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dans un fens paffif, du moins par raport à notre manière de traduire.

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Mais ne pourroit-on pas ajouter qu'en latin immémor veut dire fouvent qui n'eft pas demeuré dans la mémoire? Tacite a dit, immemor beneficium un bienfait qui n'est point demeuré dans la mémoire, ou felon notre manière de parler, un bienfait oublié. Horace a dit memor nota, une marque qui dure long-tems, qui fait reffouvenir. Virgile a dit dans le mème fens memor ira, une colère qui demeure long-tems dans le cœur, ainfi immémoris feroit dans un fens neutre en latin.

Que fait Monfieur? Il joue jouer eft pris alors dans un fens neutre: mais quand on dit, il joue gros jeu; il joue eft pris dans un fens actif, & gros jeu eft le régime de il joue.

Danfer eft un verbe neutre ; mais lorsqu'on dit, danfer une courante, danfer un menuet; danfer eft alors un verbe actif.

Les Latins ont fait le même ufage de faltare, qui répond à danfer. Salufte a dit de Sempronia, qu'elle favoit mieux chanter & danfer qu'une honête femme ne doit le favoir, Pfallere & faltare elegantius, quam neceffe eft probe ( fupple) dofta erat pfallere & faltare; faltare eft pris alors dans un fens neutre : mais lorfqu'Horace a dit Saltare Cyclopa, danfer le Cyclope; faltare eft pris alors dans un fens actif. Les Grecs & les Latins, dit M.

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» Dacier, ont dit danfer le Cyclope, danfer "Glaucus, danfer Ganimède, Léda, Europe, &c. » c'est-à-dire, repréfenter en danfant les aventures du Cyclope, de Glaucus, &c.

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Le même poëte à dit Fufius ébrius Itlionam edormit, le comédien Fufius en représentant Ilione endormie, s'endort luimême come un home hyvre qui cuve fon vin. Térence a dit edormifcam hoc villi, je cuverai mon vin : & Plaute, edormifcam hanc crapulam, & dans l'Amphitrion il a dit, edormifcat unum fomnum, come nous disons dormir un fome. Vous voyez que dans ces exemples, edormire & edormifcere fe prend dans un fens actif.

Cette remarque fert à expliquer ces façons de parler itur, favétur, &c. ces verbes neutres fe prènent alors en latin dans un fens paffif, & marquent que l'action qu'ils fignifient eft faite; iter itur, l'action d'aler fe fait. Voyez ce que nous en avons dit dans la fym xe: l'action que le verbe fignifie, fert alors de nominatif au verbe même felon la , des anremarque ciens Grammairiens. *

* Ut curritur à me pro curro; vel fatur à te pro ftas: fedétur ab illo , pro fedet ille: in eis poteft ipfa res intelligi voce paffiva; ut curritur curfus, bellatur bellum. Prifcianus, lib. xvII. c. de Pronominum conftructione.

Et Voffius s'exprime en ces termes: verba accufativum habent fuæ originis vel cognatæ fignificationis: prioris generis apud Teréntium eft ludere ludum. Eun, act. 3. fc. 5. v. 39. Apud Maronem furere furorem, Æn. 1. 12. v. 680. Donatus Ar

I V.

SENS ABSOLU SENS

UN

و

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N mot eft pris dans un fens abfolu, lorfqu'il exprime une chofe confidérée en elle-même fans aucun raport à un autre. -Abfolu vient d'abfolutus qui veut dire achevé, acompli, qui ne demande rien davantage; par exemple, quand je dis que le foleil eft lumineux, cette expreffion eft dans un fens abfolu; celui à qui je parle n'atend rien de plus, par raport au fens de cette phrase.

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Mais fi je difois que le foleil eft plus grand que la terre alors je confidérerois le foleil par raport à la terre, ce feroit un fens relatif ou refpectif. Le fens relatif ou refpectif eft donc lorfqu'on parle d'une chofe par raport à quelqu'autre: c'eft pour cela que ce fens s'apèle auffi refpectif, du latin refpicere, regarder; parce que la chofe dont on parle, en regarde, pour ainfi dire, une autre ; elle en rapèle l'idée, elle y a du raport, elle s'y raporte; de-là vient relatif, de referre raporter. Il y a des mots relatifs, tels que père, fils, époux, &c; nous en avons parlé ailleurs.

chaifmum vocat, mallem Atticifmum dixiffet... quia fic locutos conftat, non eos modò qui défita & obfoleta amant, fed optimos quofque optimi ævi fcriptores, &c. Veffius de Conftructione, pag. 409."

S

V.

SENS COLLECTIF SENS

,

DISTRIBUTIF.

COLLECTIF

OLLECTIF vient du latin colligere, qui veut dire recueillir, affembler. Diftribu tif vient de diftribuere, qui veut dire, diftribuer, partager.

La femme aime à parler: cela eft vrai en parlant des femmes en général; ainfi le mot de femme eft pris là dans un fens collectif mais la propofition eft fauffe dans le fens diftributif, c'eft-à-dire, que cela n'est point vrai de chaque femme en particulier.

L'home eft fujet à la mort; cela eft vrai dans le fens collectif, & dans le fens diftributif.

Au lieu de dire le fens collectif & le fens diftributif, on dit auffi le fens général & le fens particulier.

Il y a des mots qui font collectifs c'est-à-dire, dont l'idée représente un tout en tant que compofé de parties actuèlement féparées, & qui forment autant d'unités ou d'individus particuliers: tels font armée, république, régiment.

V I.

SENS ÉQUIVOQUE, SENS

LOUCH E.

Il y a des mots & des propofitions

équivoques. Un mot eft équivoque, lorfqu'il fignifie des chofes diferentes: come chaur, affemblée de plufieurs perfones qui chantent; caur, partie intérieure des animaux: autel table fur quoi l'on fait des facrifices aux Dieux : hôtel, grande maifon. Ces mots font équivoques du moins dans la prononciation. Lion nom d'un animal; Lion nom d'une conf tellation, d'un figne célefte; Lyon, nom d'une ville. Coing, forte de fruit; coin angle, endroit ; coin, inftrument avec quoi Pon marque les monnoies & les médailles; coin, inftrument qui fert à fendre du bois : coin eft encore un terme de manège, &c.

De quelle langue voulez-vous vous fervir avec moi? dit le Docteur Pancrace, parlant à Sganarèle de la langue que j'ai dans ma bouche, répond Sganarele; où vous voyez que par langue, l'un entend langage, idiome; & l'autre entend. come il le dit, langue que nous avons dans la bouche.

"

Dans la fuite d'un raifonement, on doit toujours prendre un mot dans le même fens qu'on l'a pris d'abord, autrement on ne

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