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Amour, fans qu'on y penfe, amene ces instans.
Mainte fille a perdu fes gans,

Et femme au partir s'eft trouvée,
Qui ne fait la plupart du tems
Comme la chofe eft arrivée.

RONDE A U.

† A quatorze ans Melante étoit heureuse,
Rioit, dançoit, & fans être peureuse
Cueilloit des fleurs, alloit fe promener,
Neptune eût bien voulu la détourner,
Et fatisfaire à fa flâme amoureuse.
Pour les Dauphins étant douce & flateuse,
Lui d'un Dauphin prit la forme trompeuse:
Facilement on fe laiffe mener,

A quatorze ans.

Elle trouva fa croupe merveilleuse,
Et d'y monter ne fut point fcrupuleufe:
Elle eût voulu pourtant, s'en retourner
Ce qu'elle en fit étoit pour badiner,
Et badiner eft chofe dangereufe
A quatorte ans.

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142

LE MARIAGE.

Les incommoditez & les ennuis du

V

mariage.

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STANCES.

Ous attendez, Tyrfis, que l'Hymen favorife
Vos plus ardents defirs,

Et vous faffe goûter avec la jeune Elise
Mille & mille plaifirs.

A l'efpoir des douceurs vôtre ame abandonnée
Se flâte doucement,

Et vous n'envifagez d'un trompeur Hymenée
Que le commencement.

Penfez vous, cher Tyrfis, que les ris & les graces,
Qui fuivent les Amours,

Dans le cœur d'un Epoux trouvant les mêmes places
Y folâtrent toûjours.

Les fuites de l'Hymen & nos premieres Alâmes
N'ont pas même destin,

Et ce nœud qui d'abord chatouille tant nos ames
Les écorche à la fin.

* MR. DE CANTENAC.

De

De nos jeunes ardeurs les attraits & les forces

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Se perdent à leur tour,

Et le dégoût fuccede aux plus douces amorces
Des fens & de l'amour.

Si de quelque plaifir nous reffentons l'atteinte
Lors que l'Hymen nous joint,

C'eft d'un cruel devoir la facheufe contrainte
Où l'amour ne vient point.

L'on abhorre en fecret le nom de legitime
Qui détache les cœurs,

Et l'efprit attiré par l'amorce du crime
Se divertit ailleurs.

Dans le remords cuifant d'une douleur fecrete,
Souvent un trifte époux

Voit le train déreglé d'une femme coquette,
Et n'ofe être jaloux.

Par le figne importun d'une careffe feinte
Ils s'abusent tous deux,

Et n'arrachent jamais le foupçon & la crainte
De leur cœur malheureux.

Les crimes d'une femme augmentent sa careffe
Pour un pauvre mari,

Et fes baifers trompeurs cachent avec adresse
L'amour d'un favori.

Je confeffe, Tyrfis, qu'il fe trouve des femmes,
Qui ne fe fouillent pas,

Et de qui la vertu, qui plaît aux belles ames,
Fait briller les appas.

Que plufieurs dans l'Hymen par de feintes careffes
Ne font jamais trahis:

Mais, Tyrfis, après tout il est peu de Lucreces, Et beaucoups de Laïs.

Cel

Celles dont la pudeur fuit la honte du vice,

Ont de plus grands défauts,

Et leurs emportemens, leur orgueil, leur caprice
Sont de plus rudes maux.

Il en est peu, Tyrfis, de qui l'humeur traitable
Ecoute la raifon,

Ce fexe ailleurs fi doux devient infupportable
Etant dans fa maison.

Sa vertu, qu'on achete au prix de mille peines,
Augmente fon chagrin,

Le Sage fi fameux, qui mourut dans Athenes,
En fut troublé fans fin.

Ce fexe imperieux, qui ne se peut foûmettre,
Se veut faire obeïr,

Et ce nom de mari leur femble un nom de maître,,
Qu'elles favent haïr.

Il en eft, direz-vous, qui ne font pas portées
Aux duretez de cœur,

Au tombeau d'un époux on a vû des Panthées
En mourir de douleur.

Il est rare, Tyrfis, de voir les beaux exemples
De ces amours parfaits,

Auffi l'antiquité leur confacroit des temples
Que le tems a défaits.

Le tems, qui vit alors des amours fi fidéles,
N'a pû les retenir,

Ils fortirent du monde, & quitterent leurs aîles,
Pour n'y plus revenir."

Gardez-vous bien, Tyrfis par ces vaines remarques De vous laiffer

tromper,

Songéz au noeud d'Hymen, & que les feules Parques Ont droit de le couper.

Elise a des douceurs, & ravit par ses charmes
Un amant comme vous:

Mais elle feroit naître & des foins & des larmes
Dans le cœur d'un époux.

Evitez de l'Hymen la chaîne infupportable,
Qui ronge inceffamment,

Et pour aimer toûjours & devenir aimable,
Agiffez en Amant.

SATIRE.

Non, je ne ferai pas ce qu'on veut que je faffe
En dûffe-je fouffrir ce dont on me menace:
Dûffent tous mes parens me priver de leur bien:
On veut me marier, & je n'en ferai rien.
J'eftime mon repos plus que mon heritage,
Et pour mieux l'affurer je fuis le mariage.
C'est un lien fatal à nôtre liberté,

Le plus heureux époux eft toûjours maltraité.
L'Hymen avec la joie a tant d'antipathie,
Qu'on n'a que deux bons jours, l'entrée & là fortie:
Si l'on en trouve plus, c'est par un cas fortuit.
L'on a cent mauvais jours pour une bonne nuit.
La plus grande douceur qu'on trouve au mariage',
Ne vient que de l'efpoir, qu'on conçoit du veuvage;
Et rien ne doit jamais y faire confentir,

Que pour avoir un jour le plaifir d'en fortir.
Quoi, s'attacher toûjours à la même perfonne!
Ne la pouvoir quitter que la mort ne l'ordonne !
Attendre fon bonheur d'un funefte trépas!
Et voir inceffamment ce que l'on n'aime pas!
Nourrir mille chagrins, mille remors dans l'ame,
Et mourir de dépit de voir vivre une femme!
J'aime trop mon repos, pour vouloir m'expofer
A toutes les douleurs qu'un Hymen peut caufer.
Un contrât me déplaît, on fait mieux fon affaire
Sans l'avis d'un Curé, ni le fein d'un Notaire.

G

Quand

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