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Charles Perrault était le premier commis du ministre Colbert, pour les bâtiments du roi.

C'est à cette époque que l'on dessina les plus beaux jardins publics de Paris. On refaisait celui des Tuileries, près du Louvre, et Colbert décida qu'il serait fermé au public, que seuls le roi et sa cour auraient le droit de s'y promener.

Perrault combattit ce projet de toutes ses forces et il dit à Colbert: 'Je suis persuadé que les jardins des rois ne sont si grands et si spacieux, qu'afin que tous les enfants puissent s'y promener.' Le ministre se rendit à cet avis et aujourd'hui encore, les Tuileries sont dans toutes les saisons le jardin le plus fréquenté de Paris. Les enfants y vont en foule et y jouent à toutes sortes de jeux.

Les enfants qui jouent aux Tuileries ne savent pas cela. Mais ce qu'ils savent bien, c'est que c'est Charles Perrault qui a écrit les Contes de Fées.

Les contes eux-mêmes datent des temps les plus reculés, et nous viennent d'Asie. On les racontait de génération en génération dans tous les pays et dans toutes les familles. En France, on les appelait les Contes de ma Mère l'Oye.'

Devenu vieux, après tous ses travaux sérieux, Perrault ne s'occupa que des petits enfants; il écrivit pour eux l'ouvrage connu en France sous le titre de Contes de Perrault.

Le conte de la 'Belle au Bois dormant,' cette princesse imprudente qui ne sait pas qu'une mauvaise fée a prononcé une sentence contre elle. Elle veut filer, saisit un fuseau et se perce la main.

Elle dort pendant cent ans, ainsi que tous les habitants du château de son père, jusqu'à ce qu'un beau prince vienne la réveiller.

Le Petit Chaperon rouge' que nous connaissons si bien, avec sa galette et son pot de beurre. Une autre imprudente qui s'arrête en route pour parler au loup et se fait dévorer.

Le terrible Barbe Bleue,' assassin de toutes ses femmes, jusqu'à ce que l'une d'elles ait la curiosité de pénétrer dans la chambre secrète. Elle en est quitte pour une très grande peur, car ses frères arrivent à temps pour la délivrer en tuant son féroce mari.

Le malin 'Chat botté' qui fait la fortune de son maître,

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pas toujours par les moyens les plus honnêtes, mais on ne

peut pas demander à un chat d'avoir la conscience d'un homme.

'Les Fées,' conte moins connu mais non moins joli. Une vilaine veuve avait deux filles; l'aînée lui ressemblait, aussi l'aimait elle beaucoup; la seconde, douce et jolie, était haïe de sa mère et de sa sœur et devait faire tous les gros ouvrages de la maison.

Un jour qu'elle était à la fontaine, où elle devait aller deux fois par jour chercher de l'eau, elle vit venir une bonne vieille qui lui demanda à boire. Aussitôt elle rinça sa cruche, la remplit et la tint pour que la vieille pût boire à son aise.

La vieille, qui était fée, la remercia et lui promit qu'à chaque parole qu'elle disait, il lui sortirait de la bouche une fleur ou une pierre précieuse.

La jeune fille arriva en retard à la maison; sa mère la gronda bien fort, et comme elle ouvrait la bouche pour s'excuser, il en sortit deux diamants, deux roses, et deux perles.

En rentrant, elle dut raconter son histoire tout en semant des bijoux et des fleurs.

Il va sans dire que ce fut la fille aînée qui fut envoyée à la fontaine le lendemain. Comme elle prenait de l'eau, elle vit venir une belle dame qui lui demanda à boire.

'Suis-je ici, répondit-elle, pour vous donner à boire ?

Vous n'êtes guère honnête, répondit doucement la fée; à chaque parole que vous direz, il vous sortira de la bouche un crapaud ou un serpent.'

Au premier mot qu'elle dit en rentrant à la maison deux vipères et deux crapauds sortirent de sa bouche. La mère, furieuse, dit que c'était la faute de la cadette et la chassa de la maison. Comme la jeune fille pleurait, assise au bord de la route, un beau prince passa et lui demanda ce qu'elle avait.

Elle le lui raconta en versant une pluie de perles et de fleurs. Le prince émerveillé l'emmena chez lui et l'épousa. Quant à l'aînée, elle devint si mauvaise que sa mère la chassa; personne ne voulut la recevoir et elle alla mourir au coin d'un bois.

'Cendrillon,' ou la petite pantoufle de verre.

Le pauvre

petit souffre-douleur de ses orgueilleuses sœurs, qui, grâce à sa marraine, la bonne fée, devient une belle princesse.

Riquet à la Houppe le 'vilain petit marmot qui avait tant d'esprit et qui vint au monde avec une petite houppe de cheveux sur le devant de la tête. Tout le monde le fuyait, tant il était laid. Une fée avait promis à sa mère qu'il pourrait donner de l'esprit à celle qui voudrait bien l'épouser.

Il vit un jour le portrait d'une princesse belle comme le jour, et se mit en route avec sa suite pour la trouver. Il la vit enfin un jour assise au pied d'un arbre, plus belle que son portrait, mais si sotte qu'elle ne pouvait pas dire deux mots, ce dont elle était elle-même très affligée.

'Si vous consentez à m'épouser, belle princesse, lui dit Riquet à la Houppe, j'ai le pouvoir de vous donner de l'esprit.'

Comme elle hésitait cependant, le prince voulut bien attendre un an, à condition qu'elle donnât tout de suite sa parole; elle le fit, croyant dans sa bêtise que l'année ne finirait jamais.

Aussitôt après, tout ce qu'elle disait était la sagesse même; son père lui demandait conseil et toute la cour l'admirait. Au bout d'un an, Riquet à la Houppe revint, et, il faut le dire à sa honte, la princesse avait oublié sa promesse. Mais comme Riquet à la Houppe lui apprit que la fée avait promis de le rendre beau le jour de son mariage, elle consentit enfin à l'épouser. Tous deux devinrent beaux autant que spirituels et les noces furent célébrées avec la plus grande pompe.

Le Petit Poucet' qui sauva ses frères de la faim et de l'ogre, grâce à son sang-froid et à sa prévoyance. Grâce à une ruse, il avait si bien fait que l'ogre avait égorgé ses sept filles, croyant tuer le Petit Poucet et ses frères.

Aussitôt que le Petit Poucet entendit ronfler l'ogre, il réveilla ses frères, et leur dit de s'habiller promptement et de le suivre. Ils descendirent doucement dans le jardin et sautèrent par-dessus les murailles. Ils coururent presque toute la nuit, toujours en tremblant et sans savoir où ils allaient.

L'ogre s'étant éveillé dit à sa femme:

'Va-t'en là-haut habiller ces petits drôles d'hier au soir.'

'L'ogresse fut fort étonnée de la bonté de son mari, ne doutant point de la manière qu'il entendait qu'elle les habillât. et croyant qu'il lui ordonnait de les aller vêtir; elle monta en haut, où elle fut bien surprise lorsqu'elle aperçut ses sept filles égorgées et nageant dans leur sang. Elle commença par s'évanouir; car c'est le premier expédient que trouvent presque toutes les femmes en pareille rencontre.'

Logre, craignant que sa femme ne fût trop longtemps à faire la besogne dont il l'avait chargée, monta en haut pour lui aider; il ne fut pas moins étonné que sa femme lorsqu'il vit cet affreux spectacle.

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'Ah! qu'ai-je fait là?' s'écria-t-il. Ils me le payeront, les malheureux, et tout à l'heure!'

Il jeta aussitôt une potée d'eau dans le nez de sa femme, et l'ayant fait revenir: 'Donne-moi vite mes bottes de sept lieues, lui dit-il, afin que j'aille les attraper.'

Il se mit en campagne, et, après avoir couru de tous côtés, il entra enfin dans le chemin où marchaient ces pauvres enfants, qui n'étaient plus qu'à cent pas du logis de leur père.

Ils virent l'ogre qui allait de montagne en montagne, et qui traversait des rivières aussi aisément qu'il aurait fait du moindre ruisseau.

Le Petit Poucet, qui vit un rocher creux proche le lieu où ils étaient, y fit cacher ses six frères, et s'y fourra aussi, regardant toujours ce que l'ogre deviendrait.

L'ogre, qui se trouvait fort las du long chemin qu'il avait fait inutilement (car les bottes de sept lieues fatiguent fort leur homme), voulut se reposer, et, par hasard, il alla s'asseoir sur la roche où les petits garçons s'étaient cachés.

Comme il n'en pouvait plus de fatigue, il s'endormit après s'être reposé quelque temps, et vint à ronfler si effroyablement que les pauvres enfants n'en eurent pas moins de peur que quand il tenait son grand couteau pour leur couper la gorge.

Le Petit Poucet en eut moins peur, et dit à ses frères de s'enfuir promptement à la maison pendant que l'ogre dormait bien fort, et qu'ils ne se missent point en peine de lui. Ils crurent son conseil et gagnèrent vite la maison.

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