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porter à cette tâche une attention patiente et soutenue, et, s'il le faut, suspendre, provisoirement du moins, son jugement, afin de laisser aux objections et aux motifs de doute le temps de se produire, voilà ce qui est au pouvoir de tous. Aussi Malebranche exigeait-il de l'esprit deux vertus principales, la force et la liberté. « Par l'usage qu'on fait de la force de son esprit, disait-il, on découvre la vérité, et par l'usage qu'on fait de la liberté de son esprit on s'exemple de l'erreur. »

Conserver intacte chez les enfants cette liberté de penser, en les exerçant de bonne heure à se former une opinion personnelle, au lieu de répéter des jugements tout faits, telle doit être l'application constante des parents et des maîtres. « Penser d'après soi-même, a dit Guénard (1): caractère plein de force et de grandeur; qualité la plus rare peut-être et la plus précieuse de toutes les qualités de l'esprit. Qu'on y réfléchisse; on verra que tous les hommes, à la réserve d'un petit nombre, pensent les uns d'après les autres, et que leur raison tout entière est en quelque sorte composée d'une foule de jugements qu'ils ramassent autour d'eux. C'est ainsi que les opinions bizarres des peuples, les dogmes souvent absurdes de l'école, l'esprit des corps avec tous ses préjugés, le génie des sectes avec toutes ses extravagances, se perpétuent d'âge en âge, et ne meurent presque jamais avec les hommes; parce que toutes

(1) Discours sur l'esprit philosophique.

ces idées, en sortant de l'âme des vieillards et des maîtres, entrent aussitôt dans celle des enfants et des disciples, qui les transmettent de même à leurs crédules successeurs. Oui, je le répète juger par ses propres yeux, être l'auteur véritable de ses pensées, c'est une qualité singulière et qui prouve la supériorité de l'intelligence. Rien de plus commun que le défaut opposé. » Efforçons-nous d'en affranchir l'enfant, en l'incitant toujours à juger librement, quittes à rectifier par des explications claires et nettes les erreurs qu'il pourra commettre. Plus tard, si l'insuffisance de ses lumières l'oblige à recourir à celles d'autrui, sa soumission sera intelligente. Il n'abdiquera jamais son droit d'examen.

En somme, l'enfant qui aura été exercé aux règles de la Logique, mieux encore, qui aura été préparé par l'étude des sciences à procéder partout avec la rigueur de leurs méthodes et mis, par une surveillance sévère de lui-même, à l'abri des influences morales propres à troubler son intelligence, échappera sans peine aux causes d'illusion qui font errer un grand nombre d'hommes. Instruit à pratiquer la recherche méthodique du vrai, il ne saurait manquer d'y atteindre.

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INTRODUCTION.

Les trois périodes de la vie intellectuelle de l'enfant : période sensitive; période de la pensée spontanée; période de la pensée réfléchie. Caractères propres à chacune d'elles.- Analogie qu'elles présentent avec l'évolution des races

CHAPITRE PREMIER.

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· La logique du premier âge. Comment il peut y avoir pensée sans langage. La logique des images. Exemples de raisonnement chez l'enfant avant la parole. L'enfant procède par comparaison. -Extension analogique du sens des mots. - Cas divers. Exemples. Création analogique de mots Exemples. La logique des enfants dans la construction des propositions et des phrases. L'emploi du pronom je. — Comment se constitue le sentiment du moi. Qu'il est dû surtout à la conscience de l'activité spontanée. Exemples. - Personnifica

nouveaux.

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