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jamais chez les autres mammifères. Au microscope, on reconnaît que cette teinte générale est due à ce que les cellules renferment une grande quantité de pigment d'un brun noir. Quelques-unes de ces cellules ont une forme polygonale et possèdent des prolongements multiples. La plupart sont ovoïdes et ont seulement un prolonge

Fig. 42.

b

a, trois cellules prises dans le locus niger. b, trois cellules prises dans les tubercules quadrijumeaux.

ment à chaque extrémité de leur grand axe. Ces prolongements paraissent ne pas se ramifier ultérieurement. Au centre même de l'étage moyen se trouve un second amas de substance grise beaucoup moins riche en pigment. Il ne forme même pas une couche continue; il se mélange avec la substance blanche, sur laquelle il produit un véritable piqueté. Il en résulte une teinte mixte qui est très-faible et qui fait que l'existence de ce second amas échappe facilement à l'observateur. C'est évidemment la continuation de la formatio reticularis, qui prend naissance dans le bulbe et qui se propage, à travers la protubérance et le pédoncule cérébral, jusque dans la couche optique. C'est la colonne grise centrale de la moelle qui se dissocie et s'épanouit à partir du bulbe. Enfin, entre l'étage moyen et l'étage supérieur, se trouve une nappe de substance continue qui concourt à limiter l'aqueduc de Sylvius et qui fait suite à la couche tapissant le plancher du quatrième ventricule. Chaque pédoncule renferme en outre le noyau d'origine d'un des deux nerfs moteurs oculaires communs. Ceux-ci émergent de la ligne séparant les étages inférieur et moyen. Leurs racines vont se perdre les unes dans l'étage moyen, d'autres dans l'étage inférieur, d'autres dans le locus niger.

Physiologie normale.

Nos connaissances sur ce sujet se réduisent à fort peu de chose. Comme faits expérimentaux, on sait seulement que les pédoncules cérébraux sont à la fois très-sensibles et

très-excitables, c'est-à-dire que, lorsqu'on les irrite d'une manière quelconque, l'animal pousse des cris de douleur et exécute des mouvements convulsifs plus ou moins généraux. On sait aussi que la - section complète de l'un d'eux paralyse tous les muscles de la moitié opposée du corps et que si on coupe les deux pédoncules, on détermine une paralysie générale. On sait enfin qu'en coupant seulement quelques-unes des fibres antérieures d'un seul pédoncule, on produit un mouvement de manége qui tend à se transformer en une rotation en rayon de roue, au fur et à mesure qu'on se rapproche de la protubérance. On constate en même temps la déviation des yeux et du nystagmus.

Comme fonction, on ne voit en eux, généralement, avec Longet, que des moyens d'union entre le centre intellectuel et les agents du mouvement et de la sensibilité; que des conducteurs chargés de transmettre aux muscles, par l'intermédiaire de l'isthme de l'encéphale et de la moelle, tous les ordres de la volonté, et de transmettre au cerveau les impressions sensorielles, afin que les perceptions puissent s'élever à la hauteur de sensations. Évidemment, ce double rôle presque passif existe. Il s'impose même à la raison, car ces faisceaux constituent l'unique voie matérielle, par laquelle puissent s'établir les relations incontestables qui ont lieu continuellement entre les actions du centre psychique et celles des centres moteurs et sensitifs. Mais là ne doit pas se borner le fonctionnement des pédoncules. A cette mission de simple conductibilité se joint certainement une mission de production propre. Ils sont non-seulement des conducteurs, mais encore des foyers d'innervation. Rien que leur richesse en substance grise le prouve. Mais il est impossible, pour le moment, de connaître la portée de cette action centrale. Vient-elle, comme le veut Luys, compléter le travail du cervelet, en faisant partie du système cellulaire, qu'il appelle substance cérébelleuse périphérique, et dans lequel viendraient aboutir les fibres des pédoncules cérébelleux? C'est très-possible, mais on ne peut pas l'assurer. Tout ce qu'on peut regarder comme certain, c'est que le pédoncule cérébral est un foyer de force motrice pour la plupart des mouvements du globe oculaire, puisqu'il renferme le noyau d'origine du moteur oculaire

commun.

Physiologie pathologique générale. Elle ne pourra être établie que sur un très-petit nombre de faits, car je n'ai pu trouver, dans les annales de la science, que six observations où l'altération matérielle

se trouvait parfaitement limitée au pédoncule cérébral; celle de Weber, où l'autopsie montra un foyer apoplectique dans la portion interne et inférieure du pédoncule gauche; celles d'Andral et de Green, qui rencontrèrent tous deux une hémorrhagie du pédoncule droit; celle de Goodfellow, où il s'agit d'une sclérose totale du pédoncule gauche; celle de Gull, qui trouva un cancer du pédoncule droit; enfin celle de Parrot, où il y eut un tubercule du pédoncule droit. Mais, dans ces six cas, la symptomatologie offrit une physionomie tellement constante et tellement en rapport avec les quelques enseignements que nous devons à la physiologie expérimentale, qu'on peut arriver à des conclusions aussi positives que si elles étaient étayées sur un grand nombre de faits. On peut donc déclarer sans la moindre hésitation que :

1o Les maladies des pédoncules ne troublent en rien les facultés intellectuelles. L'intelligence reste parfaitement intacte. Cela devait être, puisqu'il sera démontré plus tard que l'élaboration des idées s'effectue exclusivement dans la substance corticale des lobes cérébraux, et puisqu'en perdant les liens qui le rattachent aux autres parties de l'encéphale, le cerveau ne se trouve privé que du droit d'imposer ses volontés au système musculaire.

2o Lorsque la lésion est assez considérable pour détruire entièrement un des pédoncules cérébraux ou pour enrayer complétement son fonctionnement, il en résulte toujours une paralysie des muscles de la moitié opposée du corps, c'est-à-dire qu'il y a une hémiplégie croisée. Cela pouvait être prévu, puisque les conducteurs du mouvement s'entrecroisent au delà, dans l'isthme de l'encéphale. Sous ce rapport, les pédoncules ne pouvaient se conduire que comme nous verrons le cerveau le faire généralement.

3o Dans les mêmes conditions, la sensibilité générale se trouve éteinte du même côté que le mouvement, c'est-à-dire que la paralysic du sentiment s'opère aussi d'une manière croisée. Cet effet croisé devait se produire à fortiori, puisque c'est plus bas encore, dans la moelle elle-même, que s'opère l'entrecroisement des conducteurs de la sensibilité. La perte de la sensibilité générale semble un fait en désaccord avec la physiologie expérimentale, puisque l'animal auquel on a enlevé tout ce qui est en avant de la protubérance crie encore lorsqu'on le pince. Mais lorsque le pédoncule est altéré, nonseulement les impressions ne peuvent plus arriver dans la couche optique où la perception se complète réellement; mais la lésion se

trouve trop près de la protubérance pour que celle-ci ne soit pas elle-même gênée dans son fonctionnement. D'ailleurs, il y a au-dessus de tout cela une condition générale qui fera que l'insensibilité se montrera encore lorsque la lésion sera dans les lobes cérébraux au delà des couches optiques : c'est une solidarité de nature mécanique de toutes les parties de l'encéphale, en vertu de laquelle elles subissent toutes les pressions développées dans l'une d'elles.

4° Les sensibilités visuelle et auditive semblent conservées chez tous les malades. Pour la vision, cette immunité s'explique très-bien du moment où on admet que le centre visuel se trouve dans la couche optique. Il y a même là un argument accessoire à ajouter, en faveur de cette localisation, à ceux que nous signalerons plus tard, puisqu'il serait assez bizarre que les tubercules quadrijumeaux auxquels Longet a voulu attribuer ce genre de sensibilité, et qui font, pour ainsi dire, partie des pédoncules, échappent ainsi constamment à leurs lésions. Avec un centre visuel situé dans la couche optique, le nerf de ce nom n'a besoin de contracter aucun rapport avec les pédoncules, et dès lors la vision ne peut plus être compromise que par une généralisation de la compression, aux effets de laquelle la couche optique est moins exposée que la protubérance quand la lésion siége dans le pédoncule. Quant au sens de l'ouïe, on comprend beaucoup moins sa conservation. Car, même en plaçant, comme nous le ferons, le centre de sensibilité auditive dans la couche optique, ce centre ne peut communiquer avec le nerf acoustique que par l'intermédiaire du pédoncule cérébral. Mais notez que, dans les cinq observations, il n'y eut jamais qu'un seul pédoncule compromis, et si un malade s'aperçoit facilement qu'il voit moins clair d'un œil, il peut rester longtemps sans se douter qu'il n'entend pas aussi bien des deux oreilles.

5o La parole peut être gênée et même indistincte, tout justement parce que les fibres encéphaliques du grand hypoglosse et du facial font nécessairement partie du pédoncule; et si ces troubles de l'articulation ne sont pas constants, cela tient à ce que ces fibres n'occupent qu'un point de la masse pédonculaire et à ce que ce point n'est pas toujours englobé dans l'altération.

6o Les altérations spontanées des pédoncules ne donnent pas lieu, comme les vivisections, à des phénomènes de rotation. Cependant, Parrot a signalé une rotation de la tête du côté de la lésion. Ce fait semble infirmer la loi que Prévost a voulu poser et d'après laquelle

la déviation de la tête, dans les maladies du cerveau, se ferait presque toujours du côté de la lésion, et dans les maladies de l'isthme de l'encéphale, toujours du côté opposé.

7° Il se produit constamment dans l'appareil moteur de la vision des troubles qui relèvent de la 3e paire, à laquelle les pédoncules donnent naissance. Ces troubles sont unilatéraux et ont toujours lieu du côté correspondant au pédoncule malade, par conséquent du côté opposé à celui où siégent les troubles moteurs du corps. Autrement dit l'hémiplégie due à une lésion pédonculaire est toujours alterne, et l'alternance s'établit entre les muscles du corps et ceux de l'orbite qui sont animés par le moteur oculaire commun. Cela s'explique par le fait même que ce nerf prend naissance sur le pédoncule qui est situé du même côté que l'orbite dans lequel il se rend. Ces troubles consistent, ainsi que la distribution de la 3o paire peut le faire supposer à priori, en un strabisme externe dû à ce que le tonus du muscle droit externe n'est plus contre-balancé par celui du droit interne, en une dilatation de la pupille due à ce que les fibres circulaires de l'iris sont paralysées, en une grande difficulté d'accommodation due à ce que le muscle de Baumann est aussi atteint de paralysie, enfin en un prolapsus de la paupière supérieure, dû à ce que l'orbiculaire ne trouve plus dans le releveur de la paupière l'antagonisme habituel. Ces différents symptômes n'apparaissent pas toujours en même temps, mais, tôt ou tard, toutes les branches de la troisième paire sont atteintes de paralysie.

DES TUBERCULES QUADRIJUMEAUX.

Constitution anatomique. Sous le nom de tubercules quadrijumeaux, on désigne les quatre petits renflements arrondis qu'on aperçoit sur la face supérieure des pédoncules cérébraux. Ils sont placés sur deux rangs, ce qui a permis de les distinguer en antérieurs et en postérieurs. Les antérieurs prennent aussi le nom de nates et les postérieurs celui de testes. Les premiers sont plus volumineux que les seconds et offrent une teinte grise à leur surface. Les seconds sont plus arrondis, plus nettement limités et se distinguent en outre des précédents par leur teinte blanche. On constate à l'œil même que les tubercules droits et gauches sont reliés entre eux par des fibres transversales destinées à harmoniser le fonctionnement de ces

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