Mon seul nom prononcé fera rougir leur front. Et toi, dont l'hyménée avait fait ma conquête, La mort!... Quel bruit soudain ébranle mon abîme! Mes tourments vont finir, ma liberté commence : A. Bignan. Le jeune pâtre. Voici la nuit, qui va descendre, Je reste seul pauvre orphelin ! On vous attend dans vos chaumières, Moi l'on ne m'attend pas. Moi, souffrant et pauvre, mon âme Helas! ici, jusqu'à l'aurore Je reste, et demain, sans espoir, Sont là-bas ! On vous attend dans vos chaumières, Allez, allez, Moi l'on ne m'attend pas. Émile Souvestre. Le sylphe. Je suis un sylphe, une ombre, un rien, un rêve, Hôte de l'air, esprit mystérieux, Léger parfum que le zéphir enlève, Anneau vivant qui joint l'homme et les dieux. De mon corps pur les rayons diaphanes Mais je me cache aux regards des profanes, J'aime à me voir dans le cristal des eaux. Dans vos jardins quelquefois je voltige, Sans que mon poids fasse incliner leur tige, Dans vos foyers j'entre avec confiance, Lorsque sur vous la nuit jette son voile, "Qui d'un ami nous présage la mort." A. Dumas. Le départ du petit Savoyard. Pauvre petit, pars pour la France; Que te sert mon amour? Je ne possède rien. On vit heureux ailleurs; ici dans la souffrance : Tant que mon lait put te suffire, Tant qu'un travail utile à mes bras fut permis, Renonce aux baisers de ton fils. Mais je suis veuve; on perd sa force avec la joie. Où mendier pour toi? Chez des pauvres aussi? Que feras-tu, mon fils, si Dieu ne te seconde ! Seul, parmi les méchants, (car il en est au monde) Sans ta mère, du moins, pour t'apprendre à souf frir? Oh! que n'ai-je du pain, mon fils, pour te nourrir! Mais Dieu le veut ainsi : nous devons nous soumettre: Porte au seuil des palais un visage content. Chante, tant que la vie est pour toi moins amère; Enfant, prends ta marmotte et ton léger trousseau; Répète, en cheminant, les chansons de-ta mère, Quand ta mère chantait autour de ton berceau. Maintenant de ta mère entends le dernier voeu: Souviens-toi, si tu veux que Dieu ne t'abandonne, Que le seul bien du pauvre est le peu qu'on lui donne. Prie, et demande au riche: il donne au nom de Dieu. Ton père le disait; sois plus heureux: adieu. A. Guiraud. La soeur grise. J'ai laissé pour toujours la maison paternelle ; Ne m'abandonne pas, toi qui m'as appelée, tiens! Et moi, qui console et soutiens, J'ai besoin d'être consolée. Ignorante du monde avant de le quitter, Je ne le hais point; et peut-être (Un mourant me l'a dit) j'aurais dû le connaître, Quand je me sens reprendre à sa joie éphémère, J'embrasse ta croix, ô mon Dieu! ... |