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Sous les traits d'un enfant délaissé sur les flots, "C'est l'élu du Sina, c'est le roi des fléaux,

Qu'une vierge sauve de l'onde.

Mortels, vous dont l'orgueil méconnaît l'éternel, „Fléchissez un berceau va sauver Israël,

„Un berceau doit sauver le monde!"

Victor Hugo.

Extase.

J'étais seul près des flots, par une nuit d'étoiles.
Pas un nuage aux cieux, sur les mers pas de voiles.
Mes yeux plongeaient plus loin que le monde réel,
Et les bois, et les monts, et toute la nature,
Semblaient interroger dans un confus murmure
Les flots des mers, les feux du ciel.

Et les étoiles d'or, légions infinies,

A voix haute, à voix basse, avec mille harmonies, Disaient, en inclinant leurs couronnes de feu;

Et les flots bleus, que rien ne gouverne et n'arrête, Disaient en recourbant l'écume de leur crête:

C'est le Seigneur, le Seigneur Dieu !

Victor Hugo.

Espoir en Dieu.

Espère, enfant! demain! et puis demain encore!
Et puis toujours demain ! croyons dans l'avenir.
Espère, et chaque fois que se lève l'aurore,
Soyons là pour prier, comme Dieu pour bénir!

Nos fautes, mon pauvre ange, ont causé nos souffrances.
Peut-être qu'en restant bien longtemps à genoux,
Quand il aura béni toutes les innocences,
Puis tous les repentirs, Dieu finira par nous !

Victor Hugo.

La providence,

O toi dont l'oreille s'incline
Au nid du pauvre passereau,
Au brin d'herbe de la colline,
Qui soupire après un peu d'eau.

Providence, qui les console,

Toi, qui sais, de quelle humble main
S'échappe la secrète obole,

Dont le pauvre achète son pain!

Toi, qui tient dans ta main diverse
L'abondance et la nudité,

Afin que de leur doux commerce
Naissent justice et charité.

Charge-toi seule, ô providence,
De connaître nos bienfaiteurs,
Et de puiser leur récompense
Dans les trésors de tes faveurs !

Notre coeur, qui pour eux t'implore,
A l'ignorance est condamné;

Car toujours leur main gauche ignore,
Ce que leur main droite a donné!

Mais que le bienfait, qui se cache
Sous l'humble manteau de la foi,
A leurs mains pieuses s'attache
Et les trahisse devant toi!

Qu'un voeu, qui dans leur coeur commence,
Que leurs soupirs les plus voilés

Soient exaucés dans ta clémence
Avant de t'être révélés!

Que leurs mères dans leur vieillesse,
Ne meurent, qu'après des jours pleins,
Et que les fils de leur jeunesse
Ne restent jamais orphelins!

Mais que leur race se succède
Comme les chênes de Membré,

Dont aux ans le vieux tronc ne cède,
Que quand le jeune a prospéré.

Ou comme des eaux toujours pleines,
Dans les sources de Siloé,

Où nul flot ne sort des fontaines,
Qu'après que d'autres ont coulé !

Alph. de Lamartine.

Le temple.

Qu'il est doux, quand du soir l'étoile solitaire,
Précédant de la nuit le char silencieux,

S'élève lentement dans la voûte des cieux,

Et que l'ombre et le jour se disputent la terre;

Qu'il est doux de porter ses pas religieux
Dans le fond du vallon, vers ce temple rustique
Dont la mousse a couvert le modeste portique,
Mais où le ciel encor parle à des coeurs pieux!
Salut, bois consacré ! Salut, champ funéraire,
Des tombeaux du village humble dépositaire;
Je bénis en passant tes simples monuments.
Malheur à qui des morts profane la poussière !
J'ai fléchi le genou devant leur humble pierre,
Et la nef a reçu mes pas retentissants.

Quelle nuit! quel silence! au fond du sanctuaire
A peine on aperçoit la tremblante lumière
De la lampe qui brûle auprès des saints autels.
Seule elle luit encor, quand l'univers sommeille
Emblème consolant de la bonté qui veille
Pour recueillir ici les soupirs des mortels.

Avançons. Aucun bruit n'a frappé mon oreille;
Le parvis frémit seul sous mes pas mesurés;

Du sanctuaire enfin j'ai franchi les degrés.

Murs sacrés! saints autels! je suis seul, et mon âme Peut verser devant vous ses douleurs et sa flamme, Et confier au ciel des accents ignorés,

Que lui seul connaîtra, que vous seuls entendrez.

Mais quoi! de ces autels j'ose approcher sans crainte!
J'ose apporter, grand Dieu! dans cette auguste enceinte
Un coeur encor brûlant de douleur et d'amour;
Et je ne tremble pas que ta majesté sainte
Ne venge le respect qu'on doit à son séjour!
Non, je ne rougis plus du feu qui me consume:

L'amour est innocent quand la vertu l'allume.
Aussi pur que l'objet à qui je l'ai juré,

Le mien brûle mon coeur, mais c'est d'un feu sacré; La constance l'honore et le malheur l'épure.

Je l'ai dit à la terre, à toute la nature;

Devant tes saints autels je l'ai dit sans effroi :
J'oserais, Dieu puissant, la nommer devant toi.
Oui, malgré la terreur que ton temple m'inspire,
Ma bouche a murmuré tout bas le nom d'Elvire;
Et ce nom, répété de tombeaux en tombeaux,
Comme l'accent plaintif d'une ombre qui soupire,
De l'enceinte funèbre a troublé le repos.

Adieu, froids monuments! adieu, saintes demeures!
Deux fois l'écho nocturne a répété les heures
Depuis que devant vous mes larmes ont coulé.
Le ciel a vu ces pleurs, et je sors consolé.

Peut-être au même instant, sur un autre rivage,
Elvire veille ainsi, seule avec mon image,

Et dans un temple obscur, les yeux baignés de pleurs,
Vient aux autels déserts confier ses douleurs.

Alph. de Lamartine.

Espoir en Dieu.

Pour moi, quand je verrais dans les celestes plaines Les astres s'écartant de leurs routes certaines,

Dans les champs de l'éther l'un par l'autre heurtés, Parcourir au hasard les cieux épouvantés;

Quand j'entendrais gémir et se briser la terre;

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