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ces grands corps agissent aussi sur les corps animés, particulièrement sur le système nerveux, moyennant un fluide très-subtil qui pénètre tout. Et de même que, sous cette influence, il s'opère dans la mer un flux et un reflux, aussi, dans les corps animés, il y a une tension et une rémission, des sortes de marées. Ce fluide subtil, l'agent général de tous ces changements, ressemble beaucoup par ses propriétés à l'aimant. En conséquence, il s'appellera Magnétisme animal.

Vers 1774, Mesmer fit la rencontre du P. Hell, jésuite, professeur d'astronomie. Ce père, établi à Vienne, guérissait des maladies au moyen de fers aimantés. Il avait notamment guéri une dame d'une maladie de cœur chronique, et s'était guéri lui-même d'un rhumatisme aigu. Vingt ans auparavant, Lenoble s'était distingué dans la construction de ces aimants, et il y avait deux siècles que Paracelse avait recommandé ce remède contre les maux de dents. Mesmer, frappé des expériences qu'il avait sous les yeux, et trouvant dans ces effets la confirmation de ses théories astronomiques, établit chez lui une maison de santé, dans laquelle il s'of frait à traiter gratuitement les malades par les mêmes procédés. Magnétisant et électrisant, il fit construire des lames et des anneaux aimantés, qu'il adressa à ses confrères dans diverses parties de l'Allemagne, et publia dans les journaux de

Vienne les cures qu'il opérait. Plusieurs personnages attestèrent qu'ils avaient été guéris de différentes maladies, parmi lesquels le conseiller Osterwald, directeur de l'Académie des sciences de Munich, atteint de paralysie.

Peu à peu Mesmer s'émancipa, et prétendit pouvoir se passer des appareils du P. Hell; il soutint l'existence du magnétisme animal essentiellement distinct de l'aimant ainsi que de l'électricité; il renonça complétement, en 1776, à l'emploi des deux derniers agents.

Pendant ce temps, il avait tenté des cures, se débattait contre les savants de son pays, et les réfutait dans une lettre explicative adressée à la plupart des Académies et des savants de l'Europe. L'Académie de Berlin seule répondit, et répondit qu'à son avis il était dans l'illusion.

Fatigué de ces luttes, il voyage en Souabe et en Suisse. Dans ce dernier pays il rencontre encore un homme extraordinaire, qui guérissait d'une façon merveilleuse les maladies du corps ; c'était autre chose que l'aimant. Gassner, ecclésiastique suisse, pour chasser les maux, exorcisait les malades et réussissait. Il ne s'agissait que de savoir si les maux étaient naturels ou diaboliques. Il ordonnait donc à Satan de se déclarer, par trois interpellations et trois signes de croix. S'il n'y avait nulle réponse, le mal était naturel, et on le traitait par

les remèdes ordinaires; s'il survenait des convulsions, c'était signe de la présence du diable, et Gassner, par des paroles sacrées et des attouchements d'objets religieux, le chassait. Quand arri vait une rechute, il accusait les malades d'avoir péché ou manqué de foi dans l'intervalle. Selon ces idées, il avait, en 1774, écrit un livre: Manière de vivre pieux et bien portant. Renvoyé par l'évêque de Mersebourg, appelé par l'évêque de Ratisbonne, il fit des prodiges. Le fameux Lavater avait en lui la foi la plus entière; il propagea plus tard le magnétisine dans l'Allemagne. Mesmer vit opérer Gassner, reconnut les guérisons, et les attribua au magnétisme animal.

Retourné à Vienne, Mesmer traita une fille de dix-huit ans, aveugle depuis l'âge de quatre ans, et prétendit lui avoir rendu la vue. Comment se fit-il qu'après avoir publié par écrit sa reconnaissance, le père se présenta l'épée à la main chez Mesmer pour lui reprendre sa fille, qui résistait? Comment se fit-il que cette malheureuse fut jetée la tête contre la muraille « par sa barbare mère?» Cela n'est pas très-clair. Toujours est-il que pératrice envoya l'ordre à Mesmer « de finir cette supercherie.

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II.

Mesmer à Paris. -- Mémoire sur la découverte du magnétisme.

Le baquet de Mesmer.

d'Holbach.

La Harpe au baquet; Mesmer chez

- Le temps favorable au magnétisme.

Mesmer part et se rend à Paris (février 1778), où il publie son Mémoire sur la découverte du magnétisme (1779), livre moitié astronomique, moitié médical, où il annonçait la découverte de la panacée universelle. Pourvu qu'il connaisse et qu'il sachediriger le fluide magnétique, le médecin « jugera sûrement l'origine, la nature et les progrès des maladies, même des plus compliquées, en empêchera l'accroissement et parviendra à leur guérison sans aucun danger. Il guérira directement les maladies. de nerfs, indirectement toutes les autres. L'art de guérir parviendra ainsi à sa dernière perfection. La nature offre un moyen universel de guérir et de préserver les hommes. »

Il trouva un disciple tout prêt dans Deslon, docteur régent de la Faculté et premier médecin du comte d'Artois. Il l'initia à sa doctrine; voyons-lesà l'œuvre.

Au milieu d'une grande salle est une caisse circulaire, en bois de chêne, élevée d'un pied ou d'un pied et demi, qu'on nomme le baquet. Ce baquet

renferme simplement de l'eau, et dans cette eau divers objets, tels que verre pilé, limaille, etc., ou encore ces mêmes objets à sec, sans que rien soit électrisé ou aimanté. Le couvercle est percé d'un certain nombre de trous, d'où sortent des branches de fer coudées et mobiles. Dans un coin de la salle est un piano-forte; on y joue différents airs sur des mouvements variés, surtout vers la fin des séances. On y joint quelquefois du chant. Les portes et les fenêtres de la salle sont exactement fermées des rideaux ne laissent pénétrer qu'une lumière douce et faible. Les malades en silence forment plusieurs rangs autour de ce baquet, et chacun a sa branche de fer, qui, au moyen d'un coude, peut être appliquée sur la partie malade. Une corde passée autour de leur corps les unit les uns aux autres. Quelquefois on forme une seconde chaîne en se communiquant par les mains, c'està-dire en appliquant le pouce entre le pouce et le doigt index de son voisin; alors on presse le pouce qu'on tient ainsi; l'impression reçue à la gauche se rend par la droite, et elle circule à la ronde. Tous ceux qui magnétisent ont à la main une baguette de fer longue de dix à douze pouces. A ceux qui demandent quelque chose à boire on donne de l'eau où est dissoute de la crème de tartre. Les malades sont magnétisés à la fois branches de fer, par la corde, par l'union des

par

les

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