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PREUVES DE LA RELIGION CHRÉTIENNE.

Il est impossible d'envisager toutes les preuves de la religion chrétienne, ramassées ensemble, sans en ressentir la force, à laquelle nul homme raisonnable ne peut résister. Que l'on considère son établissement : qu'une religion si contraire à la nature se soit établie par elle-même, si doucement, sans aucune force ni contrainte, et si fortement néanmoins qu'aucuns tourments n'ont pu empêcher les martyrs de la confesser, et que tout cela se soit fait non seulement sans l'assistance d'aucun prince, mais malgré tous les princes de la terre qui l'ont combattue.

Que l'on considère la sainteté, la hauteur et l'humilité d'une ame chrétienne. Les philosophes païens se sont quelquefois élevés au-dessus du reste des hommes par une manière de vivre plus réglée et par des sentiments qui avaient quelque conformité avec ceux du christianisme; mais ils n'ont jamais reconnu pour vertu ce que les chrétiens appellent humilité, et ils l'auraient même crue incompatible avec les autres dont ils faisaient profession. Il n'y a que la religion chrétienne qui ait su joindre ensemble des choses si opposées, et qui ait appris aux hommes que, bien loin que l'humilité soit incompatible avec les autres vertus, sans elle toutes les autres vertus ne sont que des vices et des défauts.

Que l'on considère les merveilles de l'Écriture sainte, qui sont infinies, la grandeur et la sublimité plus qu'humaine des choses qu'elle contient, et la simplicité admirable de son style qui n'a rien d'affecté, rien de recherché et qui porte un caractère de vérité qu'on ne saurait désavouer.

Que l'on considère la personne de Jésus-Christ en particulier quelque sentiment qu'on ait de lui, on ne peut pas disconvenir qu'il n'eût un esprit très-grand et très-relevé, dont il avait donné des marques dès son enfance, devant les docteurs de la loi ; et cependant, au lieu de s'appliquer à cultiver ses talents par l'étude et la fréquentation des savants, il passe trente années de sa vie dans le travail des mains et dans une retraite entière du monde et pendant les trois années de sa prédication, il appelle à

sa compagnic, et choisit pour ses apôtres des gens sans science, sans étude; sans crédit; et il s'attire pour enucmis ceux qui passaient pour les plus savants et les pius sages de son temps. C'est une étrange conduite pour un homme qui a dessein d'établir une nouvelle religion.

Que l'on considère en particulier ces apôtres choisis par Jésus-Christ, ces gens sans lettres, sans études, et qui se trouvent tout d'un coup assez savants pour confondre les plus habiles philosophes et assez forts pour résister aux rois et aux tyrans qui s'opposaient à l'établissement de la religion chrétienne qu'ils annonçaient.

Que l'on considère cette suite merveilleuse de prophètes qui se sont succédé les uns aux autres pendant deux mille ans, et qui ont tous rédit en tant de manières différentes jusqu'aux moindres circonstances de la vie de Jésus-Christ, de sa mort, de sa résurrection, de la mission des apôtres, de la prédication de l'Évangile, de la conversion des nations et de plusieurs autres choses qui concernent l'établissement de la religion chrétienne et l'abolition du judaïsme.

Que l'on considère l'accomplissement admirable de ces prophéties, qui conviennent si parfaitement à la personne de Jésus-Christ qu'il est impossible de ne pas le reconnaître, à moins de vouloir s'aveugler soi-même.

Que l'on considère l'état du peuple juif, et avant et près la venue de Jésus-Christ, son état florissant avant la venue du Sauveur, et son état plein de misère depuis qu'ils l'ont rejeté; car ils sont encore aujourd'hui sans aucune marque de religion, sans temple, sans sacrifices, dispersés par toute la terre, le mépris et le rebut de toutes les nations.

Que l'on considère la perpétuité de la religion chrétienne qui a toujours subsisté depuis le commencement du monde, soit dans les saints de l'Ancien-Testament qui ont vécu dans l'attente de Jésus-Christ avant sa venue; soit dans ceux qui l'out reçu et qui ont cru en lui depuis sa venue, au lieu que nulle autre religion n'a la perpétuité, qui est la principale marque de la véritable

Enfin que l'on considère la sainteté de cette religion, sa doctrine, qui rend raison de tout, jusqu'aux contrariétés

qui se rencontrent dans l'homme, et toutes les autres choses singulières, surnaturelles et divines qui y éclatent de toutes parts.

Et qu'on juge, après tout cela, s'il est possible de douter que la religion chrétienne soit la seule véritable, et si jamais aucune autre a rien eu qui en approchât.

BONHEUR DE LA RELIGION.

(PASCAL.)

Religion, quel est ton empire! que de vertus te doivent les humains! Oh! qu'il est heureux, le mortel qui, pénétré de tes vérités sublimes, trouve sans cesse dans ton sein un asile contre le vice, un refuge contre le malheur! Tant que l'inconstante fortune sourit à ses innocents désirs, tant qu'il coule des jours sans nuage, tu sais les embellir encore; tu viens ajouter un nouveau plaisir au bien qu'il fait à ses semblables; tu donnes un charme de plus aux délices d'une bonne action; ta sévérité même est un bienfait : tu ne retranches du bonheur que ce qui pourrait le corrompre; tu nc défends de chérir que ce qu'on rougirait d'aimer. Si le sort accable, au contraire, une ame soumise à tes lois saintes, c'est alors surtout, c'est alors qu'elle trouve en toi son plus ferme appui. Sans prescrire l'insensibilité, que la nature heureusement rend impossible, tu nous apprends à surmonter les maux dont tu permets qu'on s'afflige; tu descends dans les cœurs déchirés pour calmər leurs douleurs cuisantes, pour leur présenter un dernier espoir, et tu n'éteins pas ce pur sentiment qui les fait souffrir et qui les fait vivre.

IMMORTALITÉ DE L'AME.

(FLORIAN.)

Plus je rentre en moi, plus je me consulte et plus je lis ces mots écrits dans mon ame: «< Sois juste, et tu seras heureux ! » Il n'en est rien pourtant, à considérer l'état présent des choses: le méchant prospère, et le juste reste opprimé. Voyez aussi quelle indignation s'allume en nous quand cette attente est frustrée : la conscience s'élève et murmure

contre son auteur; elle lui crie en gémissant : « Tu m'as trompée ! »

« Je t'ai trompée, téméraire ! qui te l'a dit? Ton ame est-elle anéantie? as-tu cessé d'exister? O Brutus! ô mon fils! ne souille point ta noble vie en la finissant; ne laisse point ton espoir et ta gloire avec ton corps aux champs de Philippes. Pourquoi dis-tu : « La vertu n'est rien », quand tu vas jouir du prix de la tienne? Tu vas mourir, pensestu; non, tu vas vivre, et c'est alors que je tiendrai tout ce que je t'ai promis.

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On dirait, aux murmures des impatients mortels, que Dieu leur doit la récompense avant le mérite, et qu'il est obligé de payer leur vertu d'avance. Oh! soyons bons premièrement, et puis nous serons heureux. N'exigeons pas le prix avant la victoire, ni le salaire avant le travail. Ce n'est point dans la lice, disait Plutarque, que les vainqueurs de nos jeux sacrés sont couronnés, c'est après qu'ils "'ont parcourue.

Si l'ame est immatérielle, elle peut survivre au corps; et si elle lui survit, la Providence est justifiée. Quand je n'aurais d'autre preuve de l'immatérialité de l'ame que le triomphe du méchant et l'oppression du juste en ce monde, cela seul m'empêcherait d'en douter. Une si choquante dissonance dans l'harmonie universelle me ferait chercher à la résoudre. Je me dirais : « Tout ne finit pas pour moi avec la vie; tout rentre dans l'ordre à la mort. »

L'ATHEISME.

(J.-J. ROUSSEAU.)

Otez aux hommes l'opinion d'un Dieu rénumérateur et vengeur, Sylla et Marius se baignent alors avec délices dans le sang de leurs concitoyens; Auguste, Antoine et Lépide surpassent les fureurs de Sylla; Néron ordonne de sang-froid le meurtre de sa mère : il est certain que la doctrine d'un Dieu vengeur était alors éteinte chez les Romains. L'athée, fourbe, ingrat, calomniateur, brigand, sanguinaire, raisonne et agit conséquemment, s'il est sûr de l'impunité de la part des hommes: car s'il n'y a pas de

Dieu, ce monstre est son Dieu à lui-même; il s'immole tout ce qu'il désire ou tout ce qui lui fait obstacle; les prières les plus tendres, les meilleurs raisonnements ne peuvent pas plus sur lui que sur un loup affamé.

Une société particulière d'athées qui ne se disputent rien, et qui perdent doucement leurs jours dans les amusements de la volupté, peut durer quelque temps sans trouble; mais si le monde était gouverné par des athées, il vaudrait autant être sous le joug immédiat de ces êtres informes qu'on nous peint acharnés contre leurs victimes. (VOLTAIRE.)

LA CONSCIENCE.

Partout nous rendons hommage, par nos troubles et par nos remords secrets, à la sainteté de la vertu que nous violons; partout un fond d'ennui et de tristesse, inséparable du crime, nous fait sentir que l'ordre et l'innocence sont le seul bonheur qui nous était destiné sur la terre. Nous avons beau faire montre d'une vaine intrépidité, la conscience criminelle se trahit toujours elle-même. Les terreurs cruelles marchent partout devant nous, la solitude nous trouble, les ténèbres nous alarment, nous croyons voir sortir de tous côtés des fantômes qui viennent toujours nous reprocher les horreurs secrètes de notre ame; des songes funestes nous remplissent d'images noires et sombres, et le crime, après lequel nous courons avec tant de goût, court ensuite après nous comme un vautour cruel, et s'attache à nous pour nous déchirer le cœur et nous punir du plaisir qu'il nous a lui-même donné.

LA MÉDISANCE.

(MASSILLON.)

C'est un feu dévorant qui flétrit tout ce qu'il touche qui exerce sa fureur sur le bon grain comme sur la paille, sur le profane comme sur le sacré; qui ne laisse partout où il a passé que la ruine et la désolation; qui creuse jusque dans les entrailles de la terre, et va s'attacher aux

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