Page images
PDF
EPUB

Mais devant moi ton cœur est à peine agité !
Quoi donc pas un soupir! pas même une prière !
Tout ton néant te parle, et n'est point écouté !

Tu passes

en effet, qu'importe cette pierre ? Que peut cacher la tombe à ton œil attristé? Quelques os desséchés, un reste de poussière, Rien peut-être, et l'éternité !

Victor Hugo.

CHANT DU MATIN.

Le soleil luit, et la nature
Resplendit d'un éclat soudain ;
Brillants rayons, clarté si pure!
O douce fraîcheur du matin !

Tout se réveille et tout s'anime
Dans les hameaux, dans les cités;
L'astre poursuit son cours sublime,
Inondant les airs de clartés.

Les monts, les bois et les rivages
Entonnent des hymnes divers,
A tant de sublimes hommages
Mêlons la voix de nos concerts !

E. Naville.

LA VIOLETTE.

Humble fleur qui nais si pure
Aux premiers jours de l'été.
Tu te plais sous la verdure:
Garde ton humilité.

Si l'éclat du jour t'alarme,
Belle en ta simplicité

Tu reçois un nouveau charme

De ta douce humilité.

Par les coups de la tempête

Le lis à terre jeté

De ta paisible retraite
Regrette l'humilité.

Que jamais je ne souhaite
Éclat, grandeur, ni beauté!
Je veux, simple violette,
Me parer d'humilité.

O mon Dieu ! que mon enfance

S'écoule en sécurité

Dans les bras de l'innocence,
Gardé par l'humilité.

E. P.

LES ADIEUX À LA SUISSE

Tout m'a séduit dans la belle Helvétie :
J'aimais ses monts, ses coteaux, ses vergers,
De ses torrents la sauvage harmonie ;
Je m'unissais aux chants de ses bergers.

C'est dans ces lieux qu'au sein de l'abondance
Habite encor la douce égalité ;

Là chaque jour doublait mon existence :
J'y respirais l'air de la liberté.

Reçois mes vœux, ô terre fortunée
Où si longtemps j'ai trouvé le bonheur !
Loin de tes bords, suivant ma destinée,
Ton souvenir viendra charmer mon cœur.

LA PATRIE ABSENTE.

Séjour riant, calme et champêtre,
Ton image me poursuit ;

Aux montagnes qui m'ont vu naître
La mémoire me conduit.

Auprès de toi tout me ramène ;
O bonheur ! je vais te revoir:
C'est vers toi, mon riant domaine,
Que se tourne mon espoir.

Après un long pélérinage,

Je reviendrai dans mon hameau,

Pour trouver, sous le même ombrage, Et ma tombe et mon berceau.

S.

PLAINTE DU CHRÉTIEN.

Mon Dieu, quelle guerre cruelle !
Je trouve deux hommes en moi :
L'un veut que, plein d'amour pour toi,
Mon cœur te soit toujours fidèle ;
L'autre, à tes volontés rebelle,
Me révolte contre ta loi.

L'un, tout esprit et tout céleste,
Veut qu'au ciel sans cesse attaché,
Et des biens éternels touché,
Je compte pour rien tout le reste ;
Et l'autre, par son poids funeste,
Me tient vers la terre penché.

Hélas! en guerre avec moi-même,
Où pourrai-je trouver la paix ?
Je veux, et n'accomplis jamais :
Je veux; mais, ô misère extrême !
Je ne fais pas le bien que j'aime,
Et je fais le mal que je hais.

O grâce! ô rayon salutaire !
Viens me mettre avec moi d'accord;
Et, domptant par un doux effort
Cet homme qui t'est si contraire,
Fais ton esclave volontaire

De cet esclave de la mort.

J. Racine.

À LA DOULEUR.

Pas un amour en moi qui n'ait été frappé !
Un espoir, un désir, qui n'ait péri trompé !
Pour moi, je ne sais pas à quoi tu me prépares,
Mais tes mains de leçons ne me sont point avares ;
Tu me traites, sans doute, en favori des cieux,
Car tu n'épargnes pas les larmes à mes yeux!
Eh bien! je les reçois comme tu les envoies,
Tes maux seront mes biens, et tes soupirs mes joies !
Je sens qu'il est en toi, sans avoir combattu,
Une vertu divine au lieu de ma vertu,

Que tu n'es pas la mort de l'âme, mais sa vie,
Que ton bras, en frappant, guérit et vivifie!
Toi donc, que ma souffrance a souvent accusé,

Toi, devant qui ce cœur s'est tant de fois brisé,
Reçois, Dieu trois fois saint, cet encens dont tout fume!
Oui, c'est le seul bûcher que la terre t'allume,
C'est le charbon divin dont tu brûles nos sens!
Quand l'autel est souillé, la douleur est l'encens !

A. De Lamartine.

« PreviousContinue »