TROISIEME INTERMEDE Le theatre est une forest où la princesse est invitée d'aller; une nymphe luy en fait les honneurs en chantant, et, pour la divertir, on luy joue une petite comedie en musique dont voicy le sujet. Un berger se plaint à deux bergers, ses amis, des froideurs de celle qu'il ayme; les deux amis le consolent, et, comme la bergere aymée arrive, tous trois se retirent pour l'observer. Aprés quelque plainte amoureuse, elle se repose sur un gazon et s'abandonne aux douceurs du sommeil. L'amant fait approcher ses amis pour contempler les graces de sa bergere, et invite toutes choses à contribuer à son repos. La bergere, en s'éveillant, voit son berger ses pieds, se plaint de sa poursuite; mais, considerant sa constance, elle luy accorde sa demande, et consent d'en estre aymée, en presence des deux bergers amis. Deux satyres, arrivant, se plaignent de son changement, et, estant touchez de cette disgrace, cherchent leur consolation dans le vin. Venez, grande Princesse, avec tous vos appas, N'y cherchez point l'éclat des festes de la cour; Ce n'est que l'amour qu'on y chante. SCENE PREMIERE. TIRCIS. Vous chantez sous ces feuillages, Les échos de ces bocages: Helas! petits oiseaux, helas! Si vous aviez mes maux, vous ne chanteriez pas. SCENE II. LICASTE, MENANDRE, TIRCIS. LICASTE. Hé quoy! toûjours languissant, sombre et triste? Hé quoy! toûjours aux pleurs abandonné? Toûjours adorant Caliste, Domte, domte, berger, l'ennuy qui te possede. Eh! le moyen, helas! TIRCIS. MENANDRE. Fais, fais-toy quelque effort. Eh! le moyen, helas! quand le mal est trop fort? LICASTE. Ce mal trouvera son remede. TIRCIS. Je ne gueriray qu'à ma mort. Ah! Tircis! Ah! bergers TIRCIS. LICASTE ET MENANDRE. Prens sur toy plus d'empire. TIRCIS. Rien ne me peut secourir. LICASTE ET MENANDRE. C'est trop, c'est trop ceder. TIRCIS. C'est trop, c'est trop souffrir. LICASTE ET MENANDRE. Quelle foiblesse ! TIRCIS. Quel martyre! LICASTE ET MENANDRE. Il faut prendre courage. TIRCIS. Il faut plûtost mourir. Il n'est point de bergere Il est, dans les affaires Je la voy, la cruelle, Qui porte icy ses pas; SCENE III. CALISTE. Ah! que sur nostre cœur Je ne fais voir que rigueurs pour Tircis, Contre des traits si doux nous force à nous armer? Ne peut-on pas aymer Ce que l'on trouve aymable? Helas! que vous estes heureux, Les doux emportemens de vos cœurs amoureux! |