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tane; ils célèbrent la fête du petit Bayram ou la Pâque; ils immolent alors, de même que les Turcs, quelques moutons, en mémoire du sacrifice qu'Abraham voulut faire de son fils Ismaël; ils croient que ce fut ce dernier qui devait être immolé, et non pas Isaac. A Ispahan ils sacrifient un chameau avec de grandes cérémonies : ils prétendent que le patriarche immola un chameau au lieu d'un bélier.

Les sciences sont aujourd'hui bien déchues en Perse. La profession la plus estimée est celle de la médecine; mais elle est déparée par un mélange incohérent d'astrologie et de pratiques ridicules. produites par l'empirisme. Les médecins cependant suivent assez régulièrement les préceptes de Gallien et d'Avicenne. Le principal mérite des chirurgiens consiste à pratiquer la saignée. La peste n'est point étrangère à la Perse; les maladies les plus communes sont la goutte, la petite vérole, la consomption et surtout l'ophtalmie.

Les Persans ont l'esprit vif et le jugement sain. Appliqués à l'étude, ils réussissent parfaitement dans la poésie; ils sont féconds en pensées fines et ingénieuses. Ils s'attachent aussi à l'étude de la morale, du moins quant à la théorie; ils aiment à exprimer leurs idées d'une manière sententieuse, mais qui sent l'hyperbole. Ils écrivent comme les Hébreux, de droite à gauche et sur leurs genoux, parce qu'en Perse on n'a point l'usage des tables ni des siéges. Les Persans, dit Otter, voyageur très-estimé, ont l'esprit très-délié; ils réussissent dans les sciences, dans les arts, et généralement dans tout ce qu'ils entreprennent. Ils sont de bonne

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société, civils et polis envers les étrangers. Ils aiment le vin, les fètes, et le luxe, qu'ils ont porté aussi loin qu'aucune autre nation. Ils sont bons connaisseurs en tout, et il est difficile de les tromper: c'est ce qui fait que les juifs, qui, dans la Turquie, sont puissamment riches, sont fort misérables en Perse. »

Le langage persan est peut-être, de toutes les langues orientales, le plus vanté pour sa force, sa beauté et sa mélodie. Il est préféré pour la poésie et pour les compositions élégantes, au turc, qui est sec et dur, et à l'arabe, qui, quoique riche, est trop rempli de sons gutturaux.

PROVERBES PERSANS.

1. C'est tous les jours fête pour lui, ou Tous les jours sont pour lui New-Rouz. Ce mot en Persan signifie jour de l'an ou nouveau jour, qui correspond au 22 de mars. C'est ainsi que l'appelaient les anciens Persans. Lorsque ce jour arrive, les Persans modernes se font mutuellement de petits cadeaux, comme cela se pratique parmi nous, se livrent aux divertissemens et à la joie. Ces cadeaux se nomment new-rouzyah c'est-à-dire étrennes. Les Italiens les appellent la mancia delle buone feste. Ce fut, dit-on, un des premiers rois de Perse, nommé Dgiemschid, qui institua cette fête à l'occasion suivante : Faisant le tour de ses États, et étant arrivé dans l'Aderbaïdjân, il se plaça un jour sur un trône pour être vu de tout le peuple, qui, frappé de la dignité de sa personne et de l'éclat des pierreries

T. II.

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dont sa tête était ornée, s'écria: New-Rouz! NewRouz! c'est-à-dire, c'est aujourd'hui un nouveau jour pour nous.

2. La politesse est une monnaie destinée à enrichir non point celui qui la reçoit, mais bien celui qui la dépense. La véritable politesse consiste à paraître persuadé que les autres sont tels qu'ils se montrent. Elle les rend contens de nous et d'eux-mêmes.

3. S'il existe un homme sans passions, cet homme n'est pas fils d'Adam. Il existe cependant des hommes dont les passions sont assez paisibles pour échapper aux yeux de la malignité; ils sont, comme le flux et le reflux de la Méditerranée, presqu'insensibles.

4. Plus on pile l'ail, plus il sent mauvais; c'està-dire, plus on tarde à arranger une affaire, plus elle devient difficile.

5. La vie est une ivresse continuelle, le plaisir passe, le mal de tête reste. La vie est courte pour le plaisir des sens, et longue pour les regrets et le repentir.

6. La royauté éternelle appartient à Dieu seul. Ce proverbe rappelle un trait de la vie de Kosrou-Perwyz, roi de Perse. Ce prince, réfléchissant sur la fragilité de la vie, qui bientôt le priverait de l'empire, disait à Chyryn, sa maîtresse : Qu'y aurait-il de plus beau que la royauté, si elle était éternelle? Chyryn lui répondit : Si elle durait toujours, elle ne serait pas parvenue jusqu'à vous.

7. Plus on laisse de biens à ses héritiers, moins on laisse de regrets.

8. L'homme qui rend le bien pour le mal, ressem

ble à un arbre couvert de feuilles et de fruits, qui donne de l'ombre et du fruit à ceux-là même qui lui jettent des pierres.

9. Veux-tu faire croître le mérite, sème les récompenses; spes præmii laboris est solatium, l'espoir de la récompense soulage nos travaux.

10. Une once de vanité gâte un quintal de mérite. La vanité nuit à la vertu, même la plus consommée. Saadi, célèbre poète persan, se plaisait à raconter une aventure de sa jeunesse. «Je lisais le Qôran à ma famille assemblée; mes frères s'endormirent; je le fis remarquer à mon père en lui disant: Ils dorment, et je prie. Mon père m'embrassa tendrement, mais il me dit. Ne vaudrait-il pas mieux que tu dormisses comme eux, que d'être si glorieux de ce que tu fais? Je n'oubliai jamais la leçon de mon père.»

11. Quatre choses ne doivent pas nous flatter: la familiarité des princes, les caresses des femmes, le rire de nos ennemis, et la chaleur de l'hiver, car ces quatre choses sont de courte durée.

12. Celui qui sème des grains est aussi grand devant Ormusd, que s'il avait donné l'être à cent créatures. L'agriculture est encore aujourd'hui la principale profession des guèbres, les sectateurs de Zoroastre et les adorateurs du feu : ils pensent qu'elle est la plus chère à la divinité.

13. La fortune est une échelle; autant vous montez d'échelons, autant il vous en faudra descendre : ne vous fiez donc pas à une trompeuse qui ne vous élève que pour mieux vous précipiter, et qui souvent vous laisse tomber du faite où vous êtes parvenu, pour

vous briser par la chute. (Voir le prov. italien 101). Le poète persan Saadi se rencontre parfaitement, pour cette pensée, avec ces fameuses échelles de Pittacus que ce sage consacra sur l'autel de la fortune, qu'il fit représenter à Smyrne et à Lesbos sous les traits d'une vieille femme portant sur une main un pot plein de feu et sur l'autre un vase rempli d'eau. A sa droite, il fit peindre une échelle chargée d'enfans qui montent, et à sa gauche, une seconde échelle d'où descendent d'autres enfans. Ceux qui s'élèvent paraissent infatigables et gais; l'éclair de l'espérance brille dans leurs yeux. Ceux au contraire qui reviennent à terre sont tristes et versent des larmes. D'autres enfans, un peu plus grands, placés en bas entre les deux échelles, applaudissent leurs compagnons de la droite, et se moquent de leurs camarades de la gauche. Les mêmes idées se retrouvent aux deux extrémités opposées de la terre.

14. Baise la main que tu ne peux couper. Les Persans, persuadés que la justice n'a d'autres règles que la volonté du prince, flattent sans pudeur l'homme puissant qui les opprime, et mettent souvent en pratique cette maxime hypocrite qui est devenue proverbiale chez eux.

15. Lorsque le prince cueille un fruit, l'esclave arrache l'arbre. Cette maxime de Nourschirvan veut peindre le mauvais effet de l'exemple. Les courtisans dépassent toujours le cercle des manières et des volontés des princes, par l'effet de la servilité de leur nature, qui, étant retenue en prison par la honte et la crainte de déplaire, est mise en liberté par l'exemple.

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