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CHAPITRE TROISIEME.

Sur la Lumière.

S. I.

De la nature de la Lumière.

I l'on refléchit fur la reffemblance qui se trouve entre le Son & la Lumière, de la quelle j'ai deja fait mention, on comprend qu'il eft naturel que la production de la Lumière fe faffe de la même manière que celle du Son. Nous venons de voir qu'il confifte dans la propagation d'un mouvement vibratoire par l'air. Il eft donc très vraisemblable que la Lumiè re confifte dans une pareille propaga tion d'un mouvement vibratoire dans un autre milieu élastique, plus rare & plus fubtil que l'air. Ce fentiment eft celui de Monfieur Euler. Je citerai encore ici un paffage de fa favante Differtation. J'en uferai plufieurs fois de même, l'autorité d'un auffi habile Homme, & auffi généralement eftimé étant d'un très grand poids, & ne pouvant appuyer mon fentiment d'un nom plus refpectable que le

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fien. Avant que d'embraffer, dit-il, ,, ce fentiment, il faut lever un obstacle de la dernière importance. Le grand Newton, à qui nous fommes infiniment redevables fur cette matière, étoit d'un fentiment tout à fait contraire. Il foutenoit que les rayons de la Lumière fortoient immédiatement du Soleil où il femble que l'hypothèze du Vuide ait porté ce grand Philofophe à foutenir ce fentiment; quoique, par ce même mouvement rapide de la matière Solaire, il a été obligé de remplir tout l'Univers. Mais il y a de fi fortes ob,, jections à oppofer à cette hypothèse, ,,& elle fe trouve expofée à de fi gran

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des difficultés, que nous nous trouvons ,, obligés de l'abandonner tout à fait. En prémier lieu, nous ne pouvons pas nier l'exiftance d'un Ether, ou d'un fluïde ,, incomparablement plus fubtil & plus élaftique que l'air. Les phénomènes de la Dureté, de l'Elafticité, de la Pefanteur, du Magnétifme & de l'Electricité des Corps prouvent abfolument l'existance d'un tel fluïde, fi nous ne voulons pas recourir à des qualités occultes. Or l'exiftance d'un tel fluïde eft abfolument incompatible avec l'ex,, plo

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,, plosion actuelle des rayons du Soleil. "

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J'AJOUTERAI aux fages réfléxions de Monfr. Euler, que fi l'hypothèse Newtoniene avoit lieu, la perte de la ma tière du Soleil feroit fi grande, que cet Aftre feroit détruit & diffipé depuis longtems, comme nous l'avons montré dans le prémier Chapitre de ce Difcours. Il faut donc établir que la Lumière eft la même chofe dans l'Ether, que le Son dans l'air. Nous avons vû qu'il n'émane aucune partie d'une corde frapée pour venir à nos oreilles. Nous établirons encore qu'il ne fort aucun rayon du Globe Solaire, c'est-à-dire du corps du Soleil. Cet Aftre en rempliffant continuellement un efpace prodigieux de Lumière,ne perd rien de fa matière comme une cloche ne perd rien de fon poids en remplissant une grande étendue du bruit qu'elle caufe.

LES Corps lumineux preffent la matière étherée, lui donnent un mouvement de vibration, c'eft-a-dire un mouvement qui fait avancer & reculer les rayons; c'eft pourquoi tantôt les rayons font dardés dans l'oeil, tantôt ils réjailliffent repouffés par le reffort des fibres fur les quels ils tombent. D'ailleurs les

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parties angulaires des corps lumineux tournant fur leur centre préfentent tantôt la pointe aux rayons qui font forcés d'avancer, tantôt le côté; & alors les rayons, trouvant un petit efpace libre, reviennent l'occuper.

L'on ne peut douter que la Lumière ne foit une matière. Elle touche, elle bleffe l'organne de la vuë; elle cause, lorsqu'elle eft trop vive, une fenfation de douleur. Il faut donc qu'elle heurte & frappe ces fibres: elle ne pouroit les frapper, fi elle n'étoit pas matière, puifqu'il n'y a qu'un corps qui puiffe toucher un corps.

LA matière, de la quelle eft compofée la Lumière, doit être plus déliée que l'air, puifqu'elle pénètre le verre, le christal. Lorfqu'on a pompé l'air dans la Machine du Vuide, le Réci ient refte toujours plein de Lumière.

LE mouvement de vibration dont la lumière eft agitée doit être exceffivement prompt. Il l'eft infiniment plus que celui du Son qui parcourt cent quatrevingt toifes dans une feconde. La Lumière va du moins fix cens mille fois plus vite. La promptitude des impreffions de la Lumière tranfmife dans l'Ether dépend de fon élafticité & de fa denfité. Si ces

deux chofes nous étoient connuës, elles nous ferviroient à découvrir la véritable viteffe de la Lumière. Mais quoique ni l'une ni l'autre naient pu encore être déterminées par les expériences qui prouvent l'existance de l'Ether, il est pourtant certain que ce milieu eft incomparablement plus fubtil & moins dense que l'air. Ainfi la viteffe de la Lumière doit être beaucoup plus grande que celle du Son, puifque la viteffe avec la quelle les impreffions fe répandent dans un milieu élastique eft comme la racine quarrée de l'élafticité divifée par la densité; de forte que la diminution de la densité auroit auffi bien la viteffe que l'augmentation de l'élafticité. Or les expériences, par les quelles on a prouvé l'existance de l'Ether, ont fervi à faire connoitre que fon élasticité eft infiniment plus grande qué celle de l'air que nous refpirons. Il s'en fuit donc que la viteffe de la Lumiè re doit être infiniment plus prompte que celle du Son.

LE mouvement de la Lumière eft droit. Si dans une chambre l'on fait un trou à deux portes diametralement oppofées, & que l'on approche par déhors de la Lumière d'un des deux trous, la Lumière traver

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