l'esprit féminin est primesautier; il se plaît aux idées qu'on saisit vite par une sorte d'intuition. Les méthodes lentes d'observation ou de calcul par lesquelles on arrive sûrement à des vérités ne peuvent leur plaire; les vérités ellesmêmes, abstraction faite de leur nature et de leurs conséquences possibles, sont peu de chose pour la plupart d'entre elles.

Isidore Bourdon prétend qu'elles sentent trop vivement pour beaucoup raisonner et longtemps réfléchir. L'étude des causes et des abstractions les déconcerte et les ennuie.

Elles n'ont rien inventé, s'écrie Proudhon, pas même leur quenouille. Singulière exagération! Il oublie, pour n'en donner qu'un exemple, qu'à elles sont dus les arts de filer et de tisser. Ne serait-ce pas assez de dire que leur esprit est peut-être moins inventif.

Les femmes ne méditent guère, écrit la comtesse d'Agout, oubliant qu'elle-même a beaucoup médité. Elles se contentent d'entrevoir des idées sous la forme la plus flottante et la plus indécise; rien ne s'accuse, rien ne se fixe dans les brumes dorées de leurs fantaisies. Ce ne sont qu'apparitions rapides, vagues figures, contours aussitôt effacés. On dirait qu'elles n'ont nul souci de la vérité des choses.

Toutes les fois qu'il faut agir avec la divinisation et

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