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qu'il paraiffait trop hardi à un particulier de réclamer. Quelque temps après, l'erreur de 1701 fut reconnue ; on fe dédit, et la terre fut alongée par une jufte conclufion tirée d'un faux principe. La méridienne fut continuéc fur ce principe, de Paris à Dunkerque; on trouva toujours les dégrés du méridien plus petits en allant vers le Nord. Environ ce tempslà, des mathématiciens qui fefaient les mêmes opérations à la Chine, furent étonnés de voir de la différence entre leurs degrés, qu'ils penfaient devoir être égaux, et de les trouver après plufieurs vérifications plus petits vers le Nord que vers le Midi. C'était encore une puiffante raison pour croire le fphéroïde oblong, que cet accord des mathématiciens de France et de ceux de la Chine. On fit plus encore en France, on mefura des parallèles à l'équateur. Il est aifé de comprendre que fur un sphéroïde oblong, nos degrés de longitude doivent être plus petits que fur une fphère. M. Caffini trouva le parallèle qui paffe par Saint-Malo plus court de mille trente-sept toises, qu'il n'aurait dû être dans l'hypothèse d'une terre fphérique. Ce degré était donc incomparablement plus court qu'il n'eût été fur un fphéroïde à pôles aplatis.

Toutes ces fauffes mefures prouvèrent qu'on avait trouvé les degrés comme on avait voulu les trouver elles renversèrent pour un temps

:

en France la démonftration de Newton et d'Huyghens; et on ne douta pas que les pôles ne fuffent d'une figure toute oppofée à celle dont on les avait crus d'abord.

Enfin les nouveaux académiciens qui allèrent au cercle polaire en 1736, ayant vu par d'autres mesures que le degré était dans ces climats beaucoup plus long qu'en France, on douta entre eux et MM. Caffini. Mais bientôt après on ne douta plus, car les mêmes aftronomes qui revenaient du pôle examinèrent encore ce degré mefuré, en 1677, par Picard, au nord de Paris; ils vérifièrent que ce degré eft de cent vingt-trois toifes plus long que Picard ne l'avait déterminé. Si donc Picard, avec fes précautions, avait fait fon degré de cent vingt-trois toifes trop court, il était trèsnaturel qu'on eût enfuite trouvé les degrés vers le Midi plus longs qu'ils ne devaient être. Ainfi la première erreur de Picard, qui fervait de fondement aux mefures de la méridienne, fervait auffi d'excufe aux erreurs prefque inévitables que de très - bons aftronomes avaient pu commettre dans ce grand ouvrage. Les académiciens, revenus du pôle, avaient pour eux dans cette dispute la théorie et la pratique. L'une et l'autre furent confirmées par un aveu que fit, en 1740, à l'académie, le petit-fils de l'illuftre Caffini, héritier

du mérite de fon père et de fon grand-père. Il venait d'achever la mesure d'un parallèle à l'équateur; il avoua qu'enfin cette mefure prise avec tout le foin qu'exigeait la difpute, donnait la terre aplatie. Cet aveu courageux doit terminer la querelle honorablement pour tous les partis. On voit par tant de mefujes différentes combien il eft aifé de fe tremper. L'épaiffeur d'un cheveu fur notre planète répond dans le ciel à des millions de lieues. Newton était bien plus affuré de l'aplatiffement du pôle par fes démonftrations, qu'on ne peut l'être de la quantité de cet aplatissement avec le fecours des meilleurs quarts de cercles.

:

Au refte, la différence de la sphère au fphéroïde ne donne point une circonférence plus grande ou plus petite : car un cercle changé en ovale n'augmente ni ne diminue de fuperficie. Quant à la différence d'un axe à l'autre, elle n'eft pas de fept lieues différence immense pour ceux qui prennent parti, mais infenfible pour ceux qui ne confidèrent les mesures du globe terreftre que par les usages utiles qui en réfultent. Il n'y a aucun géographe qui pût dans une carte faire apercevoir cette différence, ni aucun pilote qui pût jamais favoir s'il fait route fur un fphéroïde ou fur une fphère. Mais entre les mesures qui fefaient le fphéroïde oblong, et celles qui le fefaient

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aplati, la différence était d'environ cent lieues; et alors elle intéreffait la navigation. (25)

CHAPITRE X.

DE LA PERIODE DE VINGT-CINQ MILLE
NEUF CENTS VINGT ANNÉES, CAUSÉE
PAR L'ATTRACTION.

Mal-entendu général dans le langage de l'aftro-
nomie. Hiftoire de la découverte de cette
période, peu favorable à la chronologie de
Newton. Explication donnée par des Grecs.
Recherches fur la caufe de cette période.

Si la figure de la terre eft un effet de la gravitation, de l'attraction, ce principe puissant de la nature eft auffi la caufe de tous les mouvemens de la terre dans fa courfe annuelle.

(25) Il eft bon de remarquer que fi l'obfervation et la théorie s'accordent à montrer que la terre eft aplatie vers les pôles, l'on ne peut rien prononcer encore avec exactitude fur la quantité de fon aplatiffement, qu'il eft impoffible d'accorder même et les mefures des degrés entre elles, et les réfultats des expériences fur les pendules, fans fuppofer à la terre une forme irrégulière. Ceux qui défireraient d'être éclairés fur cette grande queftion, doivent lire les différens mémoires que M. d'Alembert a donnés fur cet objet. On y verra que la queftion eft beaucoup plus compliquée que la plupart des géomè tres ne l'avaient pensé; et on y trouvera en même temps et les principes néceffaires pour la réfoudre, et des remarques utiles pour éviter de fe laiffer entraîner à des conclufions incertaines et trop précipitées.

Elle a dans cette course un mouvement dont la période s'accomplit en près de vingt-fix mille ans; c'eft cette période qu'on appelle la préceffion des équinoxes; mais pour expliquer ce mouvement et sa cause, il faut reprendre les chofes d'un peu plus loin.

Le langage vulgaire, en fait d'aftronomie, n'eft qu'une contre-vérité perpétuelle. On dit que les étoiles font leur révolution fur l'équateur, que le foleil chaque jour tourne avec elles autour de la terre, d'Orient en Occident; que cependant les étoiles, par un autre mouvement oppofé au foleil, tournent lentement d'Occident en Orient; que les planètes font ftationnaires et rétrogrades. Rien de tout cela n'eft vrai; on fait que toutes ces apparences font caufées par le mouvement de la terre. Mais on s'exprime toujours comme fi la terre était immobile, et on retient le langage vulgaire, parce que le langage de la vérité démentirait trop nos yeux et les préjugés reçus, plus trompeurs encore que la vue.

Mais jamais les aftronomes ne s'expriment d'une manière moins conforme à la vérité, que quand ils difent dans tous les almanachs: Le foleil entre au printemps dans un tel degré du bélier; l'été commence avec le figne du cancer; l'automne avec la balance. Il y a long-temps que tous ces fignes ont de nouvelles places

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