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de tout homme à qui l'on voudroit prouver la Divinité de Jésus-Chrift & l'existence de la Religion Chrétienne, qui feule a Dieu pour au teur, & à l'égard de laquelle il porte le blafphême jufques à la donner pour ridicule, pour contradictoire, & à infpirer une indifférence facrilège pour fes myfteres & pour fes dogmes qu'il voudroit pouvoir anéantir.

Que tels font les principes impies & détestables que fe propofe d'établir dans fon Ouvrage cet Ecrivain qui foumet la Religion à l'examen de la raifon, qui n'établit qu'une foi purement humaine, & qui n'admet de vérités & de dogmes en matière de Religion, qu'autant qu'il plaît à l'efprit livré à fes propres lumières, ou plutôt à fes égaremens, de les recevoir ou de les rejetter.

Qu'à ces impiétés il ajoûte des détails indécens, des explications qui bleffent la bien féancè & la pudeur, des propofitions qui tendent à donner un caractere faux & odieux à l'autorité fouveraine, à détruire le principe de l'obéiffance qui lui eft dûe, & à affoiblir le refpect & l'amour des peuples pour leurs Rois.

Qu'ils croyent que ces traits fuffifent pour donner à la Cour une idée de l'Ouvrage qu'ils lui dénoncent; que les maximes qui y font ré pandues forment par leur réunion un fiftême chimérique, auffi impraticable dans fon exécu

jet. Que feroient d'ailleurs des Sujets élevés dans de pareilles maximes, finon des hommes préoccupés du fepticisme & de la tolérance, abandonnés à leurs paffions, livrés aux plaifirs des fens, concentrés en eux-mêmes par l'amour propre, qui ne connoftroient d'autre voix que celle de la nature, & qui au noble défir de la folide gloire, fubftitueroient la pernicieufe manie de la fingularité? Quelles regles pour les mours! Quels hommes pour la Religion & pour J'Etat, que des enfans élevés dans des principes qui font également horreur au Chrétien & au Citoyen!

..Que l'Auteur de ce Livre n'ayant point craint de fe nommer lui-même, ne fçauroit être trop promptement pourfuivi; qu'il eft important, puifqu'il s'eft fait connottre, que la Justice se mette à portée de faire un exemple tant fur l'Auteur que fur ceux qu'on pourra découvrir avoir concouru foit à l'impreffion, foit à la diftribution d'un pareil Ouvrage digne comme eux de toute fa févérité.

Que c'est l'objet des Conclufions par écrit qu'ils laiffent à la Cour avec un Exemplaire du Livre; & fe font les Gens du Roi retirés.

Eux retirés:

Vu le Livre en quatre Tomes in-8°. intitulé: Emile, ou de l'Education, par J. F. Rouleau, Citoyen de Geneve. Sanabilibus ægrotamus malis;

ipfaque nos in rectum, natura genitos, fi emendari velimus juvat. Senec. de Irâ, Lib. XI. cap. XIII. tom. 1, 2, 3 & 4. A la Haye, chez Jean Néaulme, Libraire, avec Privilege de Nos Sei gneurs les Etats de Hollande & Weftfrife. Conclu fions du Procureur Général du Roi; ouï le Rapport de M. Pierre-François Lenoir, Confeiller; la matière mise en délibération :

LA COUR ordonne que ledit Livre impri ́mé, fera lacéré & brûlé en la Cour du Palais, au pied du grand Efcalier d'icelui, par l'Exécuteur de la Haute-Juftice; enjoint à tous ceux qui en ont des Exemplaires, de les apporter au Greffe de la Cour, pour y être fupprimés; fait trèsexpreffes inhibitions & défenses à tous Libraires d'imprimer, vendre & débiter ledit Livre, & à tous Colporteurs, Diftributeurs ou autres de le colporter ou diftribuer, à peine d'être pourfuivis extraordinairement, & punis fuivant la rigueur des Ordonnances. Ordonne qu'à la Requête du Procureur Général du Roi, il fera informé pardevant le Confeiller-Rapporteur, pour les Témoins qui fe trouveront à Paris, & pardevant les Lieutenans Criminels des Bailliages & Sénéchauffées du Reffort, pour les Témoins qui feroient hors de ladite Ville, contre les Auteur, Imprimeurs ou Distributeurs dudit Livre; pour, les informations faites, rapportées & communiquées au Procureur Général du Roi, être par lui requis & par la Cour ordonné ce

qu'il appartiendra; & cependant ordonne que le nommé J. J. Rouffeau, dénommé au Frontifpice dudit Livre, fera pris & appréhendé au corps, & amené ès Prifons de la Conciergerie du Palais, pour être ouï & interrogé pardevant ledit Confeiller- Raporteur, fur les faits dudit Livre, & répondre aux Conclufions que le Procureur Général entend prendre contre lui; & ou ledit J. J. Rouffeau ne pourroit être pris & appréhendé, après perquifition faite de sa perfonne, affigné à quinzaine, fes biens faifis & annotés, & à iceux Commiffaires établis, jufqu'à ce qu'il ait obéi fuivant l'Ordonnance; & à cet effet ordonne qu'un Exemplaire dudit Lis vre fera dépofé au Greffe de la Cour, pour fervir à l'inftruction du Procès. Ordonne en outre que le préfent Arrêt fera imprimé, publié & affiché par-tout où befoin fera. Fait en Par. lement, le 9 Juin mil fept cent foixante-deux, Signé, DUFRANC.

Et le Vendredi 11 Juin 1762, ledit Ecrit men' tionné ci-dessus a été lacéré & brûlé au pied du grand Efcalier du Palais, par l'Exécuteur de la Haute Justice, en présence de moi Etienne - Dagobert Tabeau, l'un des trois principaux Commis pour la Grand Chambre, affifté de deux Huiffiers de la Cour. Signé, YSABEAU. A PARIS, chez P. G. SIMON, Imprimeur du Parlement, rue de la Harpe, à l'Hercule.

1762.

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DE MONSEIGNEUR

L'ARCHEVÊQUE

DE PARIS,

PORTANT condamnation d'un Livre qui a pour titre: EMILE, ou de l'Education, par F. F. Rouleau, Citoyen de Geneve. A Amster dam, chez Jean Néaulme, Libraire, 1762.

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CHRISTOPHE DE BEAUMONT, par la Miféricorde Divine, & par la grace du Saint Siege Apoftolique, Archevêque de Paris, Duc de Saint Cloud, Pair de France, Comman deur de l'Ordre du Saint Efprit, Provifeur de Sorbonne, &c. A tous les Fideles de notre Diocèfe: SALUT ET BENEDICTION.

SAINT PAUL a prédit, MES TRES-CHERS FRE RES, qu'il viendroit des jours périlleux où il y auroit des gens amateurs d'eux-mêmes, fiers, fu perbes, blafphémateurs, impies, calomniateurs enflés d'orgueil, amateurs des voluptés plutôt que de Dieu; des hommes d'un efprit corrompu & pervertis dans la Foi. (a) Et dans quels temps malheureux cette prédiction s'eft, elle accomplie

(a) In noviffimis diebus inftabunt tempora periculofa: erunt homines fe ipfos amantes... elati, fuperbi, blafphemi... fcelefti... criminatores... tumidi & voluptatum amatores magis quàm Dei... homines corrupts mente & reprobi circa fidem. 2. Tìm. c. 3. v. 1. 4. 8.

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