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nocent III y dépouilla le comte de Toulouse de tous ses biens, en vertu de l'excommunication. C'est le premier concile qui ait parlé de transsubstantiation.

En 1245, concile général de Lyon, ville alors impériale, dans laquelle le pape Innocent IV excommunia l'empereur Frédéric II, et par conséquent le déposa et lui interdit le feu et l'eau: c'est dans ce concile qu'on donna aux cardinaux un chapeau rouge, pour les faire souvenir qu'il faut se baigner dans le sang des partisans de l'empereur. Ce concile fut la cause de la destruction de la maison de Souabe, et de trente ans d'anarchie dans l'Italie et dans l'Allemagne.

Concile général à Vienne en Dauphiné, en 1311, où l'on abolit l'ordre des templiers, dont les principaux membres avaient été condamnés aux plus horribles supplices, sur les accusations les moins prouvées.

En 1414, le grand concile de Constance, où l'on se contenta de démettre le pape Jean XXIII convaincu de mille crimes, et où l'on brûla Jean Hus et Jérôme de Prague, pour avoir été opiniâtres, attendu que l'opiniâtreté est un bien plus grand crime que le meurtre, le rapt, la simonie et la sodomie.

En 1430 le grand concile de Basle, non reconnu à Rome, parce qu'on y déposa le pape Eugène IV, qui ue se laissa point déposer:

Les Romains comptent pour concile général le cinquième concile de Latran, en 1512, convoqué contre Louis XII, roi de France, par le pape Jules II; mais ce pape guerrier étant mort, ce conc le s'en alla en fumée.

Enfin nous avons le grand concile de Trente, qui n'est pas reçu en France pour la discipline; mais le dogme en est incontestable, puisque le Saint-Esprit arrivait de Rome à Trente toutes les semaines, dans la malle du courrier, à ce que dit Fra-Paolo Sarpi; mais Fra-Paolo Sarpi sentait un peu l'hérésie.

CONFESSION.

Le repentir de ses fautes peut seul tenir lieu d'innocence. Pour paraître s'en repentir, il faut commencer par les avouer. La confession est donc presque aussi ancienne que la société civile.

On se confessait dans tous les mystères d'Égypte, de Grèce, de Samothrace. Il est dit dans la Vie de MarcAurèle, que lorsqu'il daigna s'associer aux mystères d'Éleusine, il se confessa à l'hiérophante, quoiqu'il fût l'homme du monde qui eût le moins besoin de confession.

Cette cérémonie pouvait être très salutaire; elle pouvait aussi être très dangereuse: c'est le sort de toutes les institutions humaines. On sait la réponse de ce Spartiate à qui un hierophante voulait persuader de se confesser : « A qui dois-je avouer mes fautes? est-ce à Dieu ou à >> toi ? C'est à Dieu, dit le prêtre. Retire-toi donc, » homme. » ( Plutarque, Dits notables des Lacédémo niens).

Il est difficile de dire en quel temps cette pratique s'établit chez les Juifs, qui prirent beaucoup de rites de leurs voisins. La Mishna, qui est le recueil des lois juives (1), dit que souvent on se confessait en mettant la main sur un veau appartenant au prêtre; ce qui s'appe lait la confession des veaux.

Il est dit dans la même Mishna (2), que tout accusé qui avait été condamné à la mort, s'allait confesser devant témoins dans un lieu écarté, quelques moments avant son supplice. S'il se sentait coupable, il devait dire: « Que ma mort expie tous mes péchés »; s'il se sentait innocent, il prononçait: « Que ma mort expie mes pé>>chés, hors celui dont on m'accuse. >>

Le jour de la fête que l'on appelait chez les Juifs l'expiation solennelle (3), les Juifs dévots se confessaient les (1) Mishna, tome Il, page 394.

(2) Tome IV, page 134.

(3) Synagogue judaïque, Chap. XXXV.

uns les autres, en spécifiant leurs péchés. Le confesseur récitait trois fois treize mots du psaume LXXVII, ce qui fait trente-neuf ; et pendant ce temps il donnait trente neuf coups de fouet au confessé, lequel les lui rendait à son tour; après quoi ils s'en retournaient quitte à quitte. On dit que cette cérémonie subsiste encore.

On venait en foule se confesser à saint Jean pour la réputation de sa sainteté, comme on venait se faire baptiser par lui du baptême de justice, selon l'ancien usage; mais il n'est point dit que saint Jean donnât trente neuf coups de fouet à ses pénitents.

La confession alors n'était point un sacrement ;il y en a plusieurs raisons. La première est que le mot de sacrement était alors inconnu; cette raison dispense de déduire les autres. Les chrétiens prirent la confession dans les rites juifs, et non pas dans les mystères d'Isis et de Cérès. Les Juifs se confessaient à leurs camarades, et les chrétiens aussi. Il parut dans la saite plus convenable que ce droit appartint aux prêtres. Nul rite, nulle cérémonie ne s'établit qu'avec le temps. Il n'était guère possible qu'il ne restât quelque trace de l'ancien usage des laïques de se confesser les uns aux autres.

Voyez le paragraphe ci-dessous, Si les laïques, etc. Page 363.

Du temps de Constantin, on confessa d'abord publiquement ses fautes publiques.

Au cinquième siècle, après le schisme de Novatus et de Novatin, on établit les pénitenciers pour absoudre ceux qui étaient tombés dans l'idolatrie. Cette confession aux prêtres pénitenciers fut aholie sous l'empereur Théodose (1). Une femme s'étant accusée tout haut au pénitencier de Constantinople d'avoir couché avec le diacre, cette indiscrétion causa tant de scandale et de trouble dans toute la ville (2), que Nectarius permit à tous les

(1) Socrate, Liv, V. Sozomène, Liv. VII.

(1) En effet, coment cette indiscrétion aurait-elle causé un scandale public si elle avait été secrète!

fidèles de s'approcher de la sainte table sans confession, et de n'écouter que leur conscience pour communier. C'est pourquoi saint Jean-Chrysostôme, qui succéda à Nectarius, dit au peuple, dans sa cinquième homélie : « Confessez-vous continuellement à Dieu; je ne vous >> produis pas sur un théâtre avec vos compagnons de » service pour leur découvrir vos fautes. Montrez à >> Dieu vos blessures, et demandez-lui les remèdes ; avouez » vos péchés à celui qui ne les reproche point devant les » hommes. Vous les céleriez en vain à celui qui connaît >> toutes choses, etc. >>

On prétend que la confession auriculaire ne commença en occident que vers le septième siècle, et qu'elle fut instituée par les abbés, qui exigèrent que leurs moines vinssent deux fois par an leur avouer toutes leurs fautes. Ce furent ces abbés qui inventèrent, cette formule : « Je >> t'absous autant que je le peux et que tu en as besoin. » Il semble qu'il eût été plus respectueux pour l'Étre suprême, et plus juste de dire : « Puisse-t-il pardonner » à tes fautes et aux miennes! >>

Le bien que la confession a fait, est d'avoir obtenu quelquefois des restitutions de petits voleurs. Le mal est d'avoir quelquefois, dans les troubles des états, forcé les pénitents à être rebelles et sanguinaires en conscience. Les prêtres guelfes refusaient l'absolution aux gibelins, et les prêtres gibelins se gardaient bien d'absoudre les guelfes.

Le conseiller d'état Lénet rapporte, dans ses Mémoires, que tout ce qu'il put obtenir en Bourgogne pour faire soulever les peuples en faveur du prince de Condé, détenu à Vincennes par le Mazarin, fut de « lâcher des >> prêtres dans les confessionnaux. » C'est en parler comme de chiens enragés qui pouvaient souffler la rage de la guerre civile dans le secret du confessionnal.

Au siége de Barcelone, les moines refusèrent l'absolution à tous ceux qui restaient fidèles à Philippe V.

Dans la dernière révolution de Gênes, on avertissait toutes les consciences qu'il n'y avait point de salut pour quiconque ne prendrait pas les armes contre les Autrichiens.

Ce remède salutaire se tourna de tout temps en poison. Les assassins des Sforzes, des Médicis, des princes d'Orange, des rois de France, se préparèrent aux parricides par le sacrement de la confession.

Louis XI, la Brinvilliers, se confessaient dès qu'ils avaient commis un grand crime, et se confessaient souvent, comme les gourmands prennent médecine pour avoir plus d'appétit.

De la révélation de la confession.

Jaurigni et Balthazar Gérard, assassins du prince d'Orange Guillaume fer; le dominicain Jacques Clément, Jean Châtel, le feuillant Ravaillac, et tous les autres parricides de ce temps-là, se confessèrent avant de commettre leurs crimes. Le fanatisme, dans ces siècles déplorables, était parvenu à un tel excès, que la confession n'était qu'un engagement de plus à consommer leur scélératesse: elle devenait sacrée, par cette raison que la confession est un sacrement.

Strada dit lui-même que Jaurigni non antè facinus aggredi sustinuit quàm expiatam noxis animam apud dominicanum sacerdotem cælesti pane firmaveril. « Jau>> rigni n'osa entreprendre cette action sans avoir for»tifié par le pain céleste son âme purgée par la confes»sion aux pieds d'un dominicain. »

On voit dans l'interrogatoire de Ravaillac, que ce `malheureux sortant des feuillants, et voulant entrer chez les jésuites, s'était adressé au jésuite d'Aubigni; qu'après lui avoir parlé de plusieurs apparitions qu'il avait eues, il montra à ce jésuite un couteau sur la lame duquel un cœur et une crois étaient gravés, et qu'il dit ces propres

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