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dit-il. Au milieu de la nuit, les Grecs, Léonidas à leur tête, sortent du défilé, s'avancent dans la plaine, renversent sans effort, les postes avancés, et pénètrent dans la tente de Xercès, qui, heureusement pour ses jours, avait pris la fuite. Se répandant, alors dans le camp ennemi, les Grecs portent la mort de tous côtés; les Perses ne peuvent entendre la voix de leurs généraux, et, ne sachant plus ni où porter leurs pas, ni où diriger leurs coups, se jetaient au hasard dans la mêlée, et périssaient en grande partie de la main des leurs. Mais, ô fatalité les premiers rayons du soleil viennent découvrir aux Perses le petit nombre de leurs vainqueurs; et bientôt assaillis de tous cotés par des bataillons innombrables, les Grecs et leur digne chef finirent leurs jours en combattant.

Quel autre sentiment que l'amour de la patrie eût jamais pu les porter à cher

cher de semblables périls? Quel autre mouvement de l'âme leur eût fait envisager du même sang-froid, la mort et ses horreurs?

LETTRE XXXV.

PÉTRARQUE ET LAURE.

APRÈS le don de faire de grandes choses, Mademoiselle, le talent de les célébrer dignement est un des plus beaux apanages de l'homme; aussi les poëtes et les philosophes ont-ils d'aussi beaux droits à la célébrité que les guerriers et les conquérants; les premiers ont même, à ce qu'il me semble, un grand avantage sur les autres; c'est que l'immortalité ne leur est pas acquise au prix de la vie de leurs semblables, et que le laurier qui ceint leur tête n'est jamais.souillé de sang. Il appartient aux poëtes, nonseulement de vivre éternellement dans la mémoire des hommes, mais encore d'associer à leur renommée ceux qu'ils jugent dignes de la partager. Ils ont en

core la faculté de citer au tribunal de la postérité les rois qui usent de leur pouvoir tyrannique, pour humilier et persécuter le génie ; c'est dans ce sens que l'on a dit :

L'amitié d'un grand homme est un bienfait des dieux. - Ces réflexions Mademoiselle, me sont inspirées par la gravure que vous avez sous les yeux. Qui se douterait en effet que vers le commencement du quatorzième siècle, vivait à Avignon une jeune personne, nommée Laure de Noves, modèle de grâces et de beauté! Le souvenir de ses attraits et de ses vertus, serait resté à jamais enseveli dans la tombe, si un poëte de cette époque, si Pétrarque, inspiré par l'amour le plus pur, ne se fût chargé d'apprendre à l'avenir, et sa passion pour Laure et la fin prématurée de cette femme devenue célèbre, grâce au talent de son adorateur.

Ce fut le vendredi-saint de l'an 1327

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Pélrarque et Laure.

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