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DE L'IMPRIMERIE DE J. GRATIOT.

DU CHRISTIANISME,

AU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE.

THEOLOGIE.

Lettre de Mélanchton, conservée dans les Archives du Consistoire de la Confession d'Augsbourg, à

Paris.

A L'ÉPOQUE de la troisième fête séculaire de la réformation en 1817, S. A. S. Madame la duchesse ́de Courlande, princesse distinguée par sa piété et par sa charité autant que par son rang, et attachée par une profonde conviction aux principes sacrés de la communion évangélique, fit don au Consistoire de l'Église chrétienne de la Confession d'Augsbourg à Paris, d'un portefeuille renfermant les portraits des principaux Réformateurs saxons et des Princes qui les protégèrent, d'après Luc Cranach, peintre contemporain, et de deux manuscrits précieux, dont l'un est un sermon, de la main de Luther, sur la question s'il est permis de chercher à éviter la mort, et l'autre un ancien manuscrit d'une lettre de Mélanchton.

Ces deux pièces, originairement déposées à Augsbourg, où elles étaient soigneusement conservées, furent offertes en 1805 par M. de Stetten, président du Magistrat de cette ville, à Mgr. le prince Talleyrand, des mams duquel madame la duchesse de Courlande les avait obtenus. Le consistoire ne pouvant qu'attacher le plus haut prix à la possession de ces deux manuscrits, a pris, en les déposant dans ses archives, toutes les mesures possibles pour les maintenir dans un parfait état de conservation, sans néanmoins priver du plaisir de les contempler, les fidèles qui désirent de les voir. Écrit, à ce qu'il paraît, avec beaucoup de rapidité, et rempli d'abréviations, le sermon de Luther est presque indéchiffrable. Il n'en est pas de même du manuscrit de la lettre de Mélanchton, qui fait le sujet de cet article: quelques traits seulement paraissent avoir été effacés par le temps; mais il a été facile de reconnaître le sens des termes où ces altérations se rencontrent, en collationnant le manuscrit avec la collection des lettres de Mélanchton, par Peucer, où celle-ci se trouve imprimée, liv. III, n° 188.

sous

Vitus Theodorus, à qui elle fut adressée, était l'un des Pasteurs de l'Eglise de Nuremberg. Il est désigné dans les lettres que lui écrivit Mélanchton, tantôt sous le nom de Theodorus, tantôt celui de Theodoricus. Son vrai nom était Dietrich, comme on le voit dans une pièce de vers qui précède le recueil que Saubert a fait, en 1640, de celles des lettres de Mélanchton à Vitus qui se trouvaient encore inédites à cette époque.

Ce recueil seul renferme cent cinquante et une lettres adressées à ce Pasteur, il en existe encore un assez grand nombre d'autres à la même adresse les recueils des lettres de Mélanchton, faits par Pezel et par Manlius; on en trouve particulièrement une digne de remarque, sous la date du 22 mars 1538,

dans un recueil des lettres de Mélanchton, fait à Leyde, en 1647, sans nom d'auteur. Cette lettre paraît avoir immédiatement précédé celle dont nous nous occupons ici, et jette un grand jour sur elle.

De cette multitude de lettres adressées à Vitus Dietrich, et du ton de cordialité qui y règne, il est naturel de conclure que Mélanchton regardait ce Pasteur comme l'un de ses plus intimes amis. On doit donc s'attendre à le voir lui exprimer sa pensée avec le plus entier abandon; et cette remarque est d'autant plus essentielle relativement à notre lettre, que Mélanchton y traite la question de la sainte Cène, sur laquelle les opinions de la plupart de ses collègues et la chaleur avec laquelle ils les soutenaient, l'obligeaient à garder d'ailleurs beaucoup de ménagemens.

Mélanchton montre en effet dans cette lettre combien les fâcheuses controverses élevées sur ce point de doctrine lui faisaient de peine. Il communique franchement ses opinions à son ami, qui s'occupait lui-même de ce dogme, et qu'il craignait de voir pousser trop loin ses recherches.

On voit briller sous le plus beau point de vue, dans chacune de ses expressions, sa prudence, sa modestie, son amour pour la paix, la simplicité de sa foi, et l'aversion qu'il avait conçue pour les arguties qui ne tendaient qu'à défigurer la religion, et à transformer en une science obscure, froide et purement scholastique, cette divine doctrine qui doit éclairer tous les esprits et toucher tous les coeurs. Il suffit d'y jeter un coup d'oeil pour se convaincre du peu de fondement de l'objection que font à la Reforme ces hommes qui croient avoir tout dit, lorsqu'ils ont dédaigneusement donné aux Réformateurs le nom de novateurs du 16e siècle.

On

y

veit, au contraire, combien Mélanchton redoutait les innovations, avec quel soin il engageait ses amis

à s'en garder, combien sur ce point ses intentions étaient d'accord avec celles de ses dignes collaborateurs, qui n'avaient été contraints de travailler à la réforme de l'Église, que pour en bannir les innovations qu'on y avait successivement introduites depuis le quatrième siècle, et pour ramener autant que possible la Religion chrétienne à ce qu'elle était au temps des Apôtres et des premiers Pères de l'Église.

Je ne puis mieux mettre le lecteur à portée d'en juger, qu'en lui présentant ici la lettre même de Melanchton, avec une traduction dans laquelle j'ai essayé de rendre sa pensée. Pour l'exprimer clairement, j'ai été obligé d'insérer plusieurs termes que Mélanchton sous-entend. Ils seront indiqués dans la traduction par des caractères italiques.

Lettre de Mélanchton.

Viro optimo D. Vito Theodoro, docenti Evangelium in Ecclesia Noribergensi, amico summo.

S. D. Extat libellus in quo autor respondet Carolo Magno Imp. Francico primo, quid sit de symbolo Cœnæ dominicæ sentiendum, ubi apparet iis temporibus etiam agitatam esse controversiam de præsentia. Autor fuit Augustini studiosus, ut fere illa ætas tota; quare in hac responsione propemodum sequitur Augustinum. Et de efficacia multa disserit, de præsentia magis significans quid velit, quam explicans. Sed si superiorum temporum testimonia colliguntur, quid dicant vides. Nam pleraque tenes, et habeo plura. Quæ si sequeremur, explicatae essent cæteræ quæstiones; αρχή γαρ ήμισυπάνος. Egoque quoque, ne longissime recederem a veteribus, posui in usu sacramentalem præsentiam, et dixi, datis his rebus, Christum vere adesse et efficacem esse. Id profecto satis est. Nec addidi inclusionem aut conjunctionem talem, qua affigeretur 7 7 7o own, aut

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