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8 mai.

Ma chère Sally est encore très malade, hélas! je me tenais en sentinelle (Habacuc, II, 1) pour recevoir toutes les leçons que cette épreuve doit me donner. Je demande à mon Dieu l'esprit d'Abraham, lorsqu'il se rendait à ses ordres sur la montagne de Morijée ! J'ignore le terme et l'issue de cet exercice de souffrances!

30 mai.

Le Tout-Puissant a eu pitié de nous et a accordé du soulagement à nos prières. Ma chère Sally se porte beaucoup mieux, et son état surpasse nos espérances!

28 juin.

Béni soit Dieu; mon ame recueillie est en communion avec sa volonté sainte et je sens ma soumis. sion s'augmenter. En lisant aujourd'hui une des lettres de M. Wesley, j'en ai retenu cette remarque dont j'ai été pleinement satisfaite : La résignation parfaite est la même chose que l'amour parfait ; qui donne à Dieu son cœur, lui consacre sa volonté. J'ai plusieurs croix à porter dans ce moment, surtout à cause de la maladie de ma chère Sally, qui paraît être une consomption; mais je dis toujours en pleine confiance: L'Éternel est vivant et mon rocher est beni; que le Dieu donc de ma délivrance soit exalté (Psaume XVIII, 47). Il me semble que, dans ses dispensations à notre égard, le Tout-Puissant n'a qu'un

seul but; c'est que notre volonté vienne se confondre avec amour dans la sienne, et je trouve que rien ne m'est plus nécessaire que de m'abandonner en toute confiance entre ses puissantes mains. Il arrive souvent que l'épreuve qu'on redoutait le plus passe ainsi qu'une ombre. Comme Abraham, il faut offrir tout ce qu'on a de plus précieux, et alors le Seigneur, nous soulageant, apporte un changement au sacrifice. Depuis peu de temps nous avons été dans le cas de faire des dépenses extraordinaires; mais mon Père céleste y a pourvu. Je viens de recevoir une lettre de la femme de mon frère aîné, qui m'envoie un billet de banque d'une valeur considérable. Seigneur, ne m'as-tu pas dit: Je bénirai ceux qui te béniront (Genèse, XII, 3). Je te prie, ô mon Dieu, que ma belle-sœur, à cette occasion, participe à tes faveurs, mais surtout à tes grâces spirituelles!

20 juillet.

Seigneur, je sens tes compassions; augmente-moi ton assistance! Ma chère Sally est toujours malade, sa toux continuelle m'oppresse le cœur. Il n'y a que la volonté de Dieu que je lui préfère dans ce monde, A ce but je rapporte toutes choses: je le dois, je le

veux.

6 août.

J'ai été appelée à faire dernièrement un petit voyage dont il est résulté un grand dérangement dans ma santé. Toutefois Dieu a daigné m'assister

cette semaine dans toutes mes petites réunions. Dans celle de mardi dernier, nous avons prié particulièrement avec ferveur pour ma chère Sally, et dès lors il me semble qu'elle a éprouvé quelque soulagement. Notre chère malade jouit d'une paix parfaite, et elle prie que cette épreuve, pendant qu'elle dure encore, accomplisse les desseins de Dieu qui la lui envoie pour son bien. Et nous disons tous avec elle: Amen. Conseils relatifs à mes tentations, soins de ma santé et de ma maison, aide pour ma mémoire, secours pour la cure d'ames auprès des paroissiens, et pour les affaires relatives à l'Église et au règne de Dieu; que de choses je perdrai avec elle. Quelquefois Dieu lui permet de tenir encore une réunion de classe, et d'y répandre une parole pleine de vie spirituelle, et plusieurs personnes y pleurent déjà sa perte! Le Seigneur exige de moi que je ne regarde qu'à lui seul, auquel je dois plus que toutes mes affections.

14 août.

Aujourd'hui j'ai achevé la quatorzième année de mon veuvage, et j'ai demandé de nouveau à suivre l'Agneau quelque part qu'il aille (Apoc., xiv, 4), étant destinée à survivre encore à ma plus intime amie. Je me suis humiliée ce matin devant la sainte

majesté de l'Éternel, pour savoir à quel point il m'est permis de lui réitérer mes prières pour la guérison de ma Sally. Mais en cas que cette coupe ne puisse pas être éloignée de moi, Seigneur, que mon silence

soit rempli de ton Saint-Esprit, et mon cœur de reconnaissance pour te glorifier à jamais!

23 décembre.

Je suis une femme affligée en mon esprit. L'état de ma chère Sally ne fait qu'empirer. Je ne dois plus avoir d'autre sentiment sur la terre que celui-ci : Ta volonté soit faite. L'amie qui seule avait partagé toutes mes épreuves, le seul être au monde à qui je puisse en parler pour en être entièrement comprise, va me manquer. Les souffrances d'une toux mortelle et d'autres maux réunis, auraient contraint bien d'autres personnes à garder le lit dans un dépérissement pareil. Mais dès qu'elle peut retrouver la moindre force, elle veut absolument en faire usage, soit pour ce qui concerne le règne de Dieu, soit même pour les affaires de la maison. O! Seigneur, tu vois la privation qui va m'atteindre ! Mais je m'attacherai à ces paroles du prophète: «Je conduirai les aveugles par le chemin qu'ils ne connaissaient point, et je les ferai marcher par les sentiers qui leur étaient inconnus. Je changerai en leur présence les ténèbres en lumière et les choses tortues en choses droites; je leur ferai cela, je ne les abandonnerai point (Isaïe, XLII, 16). »

21 mai.

Le Seigneur ne permet pas que mes tristes soins pour ma chère Sally nuisent aux progrès de son règne là où je porte sa parole, et Sally attend de l'amour

divin, avec la même confiance, son rétablissement ou la fin de ses maux.

24 septembre.

L'état de ma Sally ne nous laisse plus aucune espérance terrestre. Seigneur, tes yeux sont sur nous. Nous sentons ton divin secours au milieu de nos souffrances! Rends-nous cette croix utile! Tu nous as fait éprouver que chacun de tes dons et de tes secours augmente à mesure qu'on en fait usage. Il n'y a que ta puissante miséricorde qui dissipe ces ténèbres que me ramène le retour des chagrins.

1er janvier 1801.

Qu'ai-je vu, qu'ai-je senti depuis que j'ai suspendu mon journal? Le 3 décembre ma très chère Sally, ma meilleure amie, est entrée avec une pleine assurance dans son glorieux repos. Le Seigneur m'a donné la force d'écrire le récit de sa vie et de sa mort chrétiennes; mais je suis presque trop faible pour relire ce mêmerécit. Oh! que le Seigneur nous aide dans le temps du besoin ! Lui seul connaît tout ce que fut pour moi l'amie que je perds; lui seul peut remplir un vide aussi grand dans mon cœur! Ce qui ajoute à mes souffrances, c'est que je n'ai pas encore retrouvé avec mon Dieu une communion aussi intime que celle qu'il me tarde d'avoir. Cependant je l'adore pour m'avoir dépouillée de tout ce qui me restait de liens ici-bas. Je crains de m'être trop appuyée sur mon

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