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lefquelles il prétend les établir. Voyons encore les opinions différentes de quelques Philofophes.

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دو

Mr. de Voltaire, dans fes Elémens de Newton, établit,, que la lumière, c'est le ,, feu-lui même, lequel brule à une pe tite distance, lorfque fes parties font moins tenuës, ou plus rapides, ou plus réunies; & qui éclaire doucement ,, nos yeux, quand il agit de plus loin, ,, quand fes particules font plus fines, moins rapides, & moins réunies". Le feu & la lumière étant donc une feule & même chofe, qui connoît la nature de l'un, doit connoitre celle de l'autre. Nous venons de voir que Mr. s'Gravefande avoue qu'il n'a découvert de leur nature que certaines propriétés, & qu'il en ignore beaucoup d'autres. Mr. de Voltaire penfoit différemment de ce profond Newtonien; car lorfqu'il compofa fes Elémens de la Philofophie Newtonienne, il étoit perfuadé qu'il connoiffoit, ou peu s'en faut, la nature intime du feu. Voici comment il s'explique.

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La

lumière eft, de tous les corps qui fe font fentir à nous, le plus délié, le plus approchant de l'infini en petit. C'eft pour ,, tant celui que nous connoiffons davan ,, tage.

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,,tage. On l'a fuivi dans fes mouvemens, dans fes effets. On eft parvenu à l'anatomifer, à le féparer en toutes fes ,, parties poffibles. C'eft celui de tous ,, les corps, dont la nature intime est ,, le plus dévelopée ". Mr. de Voltaire écrivoit ainfi en 1737. Mais comme plus on philofophe, & plus on devient circonfpect, il a parlé différemment en 1739. Il a fans doute fenti que dire que la nature intime d'une chofe eft dévelopée, c'eft prétendre en connoître fi parfaitement l'effence, & par conféquent toutes les propriétés, que cette chofe n'ait d'autres propriétés que celles que nous lui attribuons, & qui découlent par une fuite néceffaire de fon effence. C'eft fans doute cette réflexion qui a engagé Mr. de Voltaire à s'expli quer, dans le Difcours qu'il a présenté à l'Académie des Sciences, avec une retenuë qui égale celle de Mr. de s'Gravefande. Nous ne connoiffons, dit-il, , guères plus la nature du Feu, que les ,, prémiers Hommes ont dû connoître ,, fon exiftance. Nous avons des ex

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périences qui, quoique très fines pour nous, font encore très grofliéres par

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,, rapport aux principes des choses. Ces expériences nous ont conduits à quel,, ques vérités, à des vraisemblances, & fur-tout à des doutes en grand nombre ".

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دو

JE ne faurois m'empêcher, avant de finir cette Section, d'examiner le fentimen que Madame la Marquife Du Châtelet a voulu établir dans fon Difcours imprimé dans les Mémoires de l'Acadé mie. Elle a prétendu que le Feu n'est point le réfultat du mouvement; que c'eft une fubftance fimple, que rien ne produit, qui ne fe forme de rien, & qui ne fe change en rien; que le Feu a quelques unes des propriétés primordiales de la matière, fon étendue, fa divifibilité; mais que l'impénétrabilité de ce même Feu n'étoit pas démontrée; qu'il n'eft pas pefant, qu'il ne tendoit point vers un centre comme les autres corps; que fa nature eft de tendre à l'équili bre, qu'il eft répandu dans tout l'efpace, & que dans un même air, tous les corps contiennent une égale quantité de Feu dans leur fubftance, fi l'on en excepte les Créatures qui ont reçû la vie; que le feu enfin eft d'une nature mitoyenne; qu'il n'eft ni matière ni efpa

ce,

ce. Si le fentiment de Madame la Marquife Du Châtelet étoit véritable, il s'eri faivroit que le Feu feroit l'ame du Monde, ce qui le vivifieroit, & lui donneroit la force motrice. Il paroit même que cette ingénieufe Savante penche affez vers cette opinion; car elle prétend qu'une des propriétés du Feu, c'eft de n'être déterminé vers aucun point, & de fe répandre également. Ses parties ont la méme tendance à fe fuir, que celles des autres corps ont à s'attirer. C'est cette propriété que le Feu oppofe fans ceffe à l'adunation des corps, & c'eft par elle qu'il vivifie & conferve l'Univers. C'eft le même Feu qui imprime à la matière le mouvement. La direction de ce mouvement tend également en tous fens; ainfi toutes les parties internes de la matière font par cette action dans un mouvement continuel. C'eft ce mouvement qui eft la caufe de l'accroiffement & de la diffolution de tout ce qui exifte dans l'Univers. Car enfin, la Marquife tranche le mot. Le Feu, dit-elle, est, pour ainsi dire, l'ame du Monde, le foufle de vie répandu par le Créateur fur fon Ouvrage. Ces dernières paroles mettent ce Sifthème à l'abri de toutes les objections Tomé I

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qu'on

qu'on pouroit lui faire du côté de la Religion. Dieu peut avoir donné une ame

aux Bêtes. Cette ame eft émanée de fa puiffance, & lui étant foumife n'a rien de contraire à la Nature Divine. Le favant Gaffendi a beaucoup de pente à croire que non feulement la Terre, la Lune, le Soleil, & tous les autres Globes qui compofent la machine du Monde, ont chacun leur ame, prenant à peu près l'ame felon les idées de Démocrite, d'Hypocrate, & d'Ariftote; mais il penfoit encore qu'il n'y a rien en particulier qui ne foit animé, comme les Pierres précieuses, l'Aiman, les Plantes, les Semences, & qu'ils ont leur ame à leur manière, par le moyen de la quelle ils connoiffent, pour ainfi dire, ce qui leur eft propre pour leur confervation, ou qui leur eft nuifible. Je penfois, dit Gaf fendi, que cela ne dérogeoit aucunement à la Foi, en ce que cette ame feroit fenfée n'être autre chose qu'une certaine force dépendante de Dieu, & une ame à fa manière, c'eft-à-dire, d'une efpèce particulière, dif férente de la fenfitive, de laraifonnable, ម nommément incapable des dons Spirituels de la grace & de la béatitude.

LE Sifthème, qui admet le Feu pour

-l'a

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