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point un verre convexe, l'eau n'eft pas le feul élément qui dans les épaiffeurs diverses donne diverfes couleurs; l'air fait le même effet ; feulement les anneaux colorés qu'il produit entre les deux verres, ont plus de diamètre que ceux de l'eau. Il y a donc une proportion fecrète établie par la nature entre la force des parties conftituantes de tous les corps, et les rayons primitifs qui colorent les corps; les lames les plus minces donneront les couleurs les plus faibles; et pour donner le noir il faudra juftement la même épaiffeur, ou plutôt la même ténuité, la même mincité qu'en a la petite partie fupérieure de la boule de favon, dans laquelle on apercevait un petit point noir, ou bien la même ténuité qu'en a le point de contact du verre convexe et du verre plat, lequel contact produit auffi une tache noire.

Mais, encore une fois, qu'on ne croie pas que les corps renvoient la lumière par leurs parties folides, fur ce que les couleurs dépendent de l'épaiffeur des parties. Il y a un pouvoir attaché à cette épaiffeur, un pouvoir qui agit auprès de la furface; mais ce n'eft point du tout la surface solide qui repouffe, qui réfléchit. Il me femble que le lecteur doit être venu au point où rien ne doit plus le furprendre ; mais ce qu'il vient de voir mène encore plus loin qu'on ne pense, et tant de fingularités ne font, pour ainfi dire, que les frontières d'un nouveau monde.

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Expériences très-fingulières. Conféquences de ces expériences. Action mutuelle des corps fur la lumière. Toute cette théorie de la lumière a rapport avec la théorie de l'univers. La matiere a plus de propriétés qu'on ne penfe.

LA réflexion de la lumière, fon inflexion, fa.

réfraction, fa réfrangibilité sont connues; l'origine des couleurs eft découverte, et l'épaiffeur même des corps néceffaires pour occafionner certaines couleurs eft déterminée.

C'est une propriété démontrée à l'esprit et aux yeux que les furfaces folides ne font point. ce qui réfléchit les rayons; car fi les furfaces folides réfléchiffaient en effet, 1o. le point où deux verres convexes se touchent réfléchirait, et ne ferait point obfcur; 2°. chaque partie folide qui vous donnerait une feule espèce de rayons, devrait auffi vous renvoyer toutes les espèces de rayons; 3°. les parties folides ne tranfmettraient point la lumière en un endroit, et ne la réfléchiraient pas en un autre endroit;

car étant toutes folides, toutes réfléchiraient. 4°. Siles parties folides réfléchiffaient la lumière, il ferait impoffible de fe voir dans un miroir, comme nous l'avons dit; puifque le miroir étant fillonné et raboteux, il ne pourrait renvoyer la lumière d'une manière régulière. Il eft donc indubitable qu'il y a un pouvoir agiffant fur les corps fans toucher aux corps, et que ce pouvoir agit entre les corps et la lumière. Enfin, loin que la lumière rebondiffe fur les il faut corps mêmes, et revienne à nous croire que la plus grande partie des rayons, qui va choquer des parties folides, y refte, s'y perd, s'y éteint.

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Nous ne poufferons pas plus loin cette introduction fur la lumière; peut-être en avonsnous trop dit dans de fimples élémens; mais la plupart de ces vérités étaient nouvelles pour bien des lecteurs, lorfque nous avons publié cet ouvrage. Avant que de paffer à l'autre partie de la philofophie, fouvenons - nous que la théorie de la lumière a quelque chofe de commun avec la théorie de l'univers, dans laquelle nous allons entrer. Cette théorie eft qu'il y a une espèce d'attraction marquée entre les corps et la lumière, comme nous en allons obferver une entre tous les globes de notre univers. Ces attractions se manifestent par différens effets; mais c'est toujours une tendance des corps les

uns vers les autres, découverte à l'aide de l'expérience et de la géométrie.

Ces découvertes doivent au moins fervir à nous rendre extrêmement circonfpects dans nos décifions fur la nature et l'effence des choses. Songeons que nous ne connaissons rien du tout que par l'expérience. Sans le toucher nous n'aurions point d'idée de l'étendue des corps ; fans les yeux nous n'aurions pu deviner la lumière: fi nous n'avions jamais éprouvé de mouvement, nous n'aurions jamais cru la matière mobile; un très-petit nombre de fens que DIEU nous a donnés, fert à nous découvrir un très-petit nombre de propriétés de la matière. Le raisonnement fupplée aux fens qui nous manquent, et nous apprend encore que la matière a d'autres attributs, comme l'attraction, la gravitation; elle en a probablement beaucoup d'autres qui tiennent à sa nature, et dont peut-être un jour la philofophie donnera quelques idées aux hommes:

Pour moi j'avoue que plus j'y réfléchis, plus je fuis furpris qu'on craigne de reconnaître un nouveau principe, une nouvelle propriété dans la matière. Elle en a peut-être à l'infini; rien ne se reffemble dans la nature. Il eft très-probable que le Créateur a fait l'eau, le feu, l'air, la terre, les végétaux, les minéraux, les animaux, &c. fur des principes et des plans tous

différens. Il eft étrange qu'on se révolte contre de nouvelles richeffes qu'on nous présente; car n'eft-ce pas enrichir l'homme que de découvrir de nouvelles qualités de la matière dont il est formé ?

LETTRE DE L'AUTEUR,

Qui peut fervir de conclufion à la théorie de la

J'AURAIS

lumière.

'AURAIS eu l'honneur de vous répondre plus tôt, Monfieur, fans les maladies continuelles qui exercent plus ma patience que Newton n'exerce mon efprit. Je crois que vos doutes, Monfieur, lui en auraient fait naître. Vous dites que c'est dommage qu'il ne fe foit pas expliqué plus clairement fur la raison qui fait que la force attractive devient fouvent répulfive, et fur la force par laquelle les rayons de lumière font dardés avec une fi prodigieufe célérité; et j'oferais ajouter que c'eft dommage qu'il n'ait pu favoir la cause de ces phénomènes. Newton, le premier des hommes, n'était qu'un homme, et les premiers refforts que la nature emploie ne font pas à notre portée, quand ils ne font pas foumis au calcul. On a beau fupputer la force des muscles, toutes les

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