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* PRÉFACE DE LA SECONDE PARTIE'.

I.

Parler de ceux qui ont traité de cette matière. 206 J'admire avec quelle hardiesse ces personnes entreprennent de parler de Dieu en adressant leurs discours aux impies. Leur premier chapitre est de prouver la divinité par les ouvrages de la nature.

Je ne m'étonnerais pas de leur entreprise s'ils adressaient leurs discours aux fidèles; car il est certain (que ceux) qui ont la foi vive dans le cœur voient incontinent que tout ce qui est n'est autre chose que l'ouvrage du Dieu qu'ils adorent. Mais pour ceux en qui cette lumière est éteinte, et dans lesquels on a dessein de la faire revivre, ces personnes destituées de foi et de grâce, qui recherchant de toute leur lumière tout ce qu'ils voient dans la nature qui les peut mener à cette connaissance ne trouvent qu'obscurité et ténèbres, dire à ceux-là qu'ils n'ont qu'à voir la moindre des choses qui les environnent et qu'ils y verront Dieu à découvert, et leur donner, pour toute preuve de ce grand et important sujet, le cours de la lune ou des planètes, et prétendre avoir achevé sa preuve avec un tel discours, c'est leur donner sujet de croire que les preuves de notre religion sont bien

'Les fragments que nous réunissons ici, sous' le titre de préface, sont tous évidemment écrits dans une même vue; toutefois, il n'y a que les deux premiers qui portent ce titre dans les MSS.

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faibles; et je vois par raison et par expérience que rien n'est plus propre à leur en faire naître le mépris.

Ce n'est pas de cette sorte que l'Écriture, qui connaît mieux les choses qui sont de Dieu, en parle. Elle dit au contraire que Dieu est un Dieu caché; et que depuis la corruption de la nature il les a laissés (les hommes) dans un aveuglement dont ils ne peuvent sortir que par Jésus-Christ, hors duquel toute communication avec Dieu est ôtée: Nemo novit patrem nisi filius, et cui voluerit filius revelare 1.

C'est ce que l'Écriture nous marque, quand elle dit en tant d'endroits que ceux qui cherchent Dieu le trouvent; ce n'est point de cette lumière qu'on parle comme le jour en plein midi on ne dit point que ceux qui cherchent le jour en plein midi ou de l'eau en la mer en trouveront; et ainsi il faut bien que l'évidence de Dieu ne soit pas telle dans la nature. Aussi elle nous dit ailleurs: Vere tu es Deus absconditus 2.

II. Préface. - Les preuves de Dieu métaphysiques 265 sont si éloignées du raisonnement des hommes et si impliquées, qu'elles frappent peu; et quand cela servirait à quelques-uns, ce ne serait que pendant l'instant qu'ils voient cette démonstration; mais, une heure après, ils craignent de s'être trompés.

Matth., II, 27.

2 Tout ce morceau, dicté à une personne visiblement fort peu lettrée, présente çà et là des obscurités qui viennent sans doute de l'inexpérience du secrétaire. Par exemple, au lieu de comme le jour en plein midi, il semble qu'il faudrait : comme du jour, etc.

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Quod curiositate cognoverint superbia amiserunt.

*C'est ce que produit la connaissance de Dieu, qui se tire sans Jésus-Christ : qui est de communiquer sans médiateur avec le Dieu qu'on a connu sans médiateur.

Au lieu que ceux qui ont connu Dieu par médiateur connaissent leur misère.

III. J. C. est l'objet de tout et le centre où tout tend. Qui le connaît, connaît la raison de toutes choses '.

Ceux qui s'égarent ne s'égarent que manque de voir une de ces deux choses. On peut donc bien connaître Dieu sans sa misère et sa misère sans Dieu; mais on ne peut connaître J. C. sans connaître tout ensemble et Dieu et sa misère.

Et c'est pourquoi je n'entreprendrai pas ici de prouver par des raisons naturelles, ou l'existence de Dieu, ou la Trinité, ou l'immortalité de l'âme, ni aucune des choses de cette nature; non-seulement parce que je ne me sentirais pas assez fort pour trouver dans la nature de quoi convaincre des athées endurcis, mais encore parce que cette connaissance, sans Jésus-Christ, est inutile et stérile. Quand un homme serait persuadé que les proportions des nombres sont des vérités immatérielles, éternelles, et dépendantes d'une première vérité en qui elles subsistent et qu'on appelle Dieu, je ne le trouverais pas beaucoup avancé pour son salut.

Ce paragraphe et les deux suivants ne sont pas dans le MS., mais dans la Copie.

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IV. C'est une chose admirable que jamais auteur canonique ne s'est servi de la nature pour prouver Dieu; tous tendent à le faire croire: David, Salomon, etc., jamais n'ont dit : Il n'y a point de vide, donc il y a un Dieu. Il fallait qu'ils fussent plus habiles que les plus habiles gens qui sont venus depuis qui s'en sont tous servi.

* Cela est très-considérable '.

V. Si c'est une marque de faiblesse de prouver Dieu 444 par la nature, n'en méprisez point l'Écriture; si c'est une marque de force d'avoir connu ces contrariétés, estimez-en l'Écriture.

238 VI. On n'entend rien aux ouvrages de Dieu, si on ne 45 prend pour principe qu'il a voulu aveugler les uns et éclairer les autres.

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VII. Le Dieu des chrétiens ne consiste pas en un Dieu simplement auteur des vérités géométriques et de l'ordre des éléments; c'est la part des païens et des Epicuriens. Il ne consiste pas seulement en un Dieu qui exerce sa providence sur la vie et sur les biens des hommes, pour donner une heureuse suite d'années à ceux qui l'adorent; c'est la portion des Juifs. Mais le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, le Dieu de Jacob, le Dieu des chrétiens, est un Dieu d'amour et de consolation. C'est un Dieu qui remplit l'âme et le cœur qu'il possède; c'est un Dieu qui leur fait sentir intérieure

1 Ce passage ne se trouve que dans la Copie.

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ment leur misère et sa miséricorde infinie; qui s'unit a u fond de leur âme; qui la remplit d'humilité, de joie, de confiance, d'amour; qui les rend incapables d'autre fin que de lui-même '.

VIII. Tous ceux qui cherchent Dieu hors de J.-C. et qui s'arrêtent dans la nature, ou ils ne trouvent aucune lumière qui les satisfasse, ou ils arrivent à se former un moyen de connaître Dieu et de le servir sans médiateur; et par là ils tombent ou dans l'athéisme ou dans le déisme qui sont deux choses que la religion chrétienne abhorre presque, également.

Sans Jésus-Christ le monde ne subsisterait pas; car il faudrait, ou qu'il fût détruit, ou qu'il fût comme un enfer 2.

234 Si le monde subsistait pour instruire l'homme de Dieu, sa divinité reluirait de toutes parts d'une manière incontestable; mais comme il ne subsiste que par J.-C. et pour J.-C. et pour instruire les hommes et de leur corruption et de leur rédemption, tout Y éclate des preuves de ces deux vérités. Ce qui y paraît ne marque ni une exclusion totale, ni une présence manifeste de divinité, mais la présence d'un Dieu qui se cache tout porte ce caractère 3.

:

IX. Le seul qui connaît la nature ne la connaîtra-t-il que pour être misérable?

1 Dans la Copie seulement.

2 et' Idem.

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