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* Agitation.

XII. * Quand un soldat se plaint de la peine qu'il a ou un laboureur, etc., qu'on les mette sans rien faire.

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83 XIII. La nature nous rendant toujours malheureux 441 en tous états, nos désirs nous figurent un état heureux, parce qu'ils joignent à l'état où nous sommes les plaisirs de l'état où nous ne sommes pas; et quand nous arriverions à ces plaisirs, nous ne serions pas heureux pour cela parce que nous aurions d'autres désirs conformes à ce nouvel état.

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*Il faut particulariser cette proposition générale....

XIV. Nous ne nous tenons jamais au temps présent. 21 Nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours; ou nous rappelons le passé, pour l'arrêter comme trop prompt si imprudents, que nous errons dans les temps qui ne sont pas nôtres et ne pensons point au seul qui nous appartient; et si vains, que nous songeons à ceux qui ne sont plus rien et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C'est que le présent d'ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue, parce qu'il nous afflige; et s'il nous est agréable, nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l'avenir, et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance, pour un temps où nous n'avons aucune assurance d'arriver.

Que chacun examine ses pensées, il les trouvera toujours occupées au passé et à l'avenir. Nous ne pensons presque point au présent; et si nous y pensons, ce n'est que pour en prendre la lumière pour disposer de l'avenir. Le présent n'est jamais notre fin; le passé et le présent sont nos moyens; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre; et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons ja

mais.

CHAPITRE II.

*DES PUISSANCES TROMPEUSES.

Le titre et le commencement de ce chapitre se trouvent indiqués par Pascal lui-même, dans une note qui se trouve page 370 du MS et que nous reproduisons au bas de la page suivante.

Par Puissances trompeuses il faut entendre toutes les causes d'erreur ou d'illusion, intérieures ou extérieures, qui agissent sur la raison et troublent plus ou moins le jugement.

Nous croyons nous conformer au plan de Pascal en faisant entrer dans ce chapitre, non-seulement ce qu'il dit de l'Imagination, de l'intérêt personnel et des maladies, mais aussi ce qu'il dit de la prévention qui naît de l'habitude ou qui résulte de la manière dont une chose est présentée, et de l'Amour-propre.

Ce morceau sur l'amour-propre n'est pas dans le MS. autographe, ni dans les deux copies. Nous le donnons collationné sur le petit MS. in-8°, où il se trouve sous ce titre : Écrit de Monsieur Pascal. Il se trouve aussi dans l'Histoire littéraire de Port-Royal, par dom Clémencet. M. Sainte-Beuve a bien voulu nous communiquer une copie de ce MS. qui est encore inédit.

Peut-être Pascal eût-il établi entre ces divers fragments un ordre différent de celui-ci, en même temps qu'il les eût développés dans des proportions plus amples; mais il n'y a pas de témérité à penser qu'il les aurait tous compris dans son chapitre des Puissances trompeuses.

P. F.

1

72 L'homme n'est qu'un sujet plein d'erreur natu- 370 relle et ineffaçable sans la grâce. Rien ne lui montre la vérité; tout l'abuse. Ces deux principes de vérités, la raison et les sens, outre qu'ils manquent chacun de sincérité, s'abusent réciproquement l'un l'autre. Les sens abusent la raison par de fausses apparences; et cette même piperie qu'ils apportent à la raison ils la reçoivent d'elle à leur tour. Elle s'en revanche : les passions de l'âme troublent les sens et leur font des impressions fausses ils mentent et se trompent à l'envi 2.

* Mais outre ces erreurs qui viennent par accident et par le manque d'intelligence, avec ces facultés hétérogènes......

I.

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IMAGINATION.

I. C'est cette partie décevante dans l'homme, cette 361 maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours; car elle serait

1 Pascal a écrit en marge de cet alinéa : « Il faut commencer par là le chapitre des puissances trompeuses. »

Montaigne avait dit : « Ceste mesme piperie que les sons apportent à nostre entendement, ils la reçoivent à leur tour; nostre âme par fois s'en revanche de mesme : ils mentent et se trompent à l'envy.» Essais. Liv. II. chap. 12.

'La phrase est inachevée, et presque illisible.

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