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CHAPITRE IX

L'Académie de Nimes, sa fondation et son affiliation avec l'Académie d'Arles.

Au commencement de l'année 1682, M. de Faure Fondamente demanda au marquis de Grille une lettre de recommandation pour le duc de Saint-Aignan, sans s'expliquer davantage. Un billet de M. d'Arbaud de Nîmes, apprit à l'Académie l'objet du voyage de cet académicien. Il s'agissait d'obtenir des lettres patentes pour l'Académie, qu'une vingtaine de beaux esprits voulaient ériger à Nîmes. M. d'Arbaud en informait ses confrères et leur demandait leur sentiment à cet égard. Ceux-ci répondirent tout simplement que cette affaire ne les regardait pas et qu'il fallait laisser agir « ces MM. de Nîmes (1).

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(1) Avril 1682. « M. Giffon a montré une lettre de M. d'Arbaud, escripte de Nîmes, par laquelle il lui donne advis du dessein que quelques MM. espris et sçavans de ce pays là qui songent à s'ériger en accadémiciens. Il prie ledit sieur Giffon de donner cet advis à l'Académie royalle, et de savoir le sentiment de la compagnie sur cette nouveauté. Il adjouste qu'ils sont desjea beaucoup capables de faire corps pour cela, qu'ils se comptent une vingtaine et plus, tous gens de bel esprit et de bonne vo

M. d'Arbaud vint à Arles peu après, mais l'Académie occupée par d'autres soins, ne s'intéressa pas à la nouvelle tentative, avant plusieurs mois.

L'Académie de Nîmes allait enfin être organisée, grâce à Jules-César de Fayn, marquis de Peraud, maréchal des camps et des armées du roi, qui s'était retiré à Nîmes, où ses ancêtres avaient occupé la charge de sénéchal en 1590 et 1630. Il n'eût d'ailleurs qu'à grouper autour de lui et à fondre dans une seule les diverses sociétés littéraires qui existaient, depuis le milieu du XVIIe siècle, dans la ville de Nîmes, comme dans presque toutes les villes importantes de la France. Ce n'était cependant pas très facile, car ces

lonté, que M. l'evesque de Nîmes, se met à leur teste, que ce prélat pousse cette affaire à la cour par ses amis qui sont considérables et qu'enfin le sieur Faure Fondamente, reçeu despuis un an à l'Académie d'Arles, est le député, qu'il est à la cour pour demander des lettres patentes et que lui M. d'Arbaud n'a pas voulu respondre à la semonce qu'on lui a faicte d'estre enroolé dans cette prétendue Académie, sans apprendre l'intérêt que MM. d'Arles avoient ou voudraient avoir en cette affaire, etc. M. le secrétaire a dict que M. Faure Fondamente estoit réellement et de faict à Paris, ou à la cour, puisqu'il avoit escript et demandé au dict secrétaire une lettre de recommandation pour M. le duc, sans s'ouvrir davantage sur son dessein. On a délibéré de remercier M. d'Arbaud de la part qu'il prend aux intérêts de l'Académie et pour ce qui est des affaires de ces MM. de Nîmes, de M. Faure leur député prétendu et de M. l'evesque, de leurs patantes et prétentions nous n'avions rien à faire de ce costé là, que ce n'estoit pas à nous de prévenir les choses, ni de l'honneur d'une Académie royalle de craindre les exploits et les triumphes de MM. de Nîmes, qu'il falloit laisser faire, attendre en paix et patience l'intention de la cour sur ce dessein. » Registre, fol. 212.

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sociétés tenaient à leur indépendance, et diverses tentatives, en vue de fonder une véritable Académie, avaient échoué. Le marquis de Peraud avait organisé les Emulateurs à Avignon (1), de concert avec Joseph Planety, protonotaire apostolique et dataire de la légation d'Avignon, en 1658. Il en avait dressé les statuts, puis en 1660, il était parti pour la Cour où il fit un long séjour. Il avait étudié l'organisation de l'Académie française et s'était lié avec les beaux esprits du temps. Il apporta à l'organisation de l'Académie de Nîmes autant de zèle que d'habileté. Il réunit chez lui, le 28 mars 1682, MM. de Trimond, de La Baume, Cassagnes et Chazel, conseillers au présidial, Digoine, procureur du roi, d'Aiglun et Causse, chanoine, de Cabrières, Maltrait, Saurin, Chazel, Teissier et Graverol, avocat. Il leur exposa son dessein de «< former une Académie où chacun pourroit, par des entretiens honnêtes, solides et familiers et par la lecture des bons livres, corriger ses défauts et acquérir du sçavoir, de la politesse et de la vertu. » La proposition fut accueillie avec joie et les premières dispositions furent prises, pour en assurer l'exécution. On fixa le nombre des sociétaires à vingt-six; on résolut d'offrir le titre de protecteur à M. Séguier, évêque de Nîmes; on nomma un directeur qui fut M. de La Baume, et un secrétaire qui fut le marquis

(1) Voir t. I, pièces justificatives, p. 387-390.

de Peraud (1). MM. de Faure Fondamente et Restaurand, alors à Paris, furent priés par lettres de faire partie de la nouvelle société et ils acceptèrent. L'évêque de Nîmes voulut bien agréer le titre de protecteur, et les séances de la société, commencèrent le mercredi 1er avril 1682, pour se continuer ensuite les mercredis de chaque semaine. On s'occupa sans retard de rédiger des statuts, sur le modèle de ceux de l'Académie française et on s'enquit des moyens d'obtenir du roi des lettres patentes de fondation.

M. Pierre Chazel, alors avocat et devenu, en 1685, procureur du roi au présidial de Nîmes, était sur le point de se rendre à Paris. Il offrit ses services à la compagnie « pour solliciter auprès des puissances les grâces dont elle avait besoin. » L'offre fut acceptée, après son départ, et, le 17 juin, on le chargea de s'entendre avec M. de Faure Fondamente, pour obtenir des lettres patentes du roi.

Le duc de Saint-Aignan, auquel l'Académie d'Arles avait recommandé M. de Faure Fondamente, le comblait de prévénances, le produisait dans la meilleure société et le menait aux séances de l'Académie française (2). M. de Faure était donc en mesure de rendre de sérieux services à ces MM. de Nîmes.

(1) V. Ménard, Hist. de Nîmes, t. VI, passim, et Dr Laval, les Emulateurs d'Avignon, dans le Bulletin de Vaucluse de 1879. (2) Le 20 août 1682, M. de Faure Fondamente assista avec

Ils écrivirent peu après au chancelier Le Tellier, au duc du Maine, gouverneur de Languedoc, au duc de Noailles, lieutenant général en cette province, puis au cardinal de Bonzy, à Colbert, à Louvois et au marquis de Châteauneuf. Les députés, munis de ces recommandations, agirent avec le zèle qu'on attendait d'eux et leurs démarches furent couronnées de succès. « On voit par leurs lettres du 5 août de cette année 1682, lues à la séance du 15, qu'ils avoient été favorablement accueillis par tous ceux à qui l'Académie avoit écrit pour cet objet. Le duc du Maine en avoit parlé au roi ainsi qu'il l'avoit promis. Pellisson si étoit aussi employé. On n'y trouva de difficulté que sur l'article des privilèges, qu'on s'attachoit à demander conformes à ceux de l'Académie française. On opposoit au sceau que pareilles lettres patentes

son fils « jeune gentilhomme de grande espérance » à la séance de l'Académie française et reçurent tous les deux la médaille. M. le duc de Saint-Aignan le présenta en ces termes :

« MM. la considération et le respect que j'ai pour vous m'ont fait remarquer avec plaisir les sentiments de vénération que MM. de l'Académie royalle d'Arles ont toujours eu pour votre illustre corps. Ils m'ont encore été confirmés de nouveau par M. de Faure Fondamente qui souhaite l'honneur d'être connu de vous. Je suis persuadé, MM., que son mérite attirera facilement votre approbation et notre estime et par la justice que vous lui rendrez en cette occasion, vous m'engagerez à une très grande reconnaissance. » Bibl. Méjanes, Ms 1060, p. 162.

Puis de Faure prit la parole et Doujat, directeur, lui répondit très obligeamment. Il opina à son tour dans la révision du dictionnaire et fut traité absolument en confrère. V. plus haut, p. 273.

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