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lien & les autres noment antono

mafe, » Il y a, dit M. Gibert, qua- Rhetor. p. »tre espèces de métaphores; la pre- 555. »mière emprunte le nom du genre » pour le doner à l'efpèce, come » quand on dit, l'Orateur pour Cicé »ron, ou le Philofophe pour Ariftote.» Ce font-là cependant les exemples ordinaires que les Rhéteurs donent de l'antonomafe: mais, après tout, le nom ne fait rien à la chofe; le principal eft de remarquer que l'ex

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» qu'il a mis fous le nom de métaphore les » deux premières qui ne font proprement que » des fynecdoques; mais Ariftote parle en général, & il écrivoit dans un tems où l'on » n'avoit pas encore rafiné fur les figures » pour les diftinguer, & pour leur doner à » chacune le nom qui en auroit mieux expliqué la nature. » Dacier, Poëtique d'Ariftote, page 345.

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* Αντονομασία, quæ aliquid pro nomine ponit, poétis frequentiffima... Oratóribus étiam fi rarus ejus rei, non nullus tamen ufus eft: nam ut Tydíden & Peliden non dixerint, ità dixérunt everfórem Carthaginis & Numántiæ pro Scipióne ; & románæ eloquéntiæ príncipem pro Ciceróne pofuiffe non dúbitant. Quintil. Inft. Orat. l. vIII. c. 6.

preffion eft figurée, & en quoi elle eft figurée.

XXIII.

Que l'ufage & l'abus des Tropes font de tous les tems & de toutes les langues.

UNE même caufe dans les mêmes circonftances produit des éfets femblables. Dans tous les tems & dans tous les lieux où il y a eu des homes, il y a eu de l'imagination, des paffions, des idées acceffoires par conféquent des tropes.

&

Il y a eu des tropes dans la langue des Chaldéens, dans celle des Egyptiens, dans celle des Grecs & dans celle des Latins on en fait ufage aujourd'hui parmi les peuples même les plus barbares, parce qu'en un mot ces peuples font des homes, ils ont de l'imagination & des idées acceffoires.

Il est vrai que telle expreffion figurée en particulier n'a pas été en

usage par-tout; mais par-tout il y a eu des expreffions figurées. Quoique la nature foit uniforme dans le fonds des choses, il y a une variété infinie dans l'exécution, dans l'aplication, dans les circonstances, dans les manières.

Ainfi nous nous fervons de tropes, non parce que les anciens s'en font fervis; mais parce. que nous fomes homes come eux.

Il est dificile en parlant & en écrivant, d'aporter toujours l'atention & le difcernement néceffaires pour rejeter les idées acceffoires qui ne conviènent point au fujet, aux circonftances, & aux idées principales que l'on met en œuvre : de-là il est arivé dans tous les tems, que les écri vains fe font quelquefois fervis d'expreffions figurées qui ne doivent pas être prifes pour modèles.

Les règles ne doivent point être faites fur l'ouvrage d'aucun particu lier, elles doivent être puifées dans le bon fens & dans la nature : & alors quiconque s'en éloigne ne doit point être imité en ce point. Si l'on veut

former le goût des jeunes gens, on doit leur faire remarquer les défauts, auffi bien que les beautés des auteurs qu'on leur fait lire. Il eft plus facile d'admirer, j'en conviens; mais une critique fage, éclairée, exemte de paffion & de fanatisme, est bien plus utile.

Ainfi l'on peut dire que chaque fiècle a pu avoir, fes critiques & fon Dictionaire Néologique. Si quelques perfones difent aujourd'hui avec raiDiction. fon ou fans fondement, qu'il règne Néologique dans le langage une afectation pué

Orat. 96. aliter. XXVII.

rile que le ftyle frivole & recherché paffe jufqu'aux tribunaux les plus graves; Cicéron a fait la même plainte de fon tems: Eft enim quoddam étiam insigne & florens oratiónis, pictum, & expolitum genus, in quo omnes verbórum, omnes fententiárum illigántur lepóres. Hoc totum è fophiftarum fóntibus defluxit in forum, &c.

» Au plus beau fiècle de Rome » c'eft-à-dire, au fiècle de Jules Cé far & d'Augufte, un auteur a dit d'Hor. T. II. » infantes ftátuas, pour dire des fta

Le P. Sana

don Роёг. •

P. 254.

»tues nouvèlement faites: un au

tre, que Jupiter crachoit la nège

>> fur les Alpes.

Júpiter hibérnas canâ nive cónfpuit Alpes, L. 2. Sat. 5.

v. 40.

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Horace fe moque de l'un & de l'autre de ces auteurs; mais il n'a pas été exemt lui-même des fautes qu'il a reprochées à fes contemporains. Il Le P. Sanane refte à la plupart des Comentateurs don, pref, p. d'autre liberté que pour louer, pour admirer , pour adorer; mais ceux qui font ufage de leurs lumières, & qui ne fe conduifent point par une pré- Id. page xx. vention aveugle, défaprouvent certains vers lyriques dont la cadence n'eft point affez châtiée. Ce font les termes du P. Sanadon, J'ai relevé en plufieurs endroits, pourfuit-il, des pensées, des fentimens, des tours & des expreffions, qui m'ont paru répréhenfibles.

Ibid,

Quintilien, après avoir repris dans Inft. Or. 1. les anciens quelques métaphores dé. VIII. c. 6. Comparatio. fectueufes, dit que ceux qui font inf truits du bon & du mauvais ufage des figures, ne trouveront que trop d'exemples à reprendre ; Quorum exémpla nimiùm frequénter reprehén, det, qui fciverit hac vitia effe.

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