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fes, nous les regardons come nées

avec nous.

Ainfi il me paroît qu'après qu'on a aquis un grand nombre de conoiffances particulières dans quelque art ou dans quelque fcience que ce foit, on ne fauroit rien faire de plus utile pour foi-même, que de fe former des principes d'après ces conoiffances particulières, & de mettre par cette voie, de la nèteté, de l'ordre, & de l'arangement dans fes pensées.

Mais quand il s'agit d'inftruire les autres, il faut imiter la Nature; elle ne comence point par les principes & par les idées abftraites: ce feroit comencer par l'inconu; elle ne nous done point l'idée d'animal avant que de nous montrer des oiseaux, des chiens, des chevaux, &c. Il faut des principes qui fans doute; mais il en faut en tems & lieu. Si par principes vous entendez des règles, des maxides notions générales, des idées abftraites qui renferment des conoiffances particulières, alors je dis qu'il ne faut point comencer par de tels principes.

mes,

Que fi par principes vous entendez des notions comunes, des pratiques faciles, des opérations aifées qui ne fupofent dans votre élève d'autre pouvoir ni d'autres conoiffances que celles que vous favez bien qu'il a déjà; alors je conviens qu'il faut des principes, & ces principes ne font autre chofe que les idées particulières qu'il faut leur doner, avant que de paffer aux règles & aux idées abftraites.

Les règles n'aprènent qu'à ceux qui favent déjà, parce que les règles ne font que des obfervations fur l'ufage : ainfi comencez par faire lire les exemples des figures avant que d'en doner la définition.

Il n'y a rien de fi naturel que la Logique & les principes fur lefquels elle eft fondée; cependant les jeunes Logiciens fe trouvent come dans un monde nouveau dans les premiers. tems qu'ils étudient la Logique, lorfqu'ils ont des maîtres qui comencent par leur doner en abregé le plan général de toute la Philofophie; qui parlent de science, de perception, d'idée, de jugement, de fin, de caufe,

de catégorie, d'univerfaux, de degrés métaphyfiques, &c. come fi c'étoient là autant d'êtres réels, & non de pures abftractions de l'efprit. Je fuis perfuadé que c'eft fe conduire avec beaucoup plus de méthode, de comencer par mètre, pour ainfi dire, devant les yeux quelques-unes des penfées particulières, qui ont doné lieu de former chacune de ces idées abftraites.

J'espère traiter quelque jour cet article plus en détail, & faire voir que la méthode analytique eft la vraie méthode d'enseigner, & que celle qu'on apèle fynthétique ou de doctrine, qui comence par les principes, n'eft bone que pour mètre de l'ordre dans ce qu'on fait déjà, ou dans quelques autres ocafions qui ne font pas maintenant de mon fujet.

X I I.

DERNIERE OBSERVATION.

S'il y a des mots Synonymes. Nous avons vu qu'un même mot peut avoir par figure d'autres fignifications que celle qu'il a dans le fens propre & primitif: voiles peut fignifier vaiffeaux. Ne fuit-il pas de-là qu'il y a des mots fynonymes, & que voiles eft fynonyme à vaiffeaux ?

Monfieur l'Abbé Girard a déjà examiné cette question, dans le difcours préliminaire qu'il a mis à la tête de A Paris, fon Traité de la jufteffe de la langue chez d'Hou- françoife. Je ne ferai guère ici qu'un

ry, 1718.

extrait de fes raisons, & je prendrai même la liberté de me fervir fouvent de fes termes, me contentant de tirer mes exemples de la langue latine. Le Lecteur trouvera dans le livre de M. l'Abbé Girard de quoi fe fatisfaire pleinement fur ce qui regarde le fran

>> On entend comunément par Sy»nonymes les mots qui ne diférant » que par l'articulation de la voix » font femblables par l'idée qu'ils ex»priment. Mais y a-t-il de ces fortes » de mots ? Il faut diftinguer :

»nyme

& 27.

» Si vous prenez le terme de fyno- Id. p. 26 dans un fens étendu pour une fimple reffemblance de fignification, >> il y a des termes fynonymes, c'est» à-dire, qu'il y a des mots qui ex» priment une même idée principale: » ferre, bajuláre, portáre, tollere, fuftinére, gérere, geftare, feront en ce fens autant de fynonymes.

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Mais fi par fynonymes, vous en- p. 28. tendez des mots qui ont une ref» femblance de fignification fi entière » & fi parfaite, que le fens pris dans toute fa force & dans toutes fes » circonftances foit toujours & abso» lument le même, enforte qu'un des »fynonymes ne fignifie ni plus ni » moins que l'autre ; qu'on puiffe » les employer indiférament dans tou»tes les ocafions, & qu'il n'y ait » pas plus de choix à faire entre eux » pour la fignification & pour l'éner

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