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SOMMAIRE.

Objet de la leçon. - Caractère général de la révolution d'Angleterre, Ses principales causes.

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Elle est plus politique que religieuse. Trois grands partis s'y succèdent. 1o Du parti de la réforme légale; 2° du parti de la révolution politique; 3° du parti de la révolution sociale. Ils échouent tous.

De Cromwell. - De la restauration des Stuart. Du ministère légal.

ministère des roués. Du ministère national. révolution de 1688 en Angleterre et en Europe.

Du

De la

COURS

D'HISTOIRE

MODERNE.

MESSIEURS,

Vous avez vu que, dans le cours du seizième siècle, tous les élémens, tous les faits de l'ancienne société européenne avaient abouti à deux faits essentiels, le libre examen et la centralisation du pouvoir. L'un prévalait dans la société religieuse; l'autre dans la société civile. En même temps triomphaient en Europe l'émancipation de l'esprit humain et la monarchie pure.

Il était difficile qu'une lutte ne s'engageât pas

un jour entre ces deux faits, car il y avait entre eux quelque chose de contradictoire ; l'un était la défaite du pouvoir absolu dans l'ordre spirituel, l'autre sa victoire dans l'ordre temporel; l'un préparait la décadence de l'ancienne monarchie ecclésiastique, l'autre consommait la ruine des anciennes libertés féodales et communales. Leur simultanéité tenait, vous l'avez vu, à ce que les révolutions de la société religieuse avaient marché plus vite que celles de la société civile; l'une était arrivée au moment de l'affranchissement de la pensée individuelle, tandis que l'autre n'en était encore qu'au moment de la concentration de tous les pouvoirs en un pouvoir général. La coïncidence des deux faits, loin de provenir de leur similitude, n'empêchait donc point leur contradiction. Ils étaient l'un et l'autre un progrès dans le cours de la civilisation, mais des progrès liés à des situations différentes, des progrès de date morale diverse, pour ainsi dire, quoiqu'ils coïncidassent dans le temps. Il était inévitable qu'ils en vinssent à se heurter et à se combattre avant de réussir à se concilier.

Leur premier choc eut lieu en Angleterre. La lutte du libre examen, fruit de la réforme, contre la ruine de toute liberté politique, fruit

des succès de la monarchie pure, la tentative d'abolir le pouvoir absolu dans l'ordre temporel comme dans l'ordre intellectuel, c'est là le sens de la révolution d'Angleterre ; c'est là son rôle dans le cours de notre civilisation.

Pourquoi cette lutte s'est-elle engagée en Angleterre plutôt qu'ailleurs? pourquoi les révolutions de l'ordre politique ont-elles coïncidé de plus près dans ce pays que sur le continent, avec les révolutions de l'ordre moral?

La royauté anglaise a subi les mêmes vicissitudes que la royauté continentale; elle arriva, sous le règne des Tudor, à un degré de concentration et d'énergie qu'elle n'avait pas encore connu. Ce n'est pas à dire que le despotisme pratique des Tudor fût plus violent et coutât plus cher à l'Angleterre que n'avait fait celui de leurs prédécesseurs. Il y avait, je crois, bien autant d'actes de tyrannie, de vexations, d'injustices, sous les Plantagenet que sous les Tudor, davantage peut-être. Je crois aussi qu'à cette époque, sur le continent, le gouvernement de la monarchie pure était plus rude et plus arbitraire qu'en Angleterre. Le fait, nouveau sous les Tudor, c'est que le pouvoir absolu devient systématique : la royauté prétend

à une souveraineté primitive, indépendante; elle tient un langage qu'elle n'avait point tenu jusqu'alors. Les prétentions théoriques de Henri VIII, d'Élisabeth, de Jacques Ier, de de Charles Ier, sont tout autres que n'avaient été celles d'Édouard Ier ou d'Édouard III, quoiqu'en fait le pouvoir de ces deux derniers rois ne fût ni moins arbitraire ni moins étendu. Je le répète, c'est le principe, le système rationel de la monarchie qui change en Angleterre au seizième siècle, plutôt que sa puissance pratique : la royauté se prétend absolue et supérieure à toutes les lois, même à celles qu'elle déclare vouloir respecter.

D'un autre côté, la révolution religieuse ne s'accomplit point en Angleterre comme sur le continent; elle y fut l'œuvre des rois euxmêmes. Ce n'est pas que là aussi il n'y eût depuis long-temps des germes, des essais même de réforme populaire, et qu'ils n'eussent probablement pas tardé à éclater. Mais Henri VIII prit les devans; le pouvoir se fit révolutionnaire. Il en résulta qu'au moins dans son origine, comme redressement des abus et de la tyrannie ecclésiastique, comme émancipation de l'esprit humain, la réforme anglaise fut beau

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