La nature, à cet âge, étincelle de charme. Et le plaisir dans tous éparpille sa voix. Vieux, sans être un vieillard, l'esprit chauve et muet, Qui nous promet de loin un repos dont on doute. Quand on souffre, la mort ne vient que goutte à goutte. Voilà pourquoi mon âme est si triste, et pourquoi Le printemps, sans me voir, passe à côté de moi. Jules le Fèvre. Les feuilles. Soupir. Frémissez, frémissez sur vos tiges sonores, Feuilles qu'un vent du soir agite avec amour, Qui donnez un salut au lit pourpré du jour! Comme les ailes d'un oiseau, Comme la voix en deuil d'un ami qui soupire Pleurez-vous, chantez-vous, harpes mystérieuses, Quand votre bruit d'abord faible, indécis, sans noms, Comme un torrent grossi par des ondes nombreuses Roule, mugit, s'étend, éclate en mille sons? De vos vagues de bruit que roule La force mystique de l'air, Qu'elle extase d'amour à chaque instant découle Comme un sel qu'à la rive abandonne la mer!... Qu'il est doux le réveil de vos flots de verdure Par des peuplades habité. Des insectes brillans le nombre vous inonde Vanité! Disparus!... Dans un jour, dans une heure, Ces êtres où le Tout-Puissant Avait placé tant d'or, de bonheur et de sève Comme vous, ils avaient leurs voix et leur parure; Chaque instant ils prenaient leur part; Feuilles, sous votre ombrage un insecte qui pense Vient aussi vous parler, écouter votre accord. Ame et corps, tout ensemble, éternelle substance Comme un faible ciron recevra-t-il la mort? Laissera-t-il aussi l'ombrage, Où de doux rêves l'ont bercé, Et lorsque son esquif quittera le rivage, Quand sur son front la mort aura battu de l'aile, Ne revivra-t-il dans les coeurs, Et le pinceau du temps sur sa fragile image Peut-être de l'oubli, le voile impénétrable Couvrira son tombeau, tandis que les humains Observant dans la nuit quelque monceau de sable, Oublîront ces accens comme des bruits lointains? L'homme sur les os de son père Peut-être en riant passera; Et pour chercher de l'or entr'ouvrira la terre C'est la vie!... on s'agite, on passe sur la sphère, Pleurent un jour ou deux... et puis leur voix heureuse Nos noms sont pour l'ami qui le plus nous vénère Des roses que détruit un souffle délétère, Sont encor nos dieux révérés ! Pauvres humains, quoi! toujours boire Dans un vase d'erreurs, et toujours altérés !!!... Suivrons-nous de nos corps les folles utopies, Où le ver des tombeaux rampe pour se nourrir Que la flamme un jour anima, Pour servir de palais à ce qui tient de l'ange, Non, que devant le Moi, ce frêle corps s'efface, Cherchent toujours sans les cueillir, N'attirent plus mes pas; enfans de la matière Un jour me dépouillant du vêtement d'argile, Dans les ténèbres d'ici-bas Libre des fers pesans que le monde lui rive, Et vous, feuilles des bois que va jaunir l'automne, Vous tomberez aussi, car vous n'avez qu'un jour; Aux arbres comme à nous Dieu donne leur couronne, La leur ôte du front, la leur rend tour-à-tour: Sur le gazon et sur l'arène Vous roulerez au gré des vents, |