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HERCULE FRANÇOIS

DE FRANCE

Duc d'Anjou, d'Alençon et de Brabant, comte de Flandre Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel

SOUVERAIN DES PAYS-BAS

(1554-1584) 1581-1583

Ce prince, qui naquit le 18 mars 1554, était le cinquième fils du roi Henri II et de Catherine de Médicis. Trois de ses frères portèrent la couronne : François II (roi né malingre, mari de l'infortunée Marie Stuart, reine d'Ecosse et mort à la fleur de son âge), Charles IX et Henri III.

En 1566, il reçut en apanage, du roi Charles IX, le duché d'Alençon, et, en 1573, il suivit son frère, le duc d'Anjou, au siège de la Rochelle.

Il avait toujours nourri une secrète jalousie contre ce prince et quand le duc d'Anjou fut devenu roi de France, François d'Alençon se mit à la tête de ceux qu'on appelait mécontents ou politiques.

Sa mère le fit arrêter; le roi le fit remettre en liberté.

Quelque temps après, en 1575, il sortit du royaume parce qu'on lui avait refusé la Lieutenance générale et devint le chef des reîtres que le comte Jean-Casimir Palatin avait conduits en France.

L'année d'après, ce différend fut accordé à Sens, et le roi augmenta son apanage des duchés d'Anjou, dont il prit le titre, de Touraine, de Berry, et

d'Evreux, qui fut également érigé en duché; ensuite, il fut nommé Lieutenant général des armées du roi, et il commanda celle qui prit en 1577 La Charité sur Loire, et Issoire en Auvergne, sur les Hugue

nots.

En 1578, les Etats appelèrent le duc d'Anjou à leur aide.

Le roi de France désapprouvait ce projet et pour empêcher son frère de se rendre à l'appel des confédérés, il le fit arrêter et garder à vue dans le Louvre.

Le duc se sauva des mains de ses gardes, et étant descendu par la fenêtre de sa chambre au moyen d'une corde de soie, il trouva son favori, Bussy d'Amboise, qui l'attendait, et qui le mena à l'abbaye de Saint-Germain. De là, on le fit sortir de la ville par un trou qu'on avait fait aux murailles.

La venue en Flandre de ce prince avait été admirablement préparée par sa sœur Marguerite, reine de Navarre, qui, sous prétexte d'y prendre les eaux, était venue passer une saison à Spa et avait gagné, avec une merveilleuse adresse d'esprit, les grands du pays à la cause de son frère.

Le duc d'Anjou partit de France avec peu de monde, mais il fut très honorablement reçu à Mons, par le comte de Lalaing et le duc d'Aerschot.

Quand les troupes, qu'il avait levées en France, furent arrivées, il prit quelques villes sur les Espagnols, entre autres Binche dont il s'empara le 6 septembre 1578, et il commença en même temps à porter le titre de « Protecteur de la Flandre » (1).

Mais bientôt ses affaires se gâtèrent ses soldats sans solde et sans butin désertaient de tous côtés, ou étaient tués par l'ennemi pendant les courses qu'ils faisaient dans la campagne, le peuple lui montrait plus de haine que de sympathie, et les grands, qui l'entouraient, étaient plutôt ses gardiens que ses

serviteurs.

Les habitants de Mons, qu'il avait cru surprendre par stratagème, ayant été avertis à temps, sa dernière

(1) Ses ambassadeurs avaient traité avec les Etats à Anvers qui lui conférèrent ce titre le 13 août 1578.

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espérance de se refaire par la contribution de guerre et le butin, s'en était allée à vau-l'eau et le duc fut obligé de quitter le pays.

Il se rendit en Anjou et de là à Paris, où son frère le roi Henri le reçut plus que froidement, appréhendant qu'il ne se rendít de nouveau chef de parti en France. Nous savons que la souveraineté des Pays-Bas lui fut offerte en 1580 (1).

Ce ne fut qu'en 1581 que le duc d'Anjou, à la tête d'une armée de dix mille fantassins et de quatre mille chevaux, qu'il avait réunie à Château-Thierry, passa les frontières (16 août).

Le lendemain, il se trouvait à Grièvecourt.

Le duc de Parme n'osa accepter la bataille avec l'élite de la noblesse française et, le 12, François d'Anjou entra en triomphateur et sans coup férir à Cambrai.

Le Hainaut qui s'était réconcilié avec le roi d'Espagne fut traité en pays conquis; les hordes françaises pillèrent et rançonnèrent les villes et les campagnes, pendant que le prince de Parme, prévoyant probablement ce qui allait arriver, restait dans l'expectative.

La discorde se mit bientôt dans les rangs de l'armée du duc d'Anjou où la discipline était très relâchée. Les officiers supérieurs se disputèrent le haut commandement : personne ne voulut plus obéir, et quoique les Etats et le prince d'Orange envoyassent message sur message, et fissent tous leurs efforts pour inciter le duc à continuer la campagne si heureusement commencée, et à se joindre, en passant par l'Artois, aux troupes qu'ils avaient concentrées en Flandre, François, incapable de maîtriser plus longtemps ces bandes insubordonnées, licencia son armée, et partit avec une suite nombreuse pour l'Angleterre, où il allait faire sa cour à la reine Elisabeth.

(1) La délégation chargée de cette mission se composait de sept personnes : Jean Hinckaert, seigneur d'Ohain; le docteur Henri Hessels, greffier des Etats du Brabant; François de Provins, seigneur de Lanenburg; Jacques Tayaert, conseiller salarié de Gand; Noël de Caron, seigneur de Schoonewal; Gaspard de Vosbergen, grand-bailli de Kampveer et Philippe de Marnix, seigneur de Sainte-Aldegonde, quí en était le chef.

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Elisabeth, the virgin queen, celle dont Bernard de Mendoza, ambassadeur du roi d'Espagne, écrivait au prince de Parme qu'elle se promettoit tous les ans et ne se marioit jamais, avait alors cinquante

ans.

Quoique les prétendants ne lui eussent pas manqué, elle n'avait jamais pu şe décider à se donner un maître.

Après la mort de François II, l'idée de réunir les couronnes de France et d'Angleterre n'avait pas été abandonnée, et, dès que la chose devint possible, Catherine de Médicis fit des ouvertures à la reine Elisabeth en faveur de Charles IX.

Elisabeth répondit avec beaucoup de sagesse que « son bon frère, le roi de France » n'avait pas encore seize ans et qu'elle en comptait trente. Elle aurait même, à cette époque, pu avouer quelques années de plus.

Les négociations traînèrent en longueur et Henri eut tout le temps pour devenir homme, et se marier avec Elisabeth d'Autriche.

La reine fut très dépitée en apprenant ce mariage. De la Mothe-Fénélon, qui était alors ambassadeur à la Cour d'Angleterre, lui proposa Henri d'Anjou, plus jeune qu'elle de dix-neuf ans, et la reine, qui, à trente-trois ans, avait trouvé le frère aîné trop jeune, sembla assez bien s'accommoder à l'idée d'unir ses trente-sept ans bien sonnés aux dix-huit printemps du prince.

Les conseillers secrets de la reine et Huick, son médecin, trouvèrent toutes sortes de raisons pour déconseiller ce mariage.

Elisabeth se conduisit comme une ingénue à qui les parents refusent un promis : elle pleura, elle reprocha à ses conseillers d'avoir rendu tous ses mariages impossibles, et elle les pria très sérieusement de ne pas empêcher cette fois-ci son alliance avec Monsieur.

Entretemps une lettre désespérée de Catherine de Médicis vint apprendre à La Mothe que d'Anjou ne voulait plus, et la reine ajoutait : Voudrait-elle de mon fils d'Alençon?

Celui-ci avait vingt et un ans et demi de moins qu'Elisabeth.

C'était un petit homme assez bien pris de sa personne, mais marqué de la petite vérole et ayant le nez trop grand.

Au commencement la reine refusa net : Il est trop petit, dit-elle.

Puis, à quelque temps de là, elle demanda : Quelle est sa taille exacte?

Ceci se passait en 1572.

Pendant dix ans la reine avait entretenu une correspondance suivie avec le duc, qui lui écrivait des lettres à attendrir un rocher. Elisabeth avait porté, en l'honneur de François, une grenouille d'or, emblème charmant et flatteur que les Anglais donnent à la nation française; François avait fait ce qu'aucun adorateur jusqu'alors n'avait tenté : il s'était, sous un déguisement, jeté à ses pieds, et lui avait avoué sa flamme, et la reine en avait été fort touchée.

Enfin, en arrivant à la cour, les voies étaient bien préparées, et le duc pouvait se croire à la veille de recevoir la douce récompense de son inaltérable con

stance.

Elisabeth le reçut avec de grands honneurs et beaucoup de tendresse.

Les fêtes succédèrent aux fêtes: la reine dansa, on représenta des tragédies, on donna la comédie, on organisa des mascarades.

Le jour de l'an. il y eut un grand tournoi auquel François d'Anjou prit part. La course finie, Elisabeth courut à lui et l'embrassa tendrement à différentes reprises, et comme elle remarqua qu'il était fatigué, elle le prit par la main et le conduisit ellemême dans sa chambre pour qu'il se reposât.

Le lendemain, elle lui fit une visite alors qu'il n'était pas encore levé.

Le jour anniversaire de son couronnement, qu'on fêtait toujours solennellement, elle lui glissa un anneau au doigt... bref, François se croyait au but de ses désirs quand, un matin, il la trouva pâle, défaite, et toute éplorée.

La veille on avait non seulement dressé le contrat

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