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ques et des conciles de son temps, dans la réconciliation
des ariens.

-

1481
V. Conduite des évêques de Macédoine et du Pape
Innocent er, à l'égard des clercs ordonnés par l'hérétique
Bonose et des évêques priscillianistes.

1485
VI. Conduite du Pape Miltiade et de l'Eglise d'Afri-
que, dans la réception des donatistes.
1488
VII. Conduite de l'Eglise dans la réconciliation des
messaliens, des nestoriens, des eutychiens et des péla-
giens.

-

1493

VIII. Conduite de l'Eglise dans la réception des évê-
ques et des prêtres ariens visigoths.
1495
IX. Conduite de l'Eglise dans la réception de ceux
qui avaient adhéré au schisme d'Acace et à celui des
trois chapitres.
1497
X. Conduite du second concile de Nicée dans la ré-
ception des iconoclastes.
1498
XI. Conduite de saint Pierre Damien à l'égard des
hérétiques simoniaques de Milan.
1500

XII. Conduite du Pape Grégoire VII, dans la récon-
ciliation de ceux qui avaient adhéré au schisme de l'anti-
pape Guibert.

1501
XIII. Conduite de l'Eglise dans la réunion des Grecs
schismatiques.
1502
XIV. Conduite dans la réunion de ceux qui avaient
adhéré à l'antipape Félix et du faux concile de Bâle.
1503
XV. Conduite du Pape Jules III dans la réconcilia-
tion de l'Eglise d'Angleterre avec l'Eglise romaine. 1504
XVI. Conduite des Papes des derniers siècles, et
particulièrement du Pape Benoit XIV, dans la réception
des hérétiques et schismatiques orientaux.

1509

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Imprimerie MIGNE, au Petit-Montrorge.

AVERTISSEMENT.

Notre volume contenant les OEuvres de M. Emery était imprimé et même déjà livré en partie au public, quand le R. P. Gaultier, de la congrégation des Saints Coeurs de Jésus et de Marie, nous a fait remarquer que ce que nous avons reproduit sous ce titre : Mémoire sur cette question: Quelle conduite peuvent et doivent tenir les personnes religieuses, lorsque, dans les circonstances présentes, elles sont à même de recueillir une succession, n'était que l'analyse sèche et décharnée du véritable Mémoire de M. Emery. Il a eu en même temps l'obligeance de nous procurer ce Mémoire. Ne pouvant plus le substituer à l'analyse publiée par nous, col. 1537 de ce volume, il ne nous reste d'autre moyen, pour que le lecteur n'en soit pas privé, que de le placer à la fin du même volume. La place insolite qu'il occupe sera une nouvelle preuve de notre zèle à recueillir tout ce qui est sorti de la plume des auteurs dont nous éditons les OEuvres.

MÉMOIRE SUR CETTE QUESTION:

Les religieuses peuvent-elles aujourd'hui, sans blesser leur conscience, recueillir des successions et disposer par testament? Leurs supérieurs peuvent-ils, doivent-ils même leur en accorder la permission?

Les religieuses ont été, dans les derniers temps, la gloire et la consolation de l'Eglise. Les nouveaux philosophes prétendaient depuis longtemps que les monastères de filles étaient de véritables prisons, et que, si on en ouvrait les portes, la plupart des religieuses en sortiraient avec le plus grand empressement.

L'événement a pleinement démenti leurs prétentions, et a fermé pour toujours la bouche aux détracteurs de la vie religieuse. On a ouvert, on a brisé même les portes des monastères; et les religieuses n'en sont sorties qu'en cédant à la violence. Leurs yeux sont encore aujourd'hui perpétuellement tournés vers ces saintes demeures et l'espoir d'y rentrer un jour, quelque éloigné qu'il soit, fait leur plus douce consolation. Elles observent, autant qu'il leur est possible, dans le monde, le même genre de vie qu'elles gardaient sous la loi de la clôture. Sur cent religieuses, à peine s'en est-il trouvé une ou deux qui aient été infidèles à leur vocation.

Dieu, dont la sagesse sait tirer le bien du mal, et qui fait servir à sa miséricorde les actes mêmes de sa justice, a permis qu'elles fussent dispersées dans le monde pour y répandre cette odeur de sainteté si salutaire, qui auparavant était concentrée dans les cloîtres, et pour donner aux libertins, ainsi qu'aux fidèles, les exemples les plus touchants de la piété, de la modestie, de l'humilité, de la patience, de la pénitence. Dépouillées de tout, ces saintes filles vivent du travail de leurs mains: et il faut que ce traOEUVRES COMPL. DE M. EMERY.

vail suffise, et à la subsistance de celles qui sont jeunes, et à la subsistance de celles à qui l'âge ou les infirmités ont rendu le travail impossible.

Il est vrai qu'en expulsant ces saintes filles de leurs maisons, et en s'emparant de tous leurs biens, on leur a assigné une modique pension; mais on sait que par l'événement cette pension a été réduite à rien; et encore, pour toucher cette pension, a-t-on exigé d'elles un serment qu'on ne pouvait proposer à des femmes sans absurdité.

Il est encore vrai qu'elles ont été déclarées capables de donations et de successions, ainsi que les autres citoyens; mais des directeurs, plus zélés que savants, out voulu les priver de cette ressource. Ils ont soutenu qu'elles ne pouvaient sans prévarication recueillir un héritage ou en disposer. Quelques-uns ont été jusqu'à prétendre qu'elles ne pouvaient y être autorisées par les supérieurs ecclésiastiques et par le Pape lui-même; que du moins elles ne pouvaient recueillir les successions qui leur arriveraient, que jusqu'à la concurrence de ce qui était nécessaire pour leur honnête subsistance.

C'est principalement pour éclairer ces directeurs, et empêcher qu'ils ne troublent mal à propos la conscience des religieuses, que nous donnons ce Mémoire. Nous avons puisé dans Suarès, le plus savant et le plus accrédité de tous les auteurs qui ont écrit sur les vœux de religion, quelques principes et quelques points de fait, dont on pourra voir les preuves et le développement dans

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le même auteur (t. III, De relig., lib. vIII), et qui suffiront pour remplir pleinement notre objet.

1° L'état religieux, dans certaines personnes, a subsisté autrefois, quant à la substance, avec une pauvreté qui n'excluait ni le domaine des choses temporelles, ni même leur usage indépendant et libre; mais qui en excluait seulement l'usage inutile ou superflu.

Cette proposition que Suarès avance comme probable, il l'appuie sur l'exemple de ces anciens religieux qui, menant une vie parfaitement solitaire et n'appartenant à aucune communauté, n'ont pas pu exercer la pauvreté d'une autre manière; et encore sur ce principe que la pauvreté par elle-même n'est pas nécessaire à la perfection, et qu'elle est seulement un moyen qui lève les obstacles à l'acquisition de la perfection, savoir la sollicitude et l'attache aux biens temporels. (P. 415.)

2° Il y a toujours eu dans l'Eglise des personnes religieuses, faisant profession d'une pauvreté qui, sans exclure absolument le domaine de toutes choses temporelles, n'en permettait cependant l'usage que dépendamment de la volonté de quelque supérieur. (P. 417, 418.)

Suares donne cette proposition comme plus vraisemblable.

3° Quoiqu'il y ait eu dès les premiers siècles de l'Eglise des personnes faisant profession d'une pauvreté qui excluait le domaine de toutes choses temporelles, cependant cette sorte de pauvreté n'a pas été observée dans tous les temps et dans tous les différents états de la vie religieuse. (P. 419.)

4° La pauvreté qui ne dépouille pas seulement dans le fait et actuellement un religieux de tout domaine et de toute propriété, mais qui le rend encore inhabile à en acquérir et en posséder aucune dans la suite, n'a point eu lieu dans les premiers siècles, et n'a été introduite que dans les temps postérieurs. Saint Basile donne manifestement à entendre, dans la neuvième de ses grandes Règles, qu'un religieux pouvait, de son temps, recueillir l'héritage de ses parents; qu'il était seulement obligé d'en disposer saintement comme d'une chose consacrée à Dieu. (P. 419 et 421.)

5° La solennité du vou de pauvreté, qui rend les religieux incapables de domaine, n'a été universellement en usage que depuis le règne de l'empereur Justinien et conséquemment aux lois de ce prince, qui statuent que par la seule profession religieuse tous les biens du profès, sans qu'il soit besoin d'une donation expresse, appartiennent au monastère, et qu'il n'en conservera aucune espèce de domaine.

Suares cite ces lois et remarque que, par le consentement exprès ou tacite donné à ces lois par les Papes, elles sont devenues lois ecclésiastiques.

D'où il suit que, lorsque les canonistes. soutiennent que le vœu de pauvreté, nécessaire pour la profession ou pour l'état reli

gieux, exclut non-seulement toute propriété actuelle, mais encore toute capacité de devenir propriétaire dans la suite, ils parlent suivant le droit commun actuel, et non suivant ce qui appartient à l'essence de l'état religieux. (P. 421.)

6° Le Pape peut, dans des cas extraordinaires et pour le plus grand bien de la religion ou de l'Eglise, rendre un religieux capable de domaine, en laissant subsister d'ailleurs toutes les obligations de son état et des autres vœux.

La raison en est que l'incapacité de posséder dans un religieux, n'est pas de droit naturel ou divin, mais seulement de droit humain et ecclésiastique or, de l'aveu de tout le monde, le Pape peut dispenser de tout ce qui est de droit ecclésiastique. (P. 480.)

7° Quoique d'après la loi de Justinien ou le droit civil, canonisé en ce point par le Pape saint Grégoire, pour parler le langage des canonistes, un religieux ne puisse ni licitement ni validement faire un testament, cependant la loi même qui l'en rend incapable, renferme déjà une exception en faveur d'un père qui aurait fait profession avant de partager son bien entre ses enfants la loi lui permet de le faire après sa profession, c'est-à-dire qu'elle lui permet de tester. (P. 464.)

8° Le Pape, pour de grandes causes, peut permettre à un religieux de tester.

Effectivement ce n'est ni le droit divin ni le droit naturel qui en rend le religieux incapable; c'est seulement le droit ecclésiastique, ainsi que nous l'avons vu: or, c'est un principe certain, comme nous l'avons observé encore, que le Pape peut dispenser dans tout ce qui n'est que de droit ecclésiastique. (P. 466.)

mais

Les Papes ont souvent accordé aux religieux des permissions dans ce genre. Fevret, dans son Traité de l'abus, suppose lui-même le fait comme constant; il soutient seulement qu'on n'aurait point égard à ces permissions dans notre jurisprudence ce qui tranche la question, c'est que saint Grégoire, le premier Pape qui paraisse avoir adopté la loi de Justinien et qui la faisait observer avec rigueur, permit, avec l'approbation de cinq évêques et du clergé de Rome qui était alors auprès de sa personne, à Probus, abbé de Saint-André, de disposer, par testament, de tous ses biens, de la même manière dont il l'aurait fait avant sa profession religieuse. Edixit Probo eamdem facultatem tribui quam habere poterat antequam monasterium introiret, nec monastica conversationi obsistere quo minus de universis rebus suis pro arbitrio statueret. (Annales Bened., t. 1, p. 267.)

Avant de tirer des principes ou des points fondamentaux que nous avons extraits littéralement de Suarès quelques conclusions, nous croyons devoir extraire encore du même auteur deux règles, l'une qui servira pour éclaircir les difficultés contre les dispenses qu'il assure pouvoir être accordées.

par le Pape; l'autre sera utile pour tranquilliser les religieuses qui ne sont pas toujours à portée de consulter leurs supérieurs ou supérieures.

9° L'état religieux est constitué par les trois vœux solennels de pauvreté, de chasteté et d'obéissance. Mais ces trois vœux n'ont point de connexion essentielle entre eux. En n'ob-ervant pas l'un, on peut encore parfaitement observer les autres. D'où il suit, que si l'on supprimait la solennité du vœu de pauvreté, on pourrait bien conclure que l'état religieux ne serait plus aussi complet et aussi parfait qu'auparavant: mais il ne faudrait pas conclure que cet état serait absolument détruit. Car l'état religieux n'est point indivisible, en sorte que, si on retranche une des parties qui le constituent aujourd'hui, il n'existe plus du tout. L'état religieux ne subsistait-il pas dans les cinq et six premiers siècles de l'Eglise? N'est-ce pas dans ces siècles qu'ont vécu les religieux les plus parfaits? et cependant il n'était pas encore établi que la pauvreté religieuse rendit inhabile à toute sorte de propriété. (P. 480 et 481.)

Il est vrai que le Pápe Innocent III a déclaré que le renoncement à toute propriété était tellement attaché à l'état religieux, que le Pape lui-même ne peut en dispenser. «Abdicatio proprietatis adeo est annexa regulæ monachali ut contra eam nec summus Pontifex possit licentiam indulgere;» mais ce grand Pontife a parlé dans le sens composé, c'està-dire, dans la supposition que l'état monastique subsiste dans son intégrité et avec toutes ses parties qui composent sa substance, suivant sa constitution particulière et actuelle. (P. 483.)

10° Pour que l'acceptation ou acquisition d'une chose temporelle ne fasse pas tomber dans le vice de propriété, contraire au vœu de pauvreté, il est de principe que la permission du supérieur est nécessaire et suffisante; et il est certain, 1 que, si l'on peut facilement recourir au supérieur et qu'on veuille procéder avec droiture et de la manière la plus parfaite, il est nécessaire que la permission du supérieur soit expresse; 2° si on ne peut pas facilement recourir à lui, s'il est absent ou occupé, et qu'il y ait cependant, pour recevoir ce qui est présenté, une nécessité pressante ou une commodité morale, si de plus le religieux croit avec fondement que le supérieur aurait accordé la permission si on avait pu lui parJer, il peut recevoir et agir sans tomber dans le péché de propriété; la permission interprétative, ou présumée du supérieur est alors suffisante, en observant cependant que le religieux doit être dans la disposition de prévenir le supérieur aussitôt qu'il en aura la facilité, et de se conformer, pour retenir

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ou pour rendre le tout, à ce qu'il jugera à propos de prescrire. (P. 436.)

Telle est la doctrine de Suarès littéralement traduite.

Nous allons confirmer par quelques observations les règles et les faits que nous a fournis ce savant théologien, et assurer de plus en plus les conclusions que nous en tirerons incessamment. Suarès a cité plusieurs exemples de religieuses dans les premiers siècles, qui conservaient le domaine de leurs biens temporeis, et en disposaient par testament. Mais à ces exemples, qui sont assez connus, nous pouvons en ajouter plusieurs, pris dans des siècles' plus voisins du nôtre, et qui seront plus concluants, parce qu'il est plus certain que les personnages dont on va parler étaient des religieux ou des religieuses dans toute la force du terme. On n'a qu'à consulter les Annales de l'ordre de Saint-Benoit, t. I; les Actes des saints du même ordre, t. II, et surtout le premier volume de la collection des Chartres, par MM. de Bréquigny et du Theil.

« Le IV concile d'Orléans, dans son onzième canon, décrète, » disent les auteurs de la collection, « que les abbés ne pourront, sous quelque prétexte que ce soit, aliéner les biens du monastère d'où il s'ensuivait que les abbés et les abbesses ne pouvaient faire de donation testamentaire. Cependant on trouve dans notre collection quantité de testaments et de legs faits par des abbés et des abbesses. On y peut voir le testament de sainte Fare, qui, en 632, léabbesse, et qui depuis porta son nom (Faregua au monastère d'Eboriac, dont elle était hérité de son père, postérieurement au moutier), quantité de biens dont elle avait temps où elle était devenue abbesse..... Mabillon dit que c'était l'usage, non-seulement en France, mais dans les autres Etats, et que plus saints personnages, surtout lorsqu'il cet usage n'était point condamné par les s'agissait de legs pieux. Mais on donnait aussi à des parents, comme on le voit par le testament de sainte Fare, où elle fait des legs à ses frères et à sa sœur.

«Le droit de faire des donations n'appartenait pas seulement aux abbés et aux abbesses; il appartenait aussi aux moines et aux religieuses, comme le prouvent plus sieurs exemples qu'on trouvera dans ce voJume.

« C'était l'usage au vir siècle, dit Mabillon, que les moines et les religieuses héritassent de leurs parents.

« le prouve par l'exemple de sainte Aldegonde, qui donna aux pauvres et consacra à la décoration des églises les biens qu'elle avait hérités de sa famille (1). »

Il est certain que cet usage subsistait enpauperes et ornatum ecclesiarum distribuit præter vile quod sibi reservavit vestimentum cum victu quotidiano, solita dicere melius esse solidum unum manu propria pauperibus dare quam centum post mortem promittere.» (Ann. Bened., t. 1, p. 519.)

core dans le vir siècle, ainsi que le démontrent les exemples de deux vierges consacrées à Dieu, dont parlent les auteurs de la collection; l'une fit des donations en 711 au monastère de Saint-Pierre de Sens, et l'autre en 715 au monastère de Sainte-Bénigne de Dijon.

Les auteurs de la collection concluent : « qu'il était donc permis aux religieuses de posséder en propre des biens et de les employer du moins en pieux usages. Mais il faut avouer que ce n'était pas le droit commun. Cette permission avait d'abord été accordée par des motifs particuliers, comme le remarque Mabillon; mais par la suite il devint d'usage parmi les moines et les religieuses, même parmi ceux qui étaient célèbres par leur piété, de faire des dons et des legs pieux. Ils savaient cependant que, selon la loi, les biens de ceux qui entraient en religion devenaient dès lors des propriétés des monastères où ils étaient entrés. » (T. I, Proleg., p. 196.)

Mais cette loi dont parlent les auteurs de la collection, c'est la novelle 123 de Justinien, qui n'est devenue loi de l'Eglise et loi générale que par l'acceptation qui en a été faite par l'Eglise, acceptation qui a pu avoir lieu plus tard dans certaines églises particulières que dans d'autres rien n'empêcherait donc de dire que les dispositions de la novelle 123 n'eurent force de loi dans toutes les Gaules que vers la fin du vin siècle.

Il résulte évidemment de tous ces faits, que la faculté d'hériter et de tester n'est point incompatible avec l'essence de l'état religieux; et que la loi, qui le défend aux religieux, est susceptible de dispense.

Mais les directeurs si sévères sur cet article ne savent donc pas que les religieuses ne sont privées de la faculté d'hériter par aucune loi de l'Eglise, et qu'au contraire l'ancien droit ecclésiastique et civil les y autorise; qu'elles n'en ont été privées en France qué par la loi civile; que cette loi, qui n'a commencé que par les coutumes, ne remonte pas plus haut que le xv siècle, ainsi que le prouve fort au long le P. Thomassin (Discipl. eccl., part. iv, 1. m, chap. 18); qu'encore aujourd'hui, dans les autres contrées catholiques, si on en excepte les Pays-Bas et un petit nombre d'autres, elles conservent cette faculté en totalité ou du moins en très-grande partie (2). Il est vrai seulement qu'elles ne jouissent pas et ne peuvent pas jouir personnellement de l'héritage qu'elles recueillent, c'est le monastère qui jouit en leur nom; et ce point fait même partie de la loi de Justinien, qui, la première, a déclaré les religieux incapables d'acquérir pour eux. Justinien a transporté aux monastères tous les droits qui appartenaient aux religieux; et c'est de lui et de sa loi que vient ce principe: Tout ce qu'ac

(2) Gohard dit qu'en Italie on laisse aux religieuses la succession du mobilier et de l'usufruit des immeubles, à la charge seulement que le fonds,

quiert le moine, il l'acquiert pour son monastère. « Quidquid acquirit monachus, monasterio acquirit. »

Le P. Thomassin cite, de la seconde conférence de saint Odon, abbé de Cluny, un trait remarquable. Ce saint, après avoir déploré l'apostasie de deux religieuses du monastère de la Baume, observe que l'occasion qu'elles avaient eue de se relâcher de leur première ferveur, était qu'on leur avait permis de sortir du monastère pour tâcher d'y rapporter quelque chose de l'héritage de leurs parents qui étaient décédés. «Il est extrêmement probable,» ajoute le P. Thomassin, « que les fréquentes épreuves de ces funestes chutes, firent prendre à plusieurs bons religieux et à leurs communautés la résolution de s'abstenir plutôt de la poursuite de ces héritages, que d'y courir risque de leur salut. Ainsi la coutume d'exclure les religieux de leur ancien droit, n'eut peutêtre d'autre fondement que leur indifférence pour les biens temporels et leur désintéressement volontaire. Les parents furent bien aises d'avoir des prétextes pour retenir ce qui ne leur appartenait pas, et de faire servir à leur avarice le généreux mépris que plusieurs religieux faisaient des richesses. » (P. 546.)

Les religieux mendiants, qui ne possédaient rien en propre, étaient bien éloignés, dans les commencements, de rechercher les successions de leurs parents, et leur exemple ne put que faire tort aux droits des autres communautés, quand elles voulaient les mettre en exercice. Eux-mêmes quand ils prétendirent dans la suite, lorsque la charité des fidèles se refroidit à leur égard, recueillir les successions de leurs parents. trouvèrent beaucoup d'opposition de la part du clergé et des laïques. Les Dominicains et les Franciscains recoururent à l'autorité du Pape Clément IV, qui déclara authentiquement que le vœu de ne posséder point de fonds même en commun, que faisaient ces deux saintes communautés, n'empêchait pas qu'elles ne fussent capables des successions qui arrivaient à leurs religieux; parce que, quoiqu'elles ne pussent pas posséder des fonds, elles pouvaient les vendre, et du produit satisfaire à leurs besoins.

Le Coutumier général, dressé en France sous le règne de Charles VII, donna une exclusion générale de toutes les successions aux religieux aussi Jean Galli, qui vivait quelque temps après, met en principe que les religieux n'héritaient pas en pays coutumier, et cette manière de s'exprimer est une preuve qu'ils héritaient encore dans les pays de droit écrit. Mais le pays coutumier. dit le P. Thomassin, entraina bientôt le pays de droit écrit ; et l'usage d'exclure les religieux des successions étant universellement reçu, nos rois en firent des ordonnances. La première est de François 1" en 1532. Elle

après le décès des religieuses, reviendra à la faniille. (GOHARD, Traité des bénéfices, tom. II, p. 81.)

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