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Écoutez ce doux chant mollement s'élever:

Le rossignol ainsi près de lui vous appelle;

Sa voix dans votre coeur cherche un écho fidèle,
Qui redise avec lui ce cri qu'aiment les cieux :
Oh! que la terre est belle, et que je suis heureux

Caumont.

A l'espérance.

Espérance qui m'accompagnes
Depuis qu'ensemble nous allons,
A travers bois, prés et montagnes
Ai-je trouvé les chemins longs?

De lassitude sur la route,

Dis-moi, jamais me suis-je assis?
Nous marchons gaîment et j'écoute
Ce que tu me fais de récits.

L'arbre nous donne son ombrage,
L'oiseau nous chante ses chansons;
Il est si beau notre voyage
Toujours nous le recommençons.

A son lever toujours l'aurore

Nous voit nous remettre en chemin :

Hier nous faisions route encore,

Nous ferons route encor demain.

Pélerins que ta joie allége
De repos n'ont jamais besoin,

Aussi jamais te demandai-je :
Le terme est-il encore loin ?*

A travers bois, prés et montagnes,
A tes côtés pressant le pas,
Espérance qui m'accompagnes,

Marchons toujours, n'arrivons pas.

Qu'en de lointains projets l'ambitieux s'égare;
Moi, mes voeux ne vont point au-delà du printemps;
Je dis, prêt à jouir des dons qu'il nous prépare:

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Viennent l'ombre et les fleurs, mes désirs sont contents!"

Que l'avare en sa joie aride et solitaire

Sur son coffre penché s'enivre de son or!
Quand je verrai de fleurs s'émailler le parterre,
Mes yeux contempleront un plus charmant trésor.

Des nouvelles des cours qu'un autre s'inquiète!
Qu'importe ce que font les ministres des rois ?
Moi, je ne veux savoir, inutile poète,

Que ce qu'ont de nouveau les champs, les prés, les

bois.

Philomèle au bocage hier s'est fait entendre!
C'est ma nouvelle à moi; mon coeur en est joyeux.
Autre nouvelle encore, et que j'aime à répandre ·
Un chèvre-feuille en fleurs a récréé mes yeux.

Gaillon.

Le passager.

Jeté sur la mer de la vie,
Passager jeune et malheureux,

Je vais sans guide et sans patrie,
Errant sous un ciel orageux.

Quand, sur la foi de son étoile,
Plus d'un pilote audacieux
Sans crainte a déployé sa voile
En fredonnant des airs joyeux ;

A travers cette onde infidèle,
Où le suit mon oeil incertain,
Je n'ai pas même une nacelle
Qui puisse accueillir mon destin.

Cependant, loin de la tempête,

Son front s'est couronné de fleurs...
Et les vents sifflent sur ma tête!
Et mes yeux sont mouillés de pleurs !

Ah! comment éviter l'orage?
Quel asile est paisible et sûr?
Qui peut m'indiquer un rivage
Que protége un ciel toujours pur?

J'irais vers la terre chérie

Dont il féconde le sillon,

Comme une fleur pâle et flétrie,
Chercher encore un doux rayon.

Et sous un ombrage fertile,

Au souffle embaumé du zéphir,

L'onde à mes pieds, toujours tranquille,

Viendrait murmurer et mourir.

Mais sur mon front, que décolore

Un aquilon injurieux,

Je ne verrai point cette aurore
Se lever pour moi dans les cieux.

Sous le flot irrité qui gronde
J'aurai disparu sans retour,

Avant que mon oeil ait sur l'onde

Supris la lueur d'un beau jour.

H. Rolle.

A Madame

Puisque les anges ne descendent plus sur la terre,

il faut bien se plaindre aux femmes.

Oh! laissez-moi vous dire et vous redire encore,
A vous, qui n'avez pas de sourire moqueur,
Tous les âpres soucis dont l'ardeur me dévore,
Tous les maux de mon coeur.

Prêtez, prêtez l'oreille à la plainte brisée

D'un pauvre infortuné qu'environnent des sourds; comme un grain d'encens dans une urne embrasée,

Puis,

Un seul mot de secours!

Un seul mot de secours qui parfume mon âme;
Car pour tromper en moi les tourments du regret,
Que faut-il bien souvent? d'une bouche de femme
Le son le plus distrait.

Un ami, de nos maux partageant la souffrance,
Nous aide à supporter la vie et ses combats,
Mais la femme fait croire à la belle espérance,
Le seul bien d'ici-bas.

Que dis-je ? vous parlez, ma peine est adoucie;
Qu'un de vos plis m'effleure, et je rêve enchanté :
Tel au simple toucher la robe du Messie

Ramenait la santé !

Entre deux souvenirs mes douleurs suspendues
Me rendent tour à tour un triste et doux émoi :
Deux femmes !... pour jamais l'une et l'autre perdues,
Revivent près de moi!

Tandis que mes regrets et la voix maternelle
En songe me font croire au céleste séjour,
La vierge du passé, touchante, me rappelle
Mes délices d'un jour.

Si j'ai cherché la gloire en ma première ivresse,
De ses brillants reflets si l'on me vit épris,
C'était pour la jeter aux pieds d'une maîtresse
Comme un joyau de prix.

J'ai tout perdu, la gloire et son puissant délire;
J'ai tout maudit; de rien je ne suis plus jaloux.

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