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d'où elles provenaient. Les fouilles nous ont permis de constater l'existence de plusieurs autres sépultures et de nombreux fragments d'ossements humains; mais elles n'ont fait découvrir aucun objet présentant le moindre intérêt.

Peut-être avons-nous eu tort; mais, en présence d'un résultat aussi négatif, nous avons cru de notre devoir de conseiller M. Yver de ne pas continuer les recherches.

Il était constant, en effet, d'après l'état des cercueils, que, d'une part, une dévastation complète avait eu lieu dans cette petite nécropole, à une époque que l'on ne saurait préciser, et, d'autre part, que des labourages successifs, pratiqués dans un sol peu consistant, très en pente et, par suite, de nature à se dénuder sous l'action des pluies, avaient achevé l'œuvre de destruction des premiers violateurs.

Tout ce que nous avons pu constater d'une façon certaine, c'est qu'il y avait eu là un cimetière Mérovingien, dont on peut faire remonter l'origine au vie ou au viie siècle de notre ère. La présence des cercueils, tous en tuf de Sainteny, justifie cette assertion; elle permettrait même, si nous ne nous trompons, de donner à ce cimetière une existence plus reculée.

Ces préliminaires établis, nous allons passer, si vous le voulez bien, aux objets trouvés dans les premières fouilles, objets que M. Yver de la Vigne Bernard nous a bienveillamment communiqués.

Ces objets consistent en

1° Une boucle de ceinture, avec son ardillon, très bien conservée;

20 Trois plaques de ceinture, dont l'une est entière et les deux autres sont en partie brisées. Le dessin qui les orne est bizarre; les cabochons en émail, placés à leurs angles, ont disparu. Plaques et boucle ont la plus grande analogie avec leurs similaires de Caranda et semblent sortir des mêmes fabriques.

Si j'avais une opinion à émettre sur leur usage, je serais tout porté à les considérer comme provenant de ceintures de

femmes, d'abord, à cause de leur légèreté et de leurs petites dimensions; ensuite parce qu'elles me rappellent vaguement les ornements de ceintures des abbesses ou dames nobles, que reproduisent d'anciennes miniatures.

Quant au métal qui les compose, est-ce l'électrum, employé jadis par nos ancêtres les Gaulois? Est-ce tout simplement de l'argent à un titre très bas? Je ne saurais le dire.

Je compléterai plus loin mes idées sur leur origine; mais, auparavant il paraît curieux de rechercher comment ils ont pu se trouver là.

Il est évident, d'abord, que le cimetière du Clos-aux-Moines a dû dépendre d'un établissement religieux, monastère ou prieuré. Le nom de la propriété l'indique suffisamment. (1)

Si l'on recherche ensuite qu'elle pouvait être, aux époques éloignées dont il est ici question, la situation du Bessin et du Cotentin, on trouve que le littoral de la Manche et les alentours de la Baie-des-Veys actuelle faisaient partie, vers le vi siècle, de la contrée connue sous le nom de Littus saxonicum. De plus, Grégoire de Tours nous apprend que les Saxons de Bayeux, dont le diocèse comprend Lison et Neuilly, occupaient en partie ce pays, d'où la reine Frédégonde les lançait, à son grẻ, tantôt contre les troupes royales, tantôt contre les Bretons (voir note 1re).

On sait, en outre, que vers la fin du sixième siècle, l'Irlandais Colomban vint en France et prêcha l'Evangile dans toutes les provinces au nord de la Loire. Un de ses disciples, Saint-Potentin (Potentinus Scotus), entre autres, fonda un abbaye dans les faubourgs de Coutances, à l'endroit où est aujourd'hui le Lycée. Colomban amena avec lui des aritstes et des artisans de mérite. Les artistes Scots, Saxons ou

(1) Il est bon de remarquer que l'abbaye de Saint-Lo a exercé certains droits en la paroisse Saint-Joires, alias Saint-Georges de Lison.

Irlandais, suivant le nom que leur donnent les auteurs, étaient en effet, très renommés.

Ne peut-on pas supposer, avec certaine vraisemblance, que l'établissement monacal (masculin ou féminin) du Clos-auxMoines, a été un de ceux que construisit le fougueux missionnaire ou l'un de ses zélés disciples? et, cette idée admise, conjecturer que les ornements trouvés dans ce clos seraient d'origine scotique ou saxonne?

Ce qui confirmerait cette idée, c'est l'air de famille existant entre la décoration des plaques et celle des parements intérieurs des murs de la nef de la cathédrale de Bayeux, (V. Note 2o) où le faire de l'ouvrier Scot ou Saxon est și bien accusé. Que si l'on doute de l'habileté de ces ouvriers, je renverrais aux articles que j'ai publiés à ce sujet dans le 4 volume de nos mémoires, au cours de ma notice intitulée La Cathédrale de Coutances et les Moines « Celtiques.» (Note 3).

Donc, pour moi, ces ornements saxons doivent provenir d'un établissement saxon lui aussi, établissement détruit, comme tant d'autres, au Ixe siècle par l'invasion Normande et ne s'étant pas relevé depuis lors. Ce monastère, abbaye, parthenon ou prieuré, dépendait-il de Saint-Fromond ou des Deux-Jumeaux, couvents situés dans le voisinage? Peutêtre trouverait-on à ce sujet quelques renseignements dans l'histoire de l'abbaye de Cerisy, à laquelle ces deux établissements furent unis par la suite (v. note 4).

Je livre ces réflexions pour ce qu'elles valent, c'est-à-dire, comme un simple point de repère pour arriver, quelque jour, à la connaissance de la vérité. J'aborde maintenant la description exacte des objets trouvés dans le Clos-aux-Moines.

I.

La boucle de ceinture, (fig. 1) de 57 millimètres de hauteur sur une largeur de 33 millimètres, a la forme d'un ovale aplati dans le sens de son petit axe. L'entourage de la boucle, d'une largeur de 9 millimètres, est formé par un double rinceau

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