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PREMIERE

LETTRE

A MONSIEUR

DE VOLTAIRE.

Vous favez, Monfieur, que j'étois, il y

a quinze ans, un de vos plus ardents ad-
mirateurs. Je fortois à peine de l'enfance,
& la haute réputation dont vous jouissiez
mettoit vos Ouvrages dans les mains de
tout le monde. Je me fentois un goût très-
vif
pour
les Lettres. Vos livres feuls firent
mes premieres études. Je les dévorois ; leur
lecture agréable, légere, fi féduisante pour
un âge plus amoureux du brillant que du
beau, dégoûtoit mon efprit de toute autre

A

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lecture, & d'un aliment plus nourriffant & plus folide. Enfin, vous m'aviez enivré; mon admiration pour vous alloit jusqu'au fanatifme & je groffiffois la foule immense de ceux qui vous barbouillent de leur encens. J'étois fincere alors. Je ne le fuis pas moins aujourd'hui, quoique je pense différemment : non que j'aie l'injustice de tomber dans un autre excès, & de refuser à vos-talens le tribut d'eftime qui leur eft dû La raifon & le goût, qui m'ont ouvert les yeux fur les défauts de vos écrits, m'empêchent auffi de les fermer fur leurs beautés.

C'est donc à vous même Monfieur, que j'ai voulu m'adreffer, pour vous rendre raifon de mon changement à votre égard. C'eft avec vous que j'entreprends d'examiner vos Ouvrages. Je vous propoferai mes réflexions. Je vous prendrai même quelquefois pour Juge dans votre propre caufe; & s'il arrivoit que je me fuffe trompé, je recevrois de vous, avec reconnoiffance, tout ce qui pourroit m'éclairer & m'inftruire,

Quelques perfonnes m'avoient confeillé de ne point donner, de votre vivant, cet

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