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huit siècles seulement, et lorsque la rivalité leur a mis une dernière fois les armes à la main au sortir d'un bal de l'Opéra. Dans le cours des transmigrations successives de ces deux âmes jumelles, le Franc est venu se mêler à la lutte, mais son rôle est indécis, et après avoir dominé avec Mérovée, il disparaît complétement. Parmi les épisodes de l'histoire de Paris, il en est de première importance qui ont été négligés par l'auteur, tel est ce fameux siége de Paris par les Normands; parmi les grandes personnalités, il en est qui n'ont pu trouver place dans le cadre, ou que l'auteur semble avoir oubliés à dessein, tels sont Charlemagne, Philippe-Auguste, Saint-Louis, Richelieu et bien d'autres plus considérables dans l'histoire que Molière, auquel on fait jouer une scène impossible devant un Louis XIV ridicule. Enfin, avec une affectation indigne d'une intelligence aussi distinguée que celle de l'auteur, il semble que dans tout ce qui touche à la monarchie un choix ait été fait des épisodes qui pouvaient en rendre le souvenir odieux et qu'au contraire on ait dissimulé d'une main partiale les crimes de la Révolution française. Ainsi le fait monarchique dominant de la pièce de M. Meurice, c'est la Saint-Barthélemy, le fait révolutionnaire par excellence, c'est l'enrôlement volontaire. Nous ne sommes pas de ceux qui aiment à raviver des plaies saignantes et nous voudrions au contraire que l'on s'efforçat de les cicatriser par l'oubli, mais quand l'esprit de parti altere la vérité et prend toutes les armes pour attaquer les institutions du passé, à notre tour nous évoquons nos souvenirs et nous nous rappelons avec horreur que la révolution avait érigé la délation en devoir et l'échafaud en principe. Dans tous les cas, puisque l'on voulait retracer dans des tableaux successifs l'histoire de Paris, il me semble que ses fastes contiennent assez de gloire pour fournir amplement au spectacle d'une soirée et qu'il eût été plus utile et plus patriotique de ne faire intervenir devant les étrangers que les plus nobles figures et les plus belles pages de nos annales.

Paris est un écart d'un homme de talent. Le Mariage d'Olympe en est un autre. Quel que soit l'esprit dépensé par M. Émile Augier, pour soutenir une donnée radicalement fausse dans son ensemble et plus encore dans ses détails, il ne nous est pas possible de compter ce drame que le théâtre du Vaudeville vient de représenter parmi les œuvres sérieuses de l'auteur. On a beaucoup abusé depuis quelque temps de la peinture d'un certain monde et de certaines femmes qui ne vivent et ne prospèrent qu'à Paris, en supposant qu'elles y prospèrent. Depuis la Dame aux Camélias jusqu'au Demi-Monde inclusivement, le cercle entier a été parcouru. Il restait à marier l'héroïne et à la tuer. Elle est morte, que la critique lui soit légère.

Désormais nous en avons l'espoir, nous ne verrons plus ces jeunes et charmants écrivains, esprits légers et faciles, endosser la robe de moraliste et coiffer le bonnet de docteur pour nous initier aux beautés de la morale et jeter l'anathème aux « pauvres créatures » du haut de leur incorruptible vertu. Laissons les vierges folles accomplir leurs tristes destinées, et sous prétexte de les réhabiliter ou de les flétrir n'embouchons pas la trompette de leur renommée. Si nous voulons être vraiment utiles aux mœurs, peignons les angoisses de Madeleine et son repentir. il y a là un beau sujet de drame que je recommande au talent de M. Emile Augier.

C'est par ce conseil que je veux aujourd'hui terminer ce rapide récit des petits événements que l'art a mis sous notre plume pendant cette dernière quinzaine, Nous en aurons désormais de plus graves et de plus sérieux à traiter, et sans négliger les choses de l'esprit qui sont toujours une des plus belles gloires de la France et une des raisons de sa force, nous allons entrer dans un ordre de faits et d'idées plus important sinon tout à fait plus élevé. Le domaine de la politique et de l'économie sociale nous est ouvert. Nous y apporerons toute notre indépendance, mais aussi tous nos principes conservateurstet préservateurs de la société. Jamais peut-être il n'a été plus besoin qu'au jourd'hui d'un haut enseignement politique et social; c'est ce haut enseignement, donné par les intelligences les plus fermes, par les hommes d'Etat les plus écoutés et les plus respectés, dont la Revue Contemporaine va devenir la chaire. Pour cela, elle n'a qu'à poursuivre, étendre et développer la tâche qu'elle s'était imposée lorsque nous fûmes appelé à prendre sa direction.

ALPHONSE DE CALONNE.

ALPHONSE DE CALONNE.

- Imprimerie française et anglaise de E. BRIÈRE et Ce, rue Sainte-Anne, 55,

Paris.

TABLE DES MATIÈRES DU VINGTIÈME VOLUME.

JUIN ET JUILLET 1855. (4° année.)

LE DRAME ET LA Légende d'Adam AU MOYEN-AGE, par M. Louis MOLAND.
UN ROMAN DU CARDINAL WISEMAN, par M. H. MARIE-MARTIN.

DE LA POÉSIE Utilitaire et d'une Poétique nouveLLE, par M. A. LACAUSSADE.
ÉTUDES SUR L'ART Judaïque. X-par M. F. DE SAULCY, de l'Institut

WERTHER, par M. SAINTE-BEUVE, de l'Acad. franç. .

LA BOURSE DE LONDRES, par M. PIERRE CLÉMENT, de l'Institut.

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5

39

71

97

148

166

BULLETIN LITTÉRAIRE : Livres français, par MM. FEUGÈRE, ÉMILE CHASLES, DE
BELLEVAL.

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STENDHAL, 2e partie, par M. F. CARO.

LE ROMAN EN 1855, par M. ARMAND DE PONTMARTIN
LES NIÈCES DE MAZARIN: 1re partie, par M. AMÉDÉE RENÉE.
LA NORVÈGE: 4 partie, par M. LOUIS ENAULT. . .
STANCES ET SONNETS, poésies, par M. Louis RATISBONNE.
LE THEATRE ANGLAIS A PARIS, I, par M. PHILARÈTE CHASLES.
BULLETIN LITTÉRAIRE, par MM. CHRISTIN et DE BELLEVAL.
CHRONIQUE DE LA QUINZAINE, par M. ALPH. DE CALONNE

WASHINGTON, par M. P. LORAIN.

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DES RELATIONS SOCIALES ET INTEllectuelles entre la France avec L'ANGLETERRE, par
M. E. J. B. RATHERY.

397

RÉFORME ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈre de l'Autriche DEPUIS 1848, par M. P. CLÉMENT, de l'Institut

416

SOUVENIRS DE L'Inde anglaise : CALCUTTA, par M. ALFRED DE BREHAT.
LES NIÈCES DE MAZARIN, 2e partie, par M. AMÉDÉE RENÉE.

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EXPOSITION UNIVERSELLE DES BEAUX-ARTS: PEINTURE, 1re partie, par M. ALPHONSE DE
CALONNE.

491

D'UN PROJET DE REMANIEMENT DE LA CARTE DE L'EUROPE, par M. EDMOND
ABOUT.

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RÉCEPTION DE M. DE SACY A L'ACADÉMIE FRANÇAISE, par M. GUILLAUME GUIZOT.
LE THEATRE ANGLAIS A PARIS, II, par M. PHILARÈTE CHAS LES.

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MOUVEMENT ET TENDANCES DE LA PHILOSOPHIE EN FRANCE, par M. E. CARO.
L'EMPEREUR FRÉDÉRIC II: 1re partie, par M. ALPHONSE DANTIER.

545

590

LA NORVÈGE.-V.-SCÈNES ET PAYSAGES, par M. LOUIS ÉNAULT.

623

Scanderbeg et L'ALBANIE, par M. le vicomte DE MEAU X.

665

LE LIVRE ANONYME D'UN HOMME CONNU, par M. R. DE FONTENAY.

683

EXPOSITION UNIVErselle des Beaux-ARTS: PEINTURE, 2e partie, par M. ALPHONSE DE
CALONNE .

695

BULLETIN LITTÉRAIRE, par MM. DE CHAMPAGNY, DE BOISSIEU, A. BONNEAU, J.
ANDRIEUX.

: 716

CHRONIQUE DE LA QUINZAINE, par M. ALPHONSE DE CALONNE.

730

DE LA

BIBLIOGRAPHIE FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE

No 6

Deux numéros par mois, le 15 et le 30
Prix de l'abonnement: 4 fr. par an.

PARIS, 15 JUIN, 1855.

1re ANNÉE.

ou 31. Chaque numéro une ou deux feuilles, 32 ou 64 colonnes. Paris, rue de Choiseul, 21.

NOUVELLES ET FAITS BIBLIOGRAPHIQUES

Une vente très importante vient d'avoir lieu

coloriées, ont été vendues 59 fr. Un grand nombrede catalogues d'estampes ne se sont pas élevés au prix que l'on aurait pu penser, il est cependant rare de les rencontrer avec les prix mar

à Londres, elle se composait de livres, d'auto-qués. graphes, et de gravures.

La Galerie du Palais-Royal, 3 vol., a été vendue 40 liv. 10 sch. Le Voyage en France et en Allemagne de Dildin, avec les gravures originales de Lewis, 168 liv. Audibras, 2 vol., 21 liv. La première édition des Drames de Shakspeare, seul exemplaire connu avec les cartons, 163 liv.

16 sch.

Deux manuscrits latins, Horo beatæ Mariæ Virginis, avec 15 miniatures, et Officiorum liber, avec 17 miniatures coloriées, sont montés, le premier à 30 liv. 10 sch., le second à 157 liv. 10 sch.

Le 19 juin aura lieu à la salle Silvestre la vente

des livres, autographes et manuscrits provenant Proverbes de Salomon, avec un envoi autographe du cabinet de M. M .. On remarque le livre des de Bossuet, les Coustumes de Valentiennes, et un assez grand nombre d'ouvrages latins. Parmi les manuscrits, une relation du voyage et des établissements des émigrés français dans l'Amérique du Nord; un journal sur les événements de 1811 et 1812 par M. Vatout, de l'Académie française, manuscrit in-fol. de 76. Parmi les autographes, une lettre de Marat.

La vente des autographes de M. Renouard doit avoir lieu le 27 juin, le catalogue est en Les autographes, quoiqu'ils fussent moins distribution chez MM. Laverdet et Potier. Cette nombreux que les livres, ont produit une somcollection renferme un grand nombre d'autcme plus considérable : la plupart étaient dans un très bon état de conservation. Une lettre de graphes précieux, on y remarque principalement Charles ler a été adjugée à 71 liv., une autre une lettre de l'abbé Berthélemy sur les antiquimoins étendue à 5 liv., une lettre de Strafford, tés d'Herculanum, un grand nombre de papiers écrite à sa femme quelque temps avant de mar-provenant de la Bastille, dix-sept lettres de Boscher au supplice, 40 liv. 10 sch., une signature suet à Mme d'Albert de Luynes, un billet autodu cardinal Wolsey, 8 liv. 2 sch, une lettre de graphe signé de Cléry, ainsi conçu : « Louis XVI Walter Scott, 8 liv., de Washington, 6 liv. 5 sch., « demande pour Me Elisabeth un office de la et de Byron, 4 liv. 15 sch. <«< nuit latin-françois, un office du jour en 7 ou «< 8 volumes, un manuel du chrétien qui con« tient les psaumes, les épitres, évangiles et

Les gravures n'ont pas été disputées avec un moins grand acharnement et cette vente qui a duré six jours, a produit une somme de 4,604 liv.« imitation de J.-C. » Une lettre de Frédéric II, une lettre de Grétry, relative à sa tragédie d'lphigénie, une collection de 1044 lettres de littérateurs italiens, deux lettres de Pascal.

5 ch. 6 den.

La vente de la bibliothèque de M. Duchesne aîné a été loin de produire une semblable somme, pourtant quelques volumes relatifs aux arts se sont élevés à un prix assez important. Ainsi l'un des 32 exemplaires des Jeux de cartes du quatorzième au dix-huitième siècle, ouvrage publié par la Société des bibliophiles français, est monté à 118 fr. Les Modes et manières de jouer à Paris à la fin du dix-huitième siècle et au commencement du dix-neuvième, avec les gravures

J. A.

ANALYSES ET CRITIQUE.
Histoire generalE DE L'ÉGLISE, depuis le commencement
de l'ère chrétienne jusqu'à nos jours, par M. l'abbé S.-
E. Darras; quatre volumes in-8°, Paris.

Nous nous sommes attachés, il y a quelques mois, à appeler l'attention du public sur un ouvrage dont le début nous paraissait révéler co

06

Ct G. DE CARAMAN.

NOTICE HISTORIQUE SUR LE SCEL COMMUNAL DE LA VILLE DE DUNKERQUE; par M. J. J. Carher. In-8°, Dunkerque, 1855.

taines qualités de recherches, de classification | laborieux qu'ont déjà encouragés, au surplus, intelligente, de rédaction claire et concise à la l'approbation de plusieurs prélats. M. l'abbé fois, et, en même temps, d'analyse et de style. Darras a su applanir les avenues d'une étude L'accomplissement soutenu de toutes ces con- sérieuse et compliquée; il en a rendu les abords ditions se constate également dans les trois der-faciles et attrayants. C'est un grand point pour niers volumes qui ont paru dans le courant de un ouvrage dont le sujet est l'un de ceux que cette année, et le jeune clergé, ainsi que les l'on étudie le moins de nos jours. hommes du monde qui désirent étudier l'histoire générale de l'Eglise, sans s'égarer dans les ncmbreux volumes de l'abbé Fleury, sont aujour d'hui en possession d'un livre qui peut guider leur intelligence et éclairer leur jugement. M. l'abbé Darras a rendu un grand service à ceux que rebutaient les longueurs souvent obscures des livres consultés jusqu'ici. Il serait difficile, dans ces courtes lignes, de donner une idée, mème approximative, de cet ouvrage, mais le lecteur, en jetant les yeux sur la table des matières, pourra se rendre compte de tout ce qu'il a fallu de soins, de temps et d'érudition pour coordonner les faits et grouper leurs conséquences dans une histoire qui se lie à celle de la plupart des Etats européens.

Ce qui fait que l'on n'accorde pas généralement aux travaux paléographiques l'attention qu'ils méritent, c'est que les auteurs ont le tort de supprimer tout préambule; et d'arriver « ex abrupto » aux points de détails qu'ils veulent étudier. Par ce procédé leurs ouvrages ne sont intelligibles que pour un petit nombre d'initiés; et le lecteur qui ne s'adonne pas d'ordinaire à ce genre d'étude s'arrête avec découragement.

M. Carlier, dans son travail sur le scel communal de Dunkerque, a évité ce défaut en débutant par un chapitre où il passe en revue les éléments de la sigillographie, d'une façon rapide, il est vrai, mais assez étendue pour mettre au courant le lecteur inexpérimenté; et trop courte pour que celui qui connaît à fond ces questions puisse se plaindre d'ètre ramené à l'a. b. c.

C'est ainsi qu'à la suite de ce que nous avons signalé précédemment comme caractérisant les premières époques, nous arrivons à la formation de l'Etat de l'Eglise sous Charlemagne, au pontificat de Grégoire VII, qui marque le début d'une longue lutte entre les empereurs et le Saint-Siége, origine des divisions de partis connues sous les dénominations de Guelfes et de Gibelins; aux croisades et à leur influence sur deux siècles; aux anti-papes, aux importants développements se rattachant au procès des Templiers; puis au grand schisme d'Occident, aux expéditions des Français en Italie, au règne de Léon V, immortalisé par la renaissance des arts, mais en même temps par l'invasion du protestantisme; au concile de Trente, qui règle et définit les croyances catholiques; à la célèbre déclaration de 1682, à la question des Jansénistes et à celle des Jésuites, qui a si long-qui supprima les armoiries des villes, pour les temps occupé l'Europe et fait naître des opinions si divergentes; enfin, à la remarquable transaction du dernier concordat, fait le plus important de la huitième époque.

Ce sont autant de points qui deviennent pour l'auteur l'objet de l'examen le plus consciencieux et de la plus intéressante discussion. Ses opinions évidemment prononcées comme ultramontaines (si cette qualification pouvait encore exister aujourd'hui, au moins dans son ancienne acception), s'appuient sur des considérations que chacun pourra admettre ou modifier suivant ses propres convictions à cet égard; mais nous ne craignons pas de dire que l'on se trouvera porté à rendre un juste hommage aux efforts

Puis s'aidant d'un nombre assez considérable de gravures, soigneusementexécutées, M. Carlier nous décrit le scel de Dunkerque en 1226, tel qu'il l'a retrouvé sur différentes chartes conservées aux archives de l'Empire, puis le contrescel à la fleur de lis, le scel à l'éfigie de saint Eloi, avec le contre-scel armorié; et dans les chapitres suivants les scels seigneuriaux et les vicissitudes des armoiries de Dunkerque. Des détails curieux et qui dénotent de minutieuses recherches nous amènent jusqu'à la Révolution,

remplacer par des cachets municipaux sur l'histoire desquels M. Carlier trouve encore la matière d'un chapitre.

Cette étude détaillée prouve que l'auteur est à même de nous donner un ouvrage étendu sur l'histoire de Dunkerque. Espérons qu'il ne la fera pas attendre trop longtemps.

J. ANDRIEUX.

HISTOIRE D'ALSACE, DEPUIS LES TEMPS LES PLUS RECULÉS

JUSQU'A NOS JOURS, par M. X. Boyer.

Nous ne pouvons que signaler aujourd'hui l'apparition de cet important ouvrage, dont cinq livraisons seulement, sur trente qu'il doit avoir, sont sous nos yeux. Ces livraisons ne nous mè

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