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Fils impur de la nuit et fantôme invisible
Qui comprime le coeur qu'il perce de son dard,
Ecartant de la main ces images impures
Qu'on appelle ici-bas plaisirs et volupté,
J'ai d'une onde divine arrosé mes souillures
Pour oublier enfin ce que j'avais été ;

Et j'ai dit au Seigneur: „Seigneur, que votre face
Ne se détourne pas de sur un coeur meurtri
Qui devant votre trône, afin de trouver grâce,
A retrempé son âme aux torrens de l'oubli;
Que votre éternité d'un misérable atome
Ne mesure jamais l'inévitable erreur:
La faiblesse toujours est l'excuse de l'homme,
Et l'oubli du péché la vertu du Seigneur!"

P. F.

PLAINTES.

Epitre au Marquis d'Argens.*

Ami, le sort en est jeté ;
Las du destin qui m'importune,
Las de ployer dans l'infortune
Sous le poids de l'adversité,
J'accourcis le terme arrêté,
Que la nature, notre mère,
A mes jours remplis de misère
A daigné départir par prodigalité
D'un coeur assuré, d'un oeil ferme
Je m'approche de l'heureux terme

Qui va me garantir contre les coups du sort.

Sans timidité, sans effort,

J'entreprends de couper dans les mains de la parque,

Le fil trop alongé de ses tardifs fuseaux;

Et sûr de l'appui d'Atropos,

Je vais m'élancer dans la barque,

Où sans distinction le berger, le monarque,
Passent dans le séjour de l'éternel repos.

Adieu, lauriers trompeurs, couronnes des héros. Il n'en coûte que trop pour vivre dans l'histoire; Souvent quarante ans de travaux

Le grand Frédéric écrivait ce bel épitre en l'année 1757, lorsqu'il était très malheureux et avait pris la triste résolution, de se suicider.

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