Page images
PDF
EPUB

Un mouvement subit de l'âme

D'un heureux avenir alors vient me flatter;
Et l'espérance qui m'enflamme

Me donne des vertus pour mieux le mériter.

Qu'il est consolant de se dire :

Je renaîtrai pour vivre en l'éternel séjour!...
L'homme sage croit à l'empire

Où nous devons sans cesse aimer d'un pur amour.

Oh! combien il est méprisable

Le philosophe impie et qui croit au néant!
Il est un Dieu juste, adorable;

L'esprit peut en douter, jamais le sentiment.

Croyons à la suprême essence,

A l'enivrant espoir de l'immortalité ;

Faisons tous des voeux pour la France, Et mourons, s'il le faut, pour notre liberté.

Lemarchant - Laviéville.

Priez pour moi.

Dans la solitaire bourgade,
Rêvant à ses maux tristement,
Languissait un pauvre malade
D'un long mal qui va consumant.
Il disait: „Gens de la chaumière,
Voici l'heure de la prière

Et les tintemens du beffroi :

Vous qui priez, priez pour moi.

,Mais quand vous verrez la cascade
Se couvrir de sombres rameaux,

Vous direz: „Le jeune malade
"Est délivré de tous ses maux!“
Lors revenez sur cette rive
Chanter la complainte naïve;
Et quand tintera le beffroi,
Vous qui priez, priez pour moi.

Quand à la haine, à l'imposture,
J'opposais mes moeurs et le tems;
D'une vie honorable et pure
Le terme approche, je l'attends.
Il fut court mon pèlerinage!

Je meurs au printems de mon âge;
Mais du sort je subis la loi :
Vous qui priez, priez pour moi.

„Ma compagne, ma seule amie,
Digne objet d'un constant amour!
Je t'avais consacré ma vie,

Hélas! et je ne vis qu'un jour.

Plaignez-la, gens de la chaumière,

Lorsqu'à l'heure de la prière

Elle viendra sous le beffroi

Vous dire aussi: „Priez pour moi."

Milleroye.

Moïse sur le Nil.

Mes soeurs, l'onde est plus fraîche aux premiers feux

du jour !

[ocr errors]
[ocr errors]

Venez: le moissonneur repose en son séjour;

,La rive est solitaire encore;

„Memphis élève à peine un murmure confus, „Et nos chastes plaisirs, sous ces bosquets touffus, „N'ont d'autre témoin que l'aurore.

„Au palais de mon père on voit briller les arts; "Mais ces bords pleins de fleurs charment plus mes regards

"

Qu'un bassin d'or ou de porphyre;

,Ces chants aériens sont mes concerts chéris;

„Je préfère aux parfums qu'on brûle en nos lambris Le souffle enbaumé du zéphire!

[ocr errors]

Venez: l'onde est si calme et le ciel est si pur! „Laissez sur ces buissons flotter les plis d'azur

„De vos ceintures transparentes;

„Détachez ma couronne et ces voiles jaloux,
„Car je veux aujourd'hui folâtrer avec vous
„Au sein des vagues murmurantes.

„Hâtons-nous... Mais parmi les brouillards du matin,
"Que vois-je ? Regardez à l'horizon lointain....
„Ne craignez rien, filles timides !

"

C'est sans doute, par l'onde entraîné vers les mers, „Le tronc d'un vieux palmier, qui, du fond des déserts, Vient visiter les pyramides.

"

"

Que dis-je si j'en crois mes regards indécis,

C'est la barque d'Hermès ou la conque d'Isis,

"

Que pousse une brise légère.

Mais non; c'est un esquif, où, dans un doux repos,

„J'aperçois un enfant qui dort au sein des flots, Comme on dort au sein de sa mère.

"

"I sommeille; et, de loin, à voir son lit flottant, „On croirait voir voguer sur le fleuve inconstant

Le nid d'une blanche colombe.

Dans sa couche enfantine il erre au gré du vent; „L'eau le balance, il dort, et le gouffre mouvant "Semble le bercer dans sa tombe!

„Il s'éveille: accourez, ô vierges de Memphis!
„Il crie... Ah! quelle mère a pu livrer son fils
„Au caprice des flots mobiles?

I tend les bras; les eaux grondent de toute part. „Hélas! contre la mort il n'a d'autre rempart

„Qu'un berceau de roseaux fragiles.

[merged small][ocr errors][merged small]

„Mon père les proscrit: mon père est bien cruel

De proscrire ainsi l'innocence !

Faible enfant! ses malheurs ont ému mon amour:

„Je veux être sa mère; il me devra le jour,

[ocr errors]

S'il ne me doit pas la naissance."

Ainsi parlait Iphis, l'espoir d'un roi puissant,

Alors qu'aux bords du Nil son cortège innocent
Suivait sa course vagabonde;

Et ces jeunes beautés qu'elle effaçait encor,
Quand la fille des rois quittait ses voiles d'or,
Croyaient voir la fille de l'onde.

Sous ses pieds délicats déjà le flot frémit.
Tremblante, la pitié vers l'enfant qui gémit

La guide en sa marche craintive;

Elle a saisi l'esquif! fière de ce doux poids, L'orgueil sur son beau front, pour la première fois, Se mêle à la pudeur naïve.

Bientôt divisant l'onde et brisant les roseaux, Elle rapporte à pas lents l'enfant sauvé des eaux Sur le bord de l'arène humide;

Et ses soeurs tour à tour au front du nouveau né, Offrant leur doux sourire à son oeil étonné,

Déposaient un baiser timide!

Accours, toi qui, de loin, dans un doute cruel,
Suivais des yeux ton fils sur qui veillait le ciel,
Viens ici comme une étrangère;

Ne crains rien: en pressant Moïse entre tes bras,
Tes pleurs et tes transports ne te trahiront pas,
Car Iphis n'est pas encor mère !

Alors, tandis qu'heureuse et d'un pas triomphant,
La vierge au roi farouche amenait l'humble enfant,
Baigné des larmes maternelles,

On entendait en choeur, dans les cieux étoilés,
Des anges, devant Dieu de leurs ailes voilés,
Chanter les lyres éternelles.

„Ne gémis plus, Jacob, sur la terre d'exil;
„Ne mêle plus tes pleurs aux flots impurs du Nil,
Le Jourdain va t'ouvrir ses rives.

Le jour enfin approche où vers les champs promis „Gessen verra s'enfuir, malgré leurs ennemis,

„Les tribus si longtemps captives.

« PreviousContinue »