Plaintes d'un père délaissé par son fils. Fut-il pour l'oeil d'un père un plus affreux réveil? Sans que ses premiers feux, ni sa clarté mouvante Nos rochers, dont les flancs te devaient un asile; C. Dělavigne. Souvenir. Toujours je pleure au nom de mon enfant: Sans sa beauté rien n'est beau dans ma vie. Du monde et de ses biens c'est le seul que j'envie, Mais je ne l'attends plus, la mort me le défend. Je le revois dans la fleur éphémère ; Elle apparaît pour sourire et périr; Comme elle, mon enfant, sur le sein de sa mère, Je le revois partout où de mon âme S'attache encor la mourante langueur: Quand le jour sur mes yeux ne répand plus sa flamme, Je le revois toujours: n'est-il pas dans mon coeur? Mon doux enfant! ma plus vive tendresse ! Quel autre amour me tiendrait lieu de toi? De te garder, mon fils, je ne fus pas maîtresse; Mais ta fidèle image, oh! comme elle est à moi! Mme Desbordes Valmore. Le vieux vagabond. Dans ce fossé cessons de vivre. Je finis vieux, infirme et las. Les passants vont dire: Il est ivre." Tant mieux! Ils ne me plaindront pas. D'autres me jettent quelques sous. Courez vite; allez à la fête. Vieux vagabond, je puis mourir sans vous. Oui, je meurs ici de vieillesse, Parce qu'on ne meurt pas de faim. Mais tout est plein dans chaque hospice, La rue, hélas! fut ma nourrice: Aux artisans, dans mon jeune âge, J'ai dit: Qu'on m'enseigne un métier. Va, nous n'avons pas trop d'ouvrage, Répondaient-ils, va mendier. Riches qui me disiez: Travaille, J'eus bien des os de vos repas; J'ai bien dormi sur votre paille. Vieux vagabond, je ne vous maudis pas. J'aurais pu voler, moi, pauvre homme; Mais non; mieux vaut tendre la main. Au plus, j'ai dérobé la pomme Qui mûrit au bord du chemin Vingt fois pourtant on me verrouille Dans les chachots, de par le roi. De mon seul bien on me depouille. Vieux vagabond, le soleil est à moi. Le pauvre a-t-il une patrie? Que me font vos vins et vos blés, Et vos orateurs assemblés ? Dans vos murs ouverts à ses armes Comme un sot j'ai versé des larmes. Vieux vagabond, sa main ne nourrissait. Comme un insecte fait pour nuire, Je vous aurais chéris en frère. Vieux vagabond, je meurs votre ennemie. J. P. Béranger. Les hirondelles. Captif au rivage du Maure, Un guerrier, courbé sous ses fers, Depuis trois ans je vous conjure Du vallon, où ma vie obscure L'une de vous peut-être est née Vous avez dû plaindre l'amour. Ma soeur est-elle mariée ? De tant d'amis ne me parlez-vous pas ? Sur leurs corps, l'étranger peut-être Du vallon reprend le chemin : Sous mon chaume il commande en maître, De ma soeur il trouble l'hymen. |