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de cérémonies païennes, reproches qu'ils auroient aussi adressés à la nôtre, s'ils avoient pensé à nous. Trompés par une religion négative et par un culte décharné, ils ont méconnu les formes éternelles d'une religion positive qui se retrouveront partout. Les voyageurs modernes ont trouvé en Amérique les Vestales, le feu nouveau, la circoncision, le baptême, la confession, et enfin la présence réelle, sous les espèces du pain et du vin.

Dirons-nous que nous tenons ces mêmes cérémonies des Mexicains ou des Péruviens? Il faut bien se garder de conclure toujours de la conformité à la dérivation subordonnée: pour que le raisonnement soit légitime, il faut avoir exclu précédemment la dérivation commune. Or, pour en revenir à la nuit et aux songes, nous voyons que les plus grands génies de l'antiquité, sans distinction, ne doutoient nullement de l'importance des songes, et qu'ils venoient même s'endormir dans les temples pour y recevoir des oracles (1). Job n'a-t-il

pas

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dit que Dieu se sert des songes pour avertir l'homme (1): AVIS QU'IL NE RÉPÈTE JAMAIS?

et David ne disoit-il pas, comme je vous le rappelois tout à l'heure, que Dieu visite les cœurs pendant la nuit? Platon ne veut-il pas qu'on se prépare aux songes par une grande pureté d'ame et de corps (2)? Hippocrate n'at-il pas composé un traité exprès sur les songes, où il s'avance jusqu'à refuser de reconnoître pour un véritable médecin celui qui ne sait pas interpréter les songes? Il me semble qu'un poète latin, Lucrèce si je ne me trompe (5), est allé plus loin peut être en disant que les dieux durant le sommeil parlent à l'âme et à l'esprit.

Enfin, Marc-Aurèle (je ne vous cite pas ici

(1) Semel loquitur Deus ( et secundò id ipsum non repetit) per somnium in visione nocturna,.... ut avertat komínem ab his quæ facit.( Job. XXXIII, 14, 15, 17.)'

(2) Cicer. de Divin. 1, 30.

(3) Non le vers est de Juvenal. En animam et mentem cum quả Dinocte loquantur!Juv. 531. (Note de l'Éditeur.)

un esprit foible) non-seulement a regardé ces communications nocturnes comme un fait incontestable, mais il déclare de plus, en propres ter mes, en avoir été l'objet. Que dites-vous sur cela, messieurs? Auriez-vous par hasard quelque envie de soutenir que toute l'antiquité sacrée et profane a radoté? que l'homme n'a jamais pu voir que ce qu'il voit, éprouver que ce qu'il éprouve? que les grands hommes que je vous cite étoient des esprits foibles? que.....

LE CHEVALIER.

Pour moi, je ne crois point encore avoir acquis le droit d'être impertinent.

LE SÉNATEUR.

Et moi, je crois de plus que personne ne pent acquérir ce droit, qui, Dieu merci, n'existe pas.

LE COMTE.

Dites-moi, mon cher ami, pourquoi vous ne rassembleriez pas une foule de pensées d'un genre très-élevé et très-peu commun qui vous

arrivent constamment, lorsque nous parlons métaphysique ou religion? Vous pourriez intituler ce recueil : Élans philosophiques. Il existe bien un ouvrage écrit en latin sous le même titre; mais ce sont des élans à se casser le cou : les vôtres, ce me semble pourroient soulever l'homme sans danger.

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LE CHEVALIER.

Je vous y exhorte aussi, mon cher sénateur; en attendant, messieurs, il va m'arriver, par votre grâce, une chose qui certainement ne m'est arrivée de ma vie : c'est de m'endormir en pensant au prophète-roi. A vous l'honneur!

FIN DU SEPTIÈME ENTRETIEN.

No I.

(Page 2. Cette grande extravagance humaine avec l'énergie que vous lui connoissez.)

« Si l'on vous disoit que tous les chats d'un grand pays se sont assemblés par milliers dans une plaine, et qu'après avoir miaulé tout leur saoul, ils se sont jetés avec fureur les uns sur les autres, et ont joué ensemble de la dent et de la griffe; que de cette mêlée il est demeuré de part et d'autre neuf à dix mille chats sur la place, qui ont infecté l'air, à dix lieues de là, par leur puauteur, ne diriez-vous pas : « Voilà le plus abomi"nable sabbat dont on ait jamais entendu parler, » et si les loups en faisoient de même, quels hurlemens! quelle boucherie! et si les uns et les autres vous disoient qu'ils aiment la gloire, ne ririez-vous pas de tout votre cœur de l'ingénuité de ces pauvres bêtes? » (La Bruyère.)

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(Pag. 14. C'est un de ces points où les hommes ont été constamment d'accord et le seront toujours.) Lycurgue prit des Egyptiens son idée de séparer les gens de guerre du reste des citoyens, et de mettre à part les marchands, artisans et gens de métier; au moyen

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