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UN PAYSAGE EN AUVERGNE.

Ce tableau est inscrit, dans le livret officiel, sous ce simple titre «Solitude; paysage composé. » Ce n'est pas cependant l'œuvre de la seule imagination du peintre, et l'on en pourrait certainement trouver, sinon exactement le modèle, au moins le motif, le caractère et l'impression poétique, aux environs de Chateldon, en Auvergne. Nous savons, en effet, que M. Bellel habitait, l'été dernier, cette petite ville, située au fond d'une jolie vallée que dominent de toutes parts de hautes montagnes. Les ruines d'un vieux château construit, dit-on, sous le règne de

Louis le Gros, les pans épais d'anciennes murailles où, suivant la tradition, l'on voyait autrefois apparaître les noires silhouettes gigantesques des seigneurs de Chateldon bardés de fer, conservent à la modeste et paisible cité un trait d'ancienne physionomie, un air de légende suffisant pour qu'elle ne discorde pas avec les beautés solennelles qu'elle semble avoir pour principale destination de contempler. Ainsi que quelques autres artistes estimés de notre temps, M. Bellel aime l'Auvergne. Les scènes imposantes de ce sol bouleversé par les révolutions intérieures de notre globe l'intéressent et l'inspirent; son crayon et son pinceau savent en exprimer l'originalité et la grandeur.

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Il est d'une école de paysagistes dont M. Aligny a été l'un des maîtres, et où l'on s'étudie à reproduire les aspects sérieux et sévères de la nature, ceux qui élèvent l'esprit et le disposent aux saines et fortes méditations. Ce n'est peut-être pas aujourd'hui la meilleure voie pour parvenir à la popularité. Le nombre des personnes qui cherchent des distractions dans les expositions périodiques de peinture et de sculpture s'est accru plus rapidement que le goût et l'instruction nécessaires pour juger les œuvres d'art (1). Or la plupart de ces nouveaux spectateurs sont surtout captivés, soit par les paysages de contrées lointaines, d'Afrique ou d'Asie, qui les étonnent et les éblouissent, soit, au contraire, par les toiles qui replacent sous leurs yeux, comme de simples miroirs, les détails gracieux de leurs promenades les plus familières. Ce n'est pas un mal. La plupart des artistes qui doivent à l'heureux choix de sujets de ce genre des succès populaires se distinguent aussi par des qualités d'un ordre élevé au moins () Voy. t. XXV, 1857, p. 348, 363, 395, le Public et les œuvres d'art.

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SACRIFICES HUMAINS. CÉRÉMONIES GRANDIOSES OU TOUCHANTES
MÊLÉES A CET HORRIBLE USAGE. LA FÊTE DU FEU NOUVEAU.
LA FÊTE DU DIEU TEZCATLIPOCA.

C'est un fait que jamais il n'y eut tant de sacrifices humains que sous le dernier des Montézuma. Ce prince superstitieux, dominé par les prêtres ou tourmenté par de sinistres pressentiments dont il croyait conjurer la menace à force de sang répandu sur les autels, ne se lassait pas

() M. Michel Chevalier nous autorise à reproduire ce passage d'un livre qu'il a publié par les soins de la maison Hachette, et qui a pour

d'augmenter le nombre des victimes. Les compagnons de Cortez curent la patience ou le courage de compter les cranes disposés en trophées dans les enceintes de quelquesuns des temples; ils en trouvèrent une fois 136 000. L'estimation la plus modérée est qu'à l'arrivée des Espagnols tous les ans 20 000 personnes étaient immolées. Lors de l'inauguration du grand temple du dieu Huitzilopotchli, à Mexico, en 1486, trente-trois ans avant la conquête, 70 000 victimes, ramassées pendant plusieurs années dans toutes les parties de l'empire, furent égorgées une à une. La boucherie dura plusieurs jours sans relâche; la procession de ces malheureux occupait quatre milles de long.

Les victimes étaient les criminels, les rebelles; quand une ville avait manqué à sa fidélité envers le souverain, on la taxait à un certain nombre de personnes, hommes, femmes et enfants. Mais c'était la guerre qui contribuait le plus à alimenter les sacrifices. Dans un entretien avec Cortez, l'empereur, interrogé par le conquistador sur le motif qu'il pouvait avoir eu pour ne pas en finir avec les Tlascaltèques, qui refusaient de reconnaitre sa suzeraineté, répondit qu'en cessant la guerre avec eux on eût été embarrassé pour se procurer des victimes en nombre suffisant pour honorer les dieux.

Provenant de nations dont les croyances étaient semblables, les victimes subissaient leur sort sans se plaindre. Les populations les regardaient comme des messagers députés vers la Divinité, qui les accueillait favorablement pour avoir souffert en son honneur. Elles les priaient de se charger de leurs réclamations près des dieux, de leur rappeler leurs affaires. Chacun leur confiait ses vœux, en leur disant « Puisque tu vas retrouver mon dieu, fais-lui savoir mes besoins, afin qu'il y satisfasse.» On les parait, on leur faisait des présents avant l'immolation. Dans certains cas, il y avait au temple une fête mêlée de danses auxquelles le captif prenait part, et au moment suprême on lui disait le message le plus important qu'il eût à remplir près des dieux.

Dans les conquêtes des Mexicains, on rencontre, même à côté des réserves faites pour les autels des dieux, de nombreux traits de clémence. Le récit des agrandissements successifs de l'empire aztèque, par Tezozomoc, que M. Ternaux a publié en français, montre que ce n'étaient point des vainqueurs impitoyables. Ils donnaient à leur géné– į rosité quelquefois des formes étrangement naïves, comme ont pu le faire souvent les barbares envahisseurs de l'empire romain ou les chefs de bandes du moyen âge. En voici un exemple: il s'agit de la conduite de l'empereur Axayacatl, père de Montézuma, après l'assaut de la ville de Tlatelolco, envers les vieillards, les femmes et les enfants. Les guerriers de Tlatelolco avaient affecté, pendant le siége, beaucoup d'arrogance.

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Axayacatl et les principaux chefs mexicains, dit Tezozomoc, allérent alors chercher les vieillards, les femmes et les enfants, qui s'étaient cachés au milieu des roseaux, et dont une partie s'étaient enfoncés dans les marécages jusqu'à la ceinture, quelques-uns même jusqu'au menton, et leur dirent « Femmes, avant de sortir de l'eau, il faut, » pour nous montrer votre respect, que vous imitiez le cri » des dindons et des autres oiseaux du lac. » Les vieilles femmes se mirent alors à crier comme des dindons, et les titre : le Mexique ancien et moderne. L'histoire du Mexique depuis sa conquête par Fernand Cortez et surtout depuis le commencement du siècle, ainsi que l'exposé des ressources qui distinguent cette admirable contrée, occupent la majeure partie du livre. L'auteur cependant a consacré une suite de chapitres à la description de l'antique civilisation du pays. La religion sanguinaire des anciens maîtres du Mexique, les Aztèques, y est exposée avec quelque détail. C'est de là qu'est tiré le passage qu'on va lire.

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jeunes comme les oiseaux que l'on appelle cuachil ou yacatzintli, de sorte qu'elles firent un tel bruit que l'on eût dit que le marais était réellement rempli d'oiseaux. Axayacatl leur permit ensuite de sortir du lac, et les remit en liberté. »

Voici un autre exemple des ménagements qu'ils observaient envers les vaincus et des chances de salut qu'ils offraient aux plus braves des prisonniers :

<«< Il existait au milieu de toutes les places de la ville des constructions circulaires, en chaux et en pierres de taille, de la hauteur de huit pieds environ. On y montait par des gradins; au sommet était une plate-forme ronde comme un disque, et au milieu une pierre ronde scellée ayant un trou au centre. Après certaines cérémonies, le chef prisonnier montait sur cette plate-forme; on l'attachait par les pieds à la pierre du milieu, au moyen d'une petite corde; on lui donnait une épée, une rondache, et celui qui l'avait pris venait le combattre; s'il était de nouveau vainqueur, on le regardait comme un homme d'une bravoure à toute épreuve, et il recevait un signe en témoignage de la vaillance qu'il avait montrée. Si le prisonnier remportait la victoire sur son adversaire et sur six autres combattants, de sorte qu'il restât vainqueur de sept. en tout, il était délivré, et on lui rendait tout ce qu'il avait perdu pendant la guerre. Il arriva un jour que le souverain d'un État nommé Huccicingua (Huexotzingo) combattant avec celui d'une autre ville nommée Tula, le chef de Tula s'avança tellement au milieu des ennemis que les siens ne purent le rejoindre. Il fit des prouesses admirables; mais les ennemis le chargèrent avec tant de vigueur qu'ils le prirent et le conduisirent chez eux. Ils célébrèrent leur fête accoutumée, le placèrent sur la plate-forme, et sept hommes combattirent contre lui. Tous succombèrent l'un après l'autre, quoique le captif fùt attaché suivant l'usage. Les habitants de Huexotzingo, ayant vu ce qui s'était passé, pensèrent que, s'ils le mettaient en liberté, cet homme, étant si brave, n'aurait point de repos jusqu'à ce qu'il les ent tous détruits. Ils prirent donc la résolution de le tuer. Cette action leur attira le mépris de toute la contrée; ils furent regardés comme des gens sans loyauté et des traîtres pour avoir violé, dans la personne de ce seigneur, l'usage établi en faveur de tous les chefs.» (')

A côté de ces sacrifices atroces, on trouve dans la religion même des Mexicains des traits qui annoncent un sentiment profond d'humanité. En regard de leur conception de la vie future, ces immolations, exécutées sur la plus grande échelle au nom de la religion, font un contraste épouvantable. Le bûcher cache au moins la victime dans des flots de fumée. Ici l'offrande était une effusion de sang; le sang était répandu, étalé, on en faisait parade à la face du soleil, sous les regards attentifs d'une foule immense. Conduite par les prêtres processionnellement, à pas lents, au son de la musique et des chants du rituel, la victime gravissait une pyramide qui formait la base du temple et dont on faisait le tour à chacune des trois ou quatre terrasses qui la partageaient en étages. La pierre du sacrifice était tout en haut, en plein air, entre les deux autels où brûlait nuit et jour le feu sacré, devant le sanctuaire, en forme de tour élancée, qui recélait l'image du dieu. Le peuple, assemblé au loin, contemplait dans un profond silence, sans en perdre aucun détail, cette scène terrible. La victime, enfin, après des prières, était étendue sur la pierre fatale. Le sacrificateur, quittant la robe noire flottante dont il était ordinairement vêtu pour un manteau rouge, plus approprié à sa suprême fonction, s'approchait armé du couteau d'itzli, lui

(') Collection Ternaux-Compans.

ouvrait la poitrine, en retirait le cœur fumant, barbouillait de sang les images des dieux, versait le sang autour de lui, ou en faisait, avec de la farine de maïs, une horrible pâtée. Voilà ce qui s'alliait pourtant avec la passion des fleurs et avec les idées les plus pures voilà ce dont on venait repaître ses yeux cinquante fois par an, après s'être, la veille ou le matin, balancé dans une atmosphère embaumée, au milieu d'une végétation riante, sur les eaux du lac, à bord des chinampas!

Diverses circonstances redoublent la stupeur que causent de telles pratiques de la part de ces peuples et forcent à admettre qu'elles devaient procéder, sans préjudice d'autres mobiles, de la doctrine de l'expiation interprétée par l'effroi la peur est féroce mille fois plus que le courage. A côté de ces cérémonies de sang, le culte des Aztèques en présentait d'autres d'une candide innocence; on eût dit le doux et tendre Abel honorant le Très-Haut. C'étaient des processions entrecoupées de chants et de danses où les jeunes gens des deux sexes rivalisaient de parure et de beauté, et déployaient une agilité extraordinaire. Des jeunes filles et des enfants, la tête ceinte de guirlandes de fleurs, la joie et la reconnaissance sur le visage, portaient pieusement des offrandes de fruits, prémices de la saison, et d'énormes épis de maïs, qu'on déposait, en brûlant des parfums, devant les images des dieux. Si des victimes étaient immolées alors, c'étaient des oiseaux, particulièrement des cailles. Tel était le caractère du culte des Toltèques, sur la civilisation desquels les Aztèques étaient venus greffer la leur. Quelques cérémonies des Toltèques étaient ainsi demeurées intactes, sans que la main violente de leurs successeurs y mit son empreinte; elles restaient comme une protestation des meilleurs instincts de la nature humaine contre celles qui étaient sorties de l'imagination des Aztèques.

Ces inventions d'un mysticisme affreux étaient arrangées avec beaucoup de pompe et d'art. Chacun de ces sacrifices sanglants formait un drame qui représentait quelqu'une des aventures du dieu auquel il était consacré, et d'où ressortait une moralité. Dans le nombre on pourrait signaler des solennités dont, à coup sûr, le spectacle révolterait les hommes de notre siècle, à cause de la tragédie qui les terminait, mais dont il est impossible de lire la description sans en admirer la majesté, le sens profond et, je ne puis trouver d'autre expression, l'élégance. Telle était celle du Feu nouveau; telle, mieux encore, la fête du dieu Tezcat lipoca, générateur de l'univers, âme du monde.

D'après la cosmogonie des Aztèques, le monde avait éprouvé quatre catastrophes où tout avait péri. Ils en attendaient une cinquième au terme d'un de leurs cycles de cinquante-deux ans, où tout devait de même disparaître, jusqu'au soleil qui devait être effacé des cieux. A l'achèvement du cycle qui, de même que la fin de l'année, concordait à peu près avec le solstice d'hiver, ils célébraient une fête commémorative de la fin et du renouvellement qu'avait quatre fois subis le monde, et destinée à conjurer le cinquième cataclysme dont le genre humain, la terre et les astres eux-mêmes, sans excepter celui qui sert de foyer à l'univers, étaient menacés par un cruel arrêt des dieux. A cette fin, les cinq jours par lesquels se fermait l'année étaient consacrés à des manifestations de désespoir. On détruisait les petites images des dieux qui ornaient les maisons et les protégeaient, comme les dieux lares des anciens. On laissait mourir les feux sacrés qui brillaient sur la pyramide de chaque teocalli (temple); on cessait d'allumer le foyer domestique; on brisait ses meubles, on déchirait ses vêtements. Tout prenait l'aspect de la désolation pour la venue des mauvais génies qui projetaient de descendre sur la terre.

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Le soir du cinquième jour, les prêtres, emportant les ornements de leurs dieux, s'en allaient en procession jusqu'à une montagne éloignée de deux lieues, menant avec eux la plus noble victime qu'ils pussent trouver parmi les captifs. Sur le sommet, on attendait en silence le moment où la constellation des Pléiades, qui jouait un rôle dans la cosmogonie des Aztèques, s'approchait du zénith; c'est à cet instant qu'on sacrifiait la victime. On enflammait, par frottement, des bois placés sur sa poitrine béante : c'était le feu nouveau, dont aussitôt on communiquait la flamme å un bucher funèbre sur lequel la victime était consumée. Dès que le bûcher embrasé flamboyait au loin, des cris d'allégresse s'élevaient vers le ciel, des collines du voisinage, des sommets des temples, des terrasses des maisons, où toute la nation réunie, debout, les regards tournés dans la direction de la montagne, attendait avec anxiété l'apparition de ce signal de salut. Du bûcher sacré, des courriers partaient à toute vitesse, tenant des torches ardentes pour distribuer le feu nouveau qui, sur leurs pas, aussitôt éclatait de toutes parts sur les autels et dans les maisons. Peu d'heures après, le soleil se levant sur l'horizon annonçait aux hommes que les dieux les prenaient en pitié, et que, pour la durée d'un cycle encore, le genre humain était à l'abri de la destruction; mais, pour se racheter pendant le cycle d'après, il fallait que les peuples, durant les cinquante-deux ans qui leur étaient accordés, demeurassent fidèles à la loi venue des dieux. Les jours intercalaires qui suivaient, au nombre de douze ou treize, étaient consacrés à des fêtes. On réparait les maisons, on remontait les ménages en ustensiles, on se faisait de nouveaux vêtements, et on rendait grâces au ciel.

La fête du dieu Tezcatlipoca était d'un différent caractère. La mythologie aztèque le figurait sous les traits d'un homme à l'éternelle jeunesse, d'une beauté accomplie. Une année d'avance, on choisissait parmi les captifs celui qui était le plus beau, en prenant garde qu'il n'eût aucune tache sur le corps. De ce jour, le dieu était personnifié en lui, et des prêtres attachés à sa personne s'appliquaient à le façonner, afin qu'il eût une tenue pleine de dignité et de grâce. On l'habillait avec élégance et splendeur. Il vivait au milieu des fleurs, et les parfums les plus exquis brûlaient à son approche. Lorsqu'il sortait, il avait à son service des pages ornés avec une royale magnificence. Il allait et errait en toute liberté, s'arrêtant dans les rues ou sur les places publiques pour jouer, d'un instrument qu'il portait, quelque mélodie qui lui plaisait, et alors la foule se prosternait devant lui comme devant le Grand Esprit de qui tous les êtres tiennent le souffle vital.

Cependant le jour du sacrifice arrivait; l'appareil des délices s'évanouissait subitement autour de lui. Une des barques d'apparat de l'empereur le conduisait sur la rive du lac, à une lieue de la ville, au pied de la pyramide consacrée au dieu dont il avait été l'image. La population de la capitale et des environs était rangée tout alentour. Il gravissait lentement en tournant, selon l'usage, les étages du teocalli, teocalli, et faisait des stations à chacune desquelles il se dépouillait de quelqu'un de ses brillants insignes, jetait quelques-unes des fleurs dont sa personne était ornée, ou brisait l'un des instruments sur lesquels il avait fait entendre ses accords. Au sommet de la pyramide, il était reçu par six prêtres, tous, un seul excepté; vêtus de noir, avec leurs longs cheveux épars. Le sacrifice se consommait, et le cœur de la victime, présenté d'abord au soleil, était mis aux pieds de la statue du dieu. Puis les prêtres, s'adressant à la foule, tiraient de ce mythe ensanglanté de solennels enseignements, disant que c'était l'emblème de la destinée de l'homme, auquel tout semble sourire au début de la vie, et qui souvent termine sa carrière dans le deuil

ou par un désastre, et répétant à leur auditoire cet adage consacré en tout lieu par la sagesse des nations, et cependant toujours prompt à s'effacer de la mémoire des hommes, que la prospérité la plus éclatante touche souvent à la plus sombre adversité.

LES BOITIERS.

Après une longue promenade dans la forêt de Bersay, la plus belle du département de la Sarthe, et peut-être même de la France, j'arrivai au milieu d'une vente; on donne ce nom à la coupe en exploitation.

Les chênes centenaires, aux troncs droits comme les mâts d'un navire, sont là gisants, couchés sur le gazon; leur écorce lisse montre quelle séve vigoureuse s'élevait de la racine au sommet; c'est presque avec un serrement de cœur que l'on voit tomber ces géants si pleins de vie; les fleurs qui couvrent le sol se courbent comme éblouies du jour qui vient les visiter pour la première fois. Au calme habituel de cette retraite a succédé l'activité du travail. Des chants joyeux retentissent; le grincement de la scie, les coups de la hache, sont renvoyés par l'écho et semblent se multiplier en rebondissant de vallée en vallée. Dans une vente, le bois se débite sous toutes les formes.

Ici, le charpentier l'équarrit; là, le fendeur est entouré d'énormes billes qu'il divise en merrain pour fabriquer les tonneaux, en lattes, en bardeaux, en feuilles minces et flexibles pour servir à faire des seaux; plus loin se trouve l'atelier des boîtiers. Leurs cabanes, adossées à quelques gros chênes, sont construites avec des branchages de rebut, et couvertes de mousse et de coquilles. Rien de plus nécessaire que ce genre d'ouvriers, qui, avec un très-petit nombre d'outils d'une simplicité toute primitive, façonnent les objets de ménage les plus indispensables à la campagne. Le bois de fouteau est le seul qu'ils emploient.

Les boîtiers fabriquent le plat pour façonner le beurre, la pelle pour remuer le blé, la boîte pour conserver le sel, la sébile qui contient la maigre pitance du journalier, le fuseau, l'attelle et la sellette du harnais de charrette, le soufflet, le godet. Pour donner une idée du travail des boîtiers, il suffit de prendre comme exemple la fabrication du godet, ce simple ustensile que l'on trouve dans toutes les cuisines.

Un godet, qui se vendra quarante centimes, passe successivement dans les mains de cinq ouvriers d'abord le fendeur, à l'aide de la babou (fig. 6), frappe sur le départoir (fig. 5), divise les grumes en plusieurs quartiers; le bûcheur, avec la hache (fig. 2), donne la première façon; le tourneur s'empare du morceau de bois et, le montant sur

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En février 1569, Marie Stuart fut transportée de Bolton | excuser si j'escriptz si mal, car le logis, non habitable et au château de Tutbury, dans le comté de Stafford. Le 10 froid, me cause rhume et dolleur de teste. Votre affecde ce mois, la malheureuse reine d'Écosse terminait une de ses lettres à Élisabeth par ces mots : Il vous playra

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(1) Jean de Gand, duc de Lancastre, troisième fils d'Edouard III.

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