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même fait penser à quelques médecins que le pont de Varole jouait un rôle très-important dans les actes intellectuels. Mais il peut être complétement détruit sans que l'intelligence soit le moins du monde altérée. Les troubles psychiques doivent donc être attribués à d'autres causes. On a invoqué entre autres la compression qui peut retentir jusque sur les lobes cérébraux. On s'est appuyé sur ce que ces troubles ont surtout été observés dans les cas de tumeurs; et comme les dégénérescences même volumineuses du cervelet ne produisent jamais, ou à peu près jamais, d'altérations de l'intelligence, on a dit que cela tenait à la présence de la tente du cervelet qui gênait la transmission de la pression, tandis que le même bouclier n'existe pas entre la protubérance et les lobes cérébraux. De son côté, Brown Sequard prétend que la 'protubérance peut retentir sur les fonctions intellectuelles par l'intermédiaire des vaso-moteurs. Ceux-ci, en se rendant du bulbe au cerveau et au cervelet, se trouveraient irrités ou paralysés à leur passage à travers la protubérance. D'où exaltation ou affaissement intellectuel. Enfin, d'après le système de Luys, l'état d'irritation des cellules sensitives de la protubérance pourrait titiller les couches optiques, y faire naître des hallucinations qui à leur tour solliciteraient un travail erroné dans les cellules des couches corticales du cerveau. Je crois qu'il y a lieu de tenir compte de toutes ces causes, même de celles fournies par l'innervation vaso-motrice. Car il est évident que, quand même les cellules à destination vasculaire seraient concentrées dans le bulbe et dans la moelle, elles auraient encore besoin d'être reliées au cerveau, puisque les capillaires obéissent aux émotions morales. J'ajouterai que parfois il a dû y avoir concomittance d'altérations des lobes cérébraux eux-mêmes. Bien des cas de ce genre ont dû échapper, car on regarde encore aujourd'hui généralement la folie comme une maladie sine materia, et cependant le microscope tend de plus en plus à faire abandonner cette opinion.

Troubles de la digestion. Du côté des voies digestives, Brown Sequard a signalé les envies de vomir. Mais si on étend le champ de son observation, on s'aperçoit bien vite que ce symptôme est au contraire très-rare; lorsqu'il existe il doit être évidemment attribué à un retentissement plus ou moins direct sur le pneumo-gastrique ou sur les fibres encéphaliques de ce nerf. En général, la digestion n'est guère troublée que dans ses fonctions de la mastication et de la déglutition. Le nerf masticateur appartient à la protu

bérance; il n'est donc pas étonnant que l'acte que fait accomplir ce nerf puisse être plus ou moins entravé. La dysphagie que l'on observe beaucoup plus fréquemment n'est pas aussi facile à expliquer; car la déglutition est surtout dirigée par les nerfs grand hypoglosse, glosso-pharyngien et pneumo-gastrique, dont les noyaux d'origine se trouvent dans le bulbe. Seux a prétendu et Larcher a admis avec lui que les maladies de la protubérance agissaient en interrompant la communication de ces nerfs avec le centre volontaire. Le mésencéphale étant altéré dans sa constitution, disent-ils, l'incitation volontaire émanée des lobes cérébraux s'arrête fatalement à son niveau, et ne peut pas plus se transmettre aux nerfs indiqués qu'aux cordons nerveux du bras ou de la jambe, lorsque ces membres sont paralysés. C'est une profonde erreur; car dans la déglutition la partie afférente à ces nerfs constitue un phénomène réflexe dans toute l'acception du mot, dans lequel le cerveau n'a nullement à intervenir. Les deux derniers temps de la déglutition s'opèrent parfaitement chez les animaux auxquels on a enlevé les lobes cérébraux, même chez ceux auxquels on n'a laissé que le bulbe et la moelle. Il faut donc que ces nerfs soient altérés eux-mêmes par voisinage ou qu'il y ait d'autres éléments de perturbation. Il y a d'abord, pour le premier temps, la perte de la sensibilité directrice de l'action réflexe. C'est le trijumeau qui fournit ici les renseignements nécessaires aux centres moteurs. Il y a surtout la paralysie du voile du palais qui joue un rôle si important dans cet acte mécanique. Les muscles affectés à cette membrane sont animés par le facial, pour quelques-uns même par le trijumeau. Or, le facial est si souvent compromis dans le département des muscles de la face qu'il doit l'être aussi parfois dans ses rameaux staphylins, malgré l'interposition d'un ganglion. La 7e paire peut aussi être invoquée pour les muscles digastrique, styloglosse et stylo-hyoïdien auxquels il envoie des filets concurremment avec d'autres nerfs.

Troubles de la respiration. Les hémorrhagies considérables de la protubérance s'accompagnent ordinairement d'une respiration stertoreuse et la scène se termine presque toujours par une asphyxie complète. C'est ce qui avait conduit H. Bell à déclarer que les morts par asphyxie rapide et spontanée devaient toujours être attribuées à cette partie de l'encéphale. Mais il est trop bien établi que le centre respiratoire appartient au bulbe, pour qu'on puisse avoir, même un instant, l'idée de l'en dépouiller au bénéfice de la protu

bérance. Il est évident que ces phénomènes dépendent uniquement du voisinage du bulbe. C'est d'autant plus probable qu'on les observe surtout lorsque l'épanchement s'est fait jour dans le 4° ventricule et va forcément comprimer immédiatement le nœud vital. Mais même quand il reste confiné dans la protubérance, même quand il n'acquiert pas un très-grand volume, le bulbe se trouve encore compromis, comme congestion ambiante. Ce n'est même qu'en raison de ce voisinage que les apoplexies du mésocéphale sont toujours plus graves que celles du cerveau. Car, par la constitution de la protubérance, elles n'ont en réalité qu'une condition fâcheuse de plus, c'est de pouvoir amener une paralysie générale, tandis que celles des lobes cérébraux ne déterminent qu'une hémiplégie. Mais une paralysie généralisée ne détruit que les actes de la locomotion. Elle ne compromet pas immédiatement l'existence. Si la mort survient presque toujours fatalement, c'est qu'à deux pas se trouve le foyer nerveux de la fonction la plus indispensable à la vie, et ce foyer a bien plus de chances de subir rapidement l'influence comprimante ou congestionnante d'un noyau hémorrhagique qui siége dans la protubérance que de celui qui se trouve plus loin dans le cerveau. Tout se passe ici comme avec le chloroforme. Tant que l'intelligence est seule pervertie, on peut être tranquille; mais quand l'intoxication du mésocéphale a aboli la sensibilité, il faut se tenir sur ses gardes, parce qu'en un instant le bulbe va lui-même céder. On a fait remarquer que dans les ramollissements, alors que l'on ne peut songer à un effet de compression, on constatait très-souvent une gêne permanente de la respiration. Mais qui sait où s'arrête réellement un travail de ramollissement? Le microscope nous le fait voir effectué, mais autour n'y a-t-il pas d'autres phases préparatoires que l'investigation ne sait pas encore apprécier? S'il se produit par embolie, la circulation bulbaire se trouve aussi certainement au moins gênée. Le bulbe est comme anémié et fonctionne mal. Si c'est un ramollissement inflammatoire, la congestion s'étend évidemment au delà de la partie réellement ramollie. D'où un nouveau genre de cause de trouble. Toutes ces modifications de voisinage sont lentes et graduelles. D'où simplement une gêne comme dans les maladies chroniques du bulbe. Mais, comme dans ces dernières, il vient un moment où tout se précipite, et alors l'asphyxie devient brusque. C'est pour les mêmes raisons que Brown Sequard a pu signaler la fréquence de la pneumonie et de l'asthme.

Troubles circulatoires, calorifiques et urinaires. Je ne fais figurer ici la circulation que parce que Brown Sequard a assuré qu'en piquant même légèrement la protubérance, on déterminait une diminution considérable des battements du cœur, et parce que Jobert de Lamballe a observé une fois dans l'espèce humaine une semblable diminution, s'accompagnant en outre d'alternatives de pâleur et de rougeur de la face, il est évident que l'appareil nerveux de la circulation reste circonscrit dans la moelle et dans le bulbe et qu'il ne s'étend pas plus haut. L'encéphale n'a sur lui qu'une influence de réaction, et si la protubérance a sous ce rapport quelque chose de plus que le cerveau, ce n'est encore qu'en raison de sa proximité du bulbe.

Quant à la calorification, Gubler a trouvé parfois dans les membres paralysés une température supérieure à la température normale. Brown Sequard s'est appuyé sur ce fait pour déclarer que la protubérance fait tout au moins partie de l'appareil vaso-moteur et qu'elle exerce sous ce rapport une action croisée.

Enfin, du côté de la sécrétion urinaire, Potain a rencontré de la polyurie et Gubler de l'albuminurie. Si la protubérance peut retentir sur le bulbe de façon à faire naître des troubles de la respiration, il n'y a pas de raisons pour qu'elle ne puisse pas l'entraîner à produire ces modifications dans la composition de l'urine.

VINGT-NEUVIÈME LEÇON.

Physiologie pathologique spéciale.

MESSIEURS,

Je vais rattacher à l'histoire de la protubérance l'analyse physiologique de l'épilepsie, du tétanos, de la paralysie agitante et de la catalepsie. Je ne regarde cependant pas cette partie de l'encéphale comme le siége spécial et exclusif de ces maladies qui ont en réalité un théâtre beaucoup plus vaste et comprenant la presque totalité de l'axe nerveux. Ces quatre affections sont des modes pathologiques de l'appareil nerveux moteur. Ce sont des maladies de la locomotion et de la station. Par conséquent elles supposent presque toujours l'intervention simultanée de la moelle, du bulbe, du cervelet, de la protubérance et même du corps strié. Si je les rapporte au nœud de l'encéphale, c'est uniquement parce qu'il est le point où les actions de ces diverses parties viennent se combiner entre elles pour réaliser l'œuvre commune. Dans l'ordre pathologique comme dans l'ordre physiologique, la protubérance constitue le pivot des opérations complexes de la locomotion.

Épilepsie.

Sommaire descriptif. - C'est une maladie convulsive qui suppose presque toujours une prédisposition héréditaire. Celle-ci est loin de se manifester à travers les générations sous une seule et même forme. Le plus souvent, quand le fils est atteint d'épilepsie, le père a eu une maladie mentale ou d'autres troubles cérébro-spinaux, qui généralement ont été l'œuvre d'une intoxication alcoolique. Cette prédisposition existant, il faut encore pour l'apparition des premières manifes

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