Page images
PDF
EPUB

Partout mon coeur te cherche et mon âme t'implore:

Quand la voix du matin vient éveiller l'aurore,
Le murmure des vents te porte mes soupirs;
Et quand l'astre du soir commence sa carrière,
Alors encor vers toi ma brûlante prière

Monte sur l'aile des zéphirs.

Souvent pour te louer ma harpe frémissante
S'accorde, dans la nuit, à ma voix gémissante :
Ses sons harmonieux se perdent dans les bois,
Et mêlant, ses concerts à l'hymne de louanges,
Du sein de la forêt, le choeur lointain des anges
S'éveille, et répond à ma voix.

Ainsi, le jour au jour répète mes cantiques,
La nuit dit à la nuit mes chants mélancoliques :
Mais quand dans cet exil, où ta main m'a jeté,
Mon coeur de tes bienfaits repasse la mémoire ;
Quand un rayon divin, émané de ta gloire,
Me révèle ta majestè,

Alors, prête à voler vers la plaine éthérée,
Du feu de ton amour mon âme dévorée
Veut briser les liens de sa captivité;

Elle fuit loin du monde, et, déployant ses ailes,
Monte et va s'enivrer aux voûtes éternelles

De gloire et d'immortalité.

Felicie d'Aizac.

La résurrection.

Il est ressuscité! le linceul de la terre

Ne couvre plus son front! Ineffable mystère !
Du sépulcre désert le marbre est soulevé!
Il est ressuscité! comme un guerrier fidèle,
Que le bruit du clairon à son poste rappelle....
Peuples, le Seigneur s'est levé.

Ainsi qu'un pélerin à moitié du voyage,
Sous l'abri d'un palmier couché durant l'orage
Se lève et, tout rempli de ses célestes voeux,
Secoue en s'éveillant une feuille séchée
Qui, pendant son sommeil, de l'arbre détachée,
S'était mêlée à ses cheveux;

Ainsi le mort divin, à l'aube renaissante,
A jeté loin de lui cette pierre impuissante,
Sacrilége gardien de son cadavre-roi ;

Quand son âme, du fond de la sombre vallée,
Au corps, qui l'attendait, tout à coup rappelée,
A dit: „Me voici, lève-toi!"

O père d'Israël! quelle voix bienheureuse
Vous a fait agiter votre tête poudreuse?
C'est lui, l'Emmanuel, le Christ libérateur!
Il a vaincu l'enfer frémissant sous ton glaive.
O vous, qui l'attendiez! oui! votre exil s'achève:
C'est lui, c'est lui, le Rédempteur !

Quel mortel avant lui, dans le séjour suprême,
Vivant aurait pu voir ce brûlant diadème,
Que l'oeil des chérubins n'ose jamais braver ?
Patriarches, c'est lui qui, dans le noir abîme,

Des coupables humains volontaire victime,
Est descendu pour vous sauver !

Aux prophètes anciens il voulut apparaître,
Quand ces hommes disaient les jours, qui doivent naître,
Comme un père à son fils raconte le passé;
Tel qu'un soleil brillant dans les déserts du vide,
Il se montrait d'avance à leur regard avide,
Le Christ par Dieu même annoncé !

Quand le juste Isaïe, aux ardentes paroles,
Proclamait sous le fouet, en face des idoles,
Celui qui pour le monde un jour devait venir !
Quand Daniel, confident des sombres destinées,
Roulait dans son esprit les futures années,
Se souvenant de l'avenir !

Or, c'était le matin: Salome et Madeleine,
Tout bas s'entretenant du sujet de leur peine,
Pleuraient amèrement l'homme crucifié ;

Voila que du saint temple a chancelé le faîte:
Les bourreaux ont pâli, croyant voir sur leur tête
Le Dieu, qu'ils ont crucifié.

Un jeune homme étranger, appuyé sur sa lance,
Au pied du monument est debout en silence;
Ses vêtements sont blancs, son visage est de feu:
„Celui que vous cherchez, ô femme inconsolée,
Dit-il avez douceur, il est en Galilée,

„Allez, il n'est plus en ce lieu !"

Chantons! qu'à la douleur succède enfin la joie;
Que l'or accoutumé, que la pourpre et la soie

Resplendissent encor sur l'autel attristé !
Que le prêtre vêtu de la robe de neige,
A l'éclat des flambeaux, dans un pompeux cortége,
Annonce le ressuscité!

Antony Deschamps.

A la mort.

Moissonneuse éternelle en la vallée humaine,
Qui n'as pas de repos au bout de la semaine,
Qui fauches sans relâche et ne sèmes jamais,
Où donc as-tu porté les épis que j'aimais?

O géante maudite aux mamelles pendantes,
Vieille fille ennuyée aux colères ardentes,
Ange déchu, de tous le plus maudit le Dieu,
Qui ne dit qu'un seul mot, un mot terrible: Adieu!
Juive errante, vivant de poussière et de larmes,
Traînant de tous côtés ton cortège d'alarmes,
L'orfraie annonce seul ton passage caché.

[ocr errors]
[ocr errors]

Ton arme est une faux, ton sceptre un os séché.
Quand donc finiras-tu, vieille actrice enrouée,
De baisser le rideau quand la farce est jouée ?
Quand donc tomberas-tu dans le gouffre béant
Qui s'ouvre sous tes pas, ô mère du néant?

Ton empire est partout. Partout où l'on respire,
Partout où l'on sourit, partout où l'on soupire,
Depuis le paradis jusqu'au fond de l'enfer,
Partout on te maudit, marâtre au coeur de fer.

Oui, sois maudite, ô mort, car ton arme fatale A coupé trop de fleurs sur ma rive natale;

S'irrite avec douceur et pardonne aisément.
Il soutient dans sa chute une feuille qui tombe;
Du berceau pas à pas il nous guide à la tombe;
Sa loi stable, au milieu du tourbillon des jours,
Nous conserve la vie en nous créant toujours.
Le Seigneur se plaisait aux jeux de notre enfance;
C'est par ses propres dons que notre erreur l'offense;
Il nous a donné l'être, espérons au Seigneur:
Le sentiment de l'être est l'instinct du bonheur.
Oui mortels, l'infini, c'est le Seigneur lui-même.

L'église.

Gaspard de Pons.

Voici l'heure; ouvrez-vous, maison de la prière !
Pénétrons dans ces murs encor silencieux :

On n'entend plus ici les vains bruits de la terre,
L'âme y goûte la paix des cieux.

Nautonier las des mers, je viens chercher la rive;
Je souffre et j'ai besoin de respirer l'air pur:
Laissez-moi m'abreuver à la source d'eau vive,
Comme l'Israélite obscur.

Mais la cloche résonne et la foule se presse;
Les enfants, les vieillards entrent dans le saint lieu:
La pauvre villageoise et la noble comtesse

Viennent prier le même Dieu.

Je mêlerai ma voix aux chants sacrés du prêtre ;
J'irai m'asseoir au banc des anciens du hameau,

« PreviousContinue »